vendredi 23 avril 2010

Des chirurgiens et des diplomates avocats au secours de Damien

Des chirurgiens et des diplomates avocats au secours de Damien
William Michel
22 Avril 2010

Le scoop de cet article apparaîtrait bien étrange , ridicule même aux yeux de ses lecteurs ,Il sonnerait très mal aux oreilles du producteur agricole haïtien qui depuis la fondation de cette patrie n’a cesse de réclamer des hommes de Damien, des agronomes pour les encadrer techniquement et financièrement. Il apparaitrait ironique aussi aux yeux des agronomes eux-mêmes qui demanderaient perplexes ce que des chirurgiens et des diplomates avocats viendraient faire au chevet d’une agriculture reconnue effectivement malade.

Dans ce scoop il n’y a effectivement une part d’ironie mais il y a surtout de l’objectivité qui traduit la clairvoyance et la maturité politique de l’auteur d’une part et l’expression de la déchéance des rapports entre des états souverains devenus tuteurs et un état á « souveraineté surveillée » devenu sujet qui est traité et qui se laisse traité par des étrangers, qui débarquent sur le sol haïtien avec des clichés « Ready to use made in Washington Paris, Ottawa » dont l’OEA s’apprête á appuyer la mise en exécution. La boucle politique est bouclé et étant bouclée, l’économie agricole qui en dépend, se met á dériver avec comme force motrice la solution du libre échangisme appliquée a sa maladie qui a fait sauter la production nationale.

L’agriculture hattienne souffre en effet de deux maladies qui nécessitent en amont l’intervention des diplomates avocats suivie de celle des chirurgiens qui, une fois leurs tâches terminées, resteraient aux commandes politiques du pays pour faire appel aux agronomes détenteurs de la solution technique. Elle est malade parce qu’elle ne peut plus répondre á sa mission naturelle première qui est de produire pour garantir la consommation locale. Elle est malade de la maladie de carence de spécialistes véritables stratèges politiques pour apporter des solutions qui tranchent d’avec les stratégies de faux semblants qui depuis 1990 ne donnent aucune chance de salut aux producteurs haïtiens. Le séisme du 12 janvier n’a rien apporté de nouveau en terme de maladies politico économiques. Tous les habitants qui avaient laissé Port-au-Prince y sont déjà retournés après seulement quatre a cinq jours parce que les conditions de vie qui avaient justifié leur migration pour la capitale haïtienne sont devenues plus que pires et ce sont ces mêmes migrants qui savaient envoyer de l’argent aux membres de la famille restés sur place..

Le séisme du 12 Janvier 2010 a été seulement la goute d’eau qui a fait déborder le verre .Malheureusement les dirigeants du secteur, par instinct de la conservation du pouvoir s’obstinent á proposer des stratégies de « bouillons réchauffés » qui n’ont pas résisté á l’épreuve du temps.

Pourquoi la présence de diplomates avocats ?

L’agriculture haïtienne a besoin des diplomates avocats pour retirer Haïti sous l’obédience du chapitre neuf du conseil de sécurité de la charte des Nations Unies et pour revoir les articles et les closes qui régissent les accords de prêts ou de dons signés entre le gouvernement haïtien et la coopération internationale datée de 1972. Ils ont été revus avant la fin du vingtième siècle .Les dispositions de traités , conventions et protocoles internationaux qui soutiennent ces accords font partie d’un arsenal d’articles qu’on pourrait denommer de code pénal de la coopération internationale. Elles sont á prendre ou á laisser. Elles sont toutes étudiées et construites unilatéralement en faveur des intérêts des pays bailleurs de fond. Le non respect ou la non observance par le gouvernement haïtien d’un seul article de ce réseau de règlements, tous cohérents entr’eux , entraine la suspension des décaissements au mépris des bénéficiaires directs qui ne connaissent même pas l’ABC de ces derniers. Des complications économiques qui n’ont rien a voir avec les objectifs des projets sont exploitées par les bailleurs de fonds pour arrêter les décaissements , mettant en cause les objectifs de développement des projet mêmes. On peut citer les nombreuses fois ou l’aide internationale a été coupée, soit pour le non paiement des redevances du gouvernement á ses créanciers ,soit a cause d’une complication politique coup d’état

Un autre impair jamais vu, a pris naissance a la suite des cyclones qui ont frappé Gonaïves en 2004 et en 2008. Il se prolonge á la suite du tremblement de terre du 12 janvier 2010. Les pays donateurs ont tout simplement et unilatéralement décidé de la désaffectation des fonds d’’un prêt de l’état haïtien, ratifié en assemblée nationale, pour être réalloués á des « projets plus urgents « . Récemment, les décaissements des projets FIDA : PICV2, PPI II ,PAIP n’ont pas été arrêtés , mais ils ont été tout simplement désaffectés pour être réalloués aux projets d’urgence post cyclones ou aux projets post désastres , pour être gérés directement par l’internationale au mépris des votes de ratification par le parlement haïtien réuni en assemblée nationale. .Ceci n’a jamais ete prevu dans les conditions de financement de ces projets. La gestion de la majorité des fonds des projets qui sont des prets contractes par l’etat Haïtien, par conséquent remboursables, sont remis aux ONGs pour être dépensés sans contrôle du gouvernement. L’ambition du pouvoir aidant, les hommes de Lavalas ,exécutif et législatif, ont préféré abdiquer leur droit á la gestion directe aux étrangers exerçant leur pouvoir d’occupant comme les gouvernements de Vichy et de Pétain 1942)
De nouveau la gestion des fonds désaffectés est remise a la FAO, le frère Siamois du FIDA. La FAO, conformément á l’orientation donne au MARNDR depuis l’embargo destructeur de l’économie haïtienne en général, devient le gestionnaire direct de ces fonds .Il en est de même des fonds de la BID, de l’USAID, de la Banque mondiale ou de l’UE donnés en dons et mis a la disposition d’Haïti .Ces fonds sont parfois remis aux ONGs internationales FAO, IICA, ou á des contractants étrangers PADF,CARE Internationale, Winner, pour être gérés selon bon leur semble..Ces détournements, il faut bien les appeler par leurs vrais noms, sont arrivés á la suite d’appels pressants du gouvernement de besoins de fonds pour gérer l’urgence créée par les catastrophes humanitaires et naturelles qui s’abattent sur le pays.

Dans les conditions unilatérales de désaffectation et de gestion directe des fonds d’aide par l’étranger , toute coopération internationale confondue , lesquelles conditions modifient totalement les objectifs de développement de ces projets , il n’est pas juste d’appeler au chevet de l’agriculture haïtienne des agronomes munis de compétences technologiques limités pour résoudre des problèmes institutionnels et politiques hors de leur portée. Il faut faire appel a des diplomates avocats haïtiens chevronnés pour défendre le cas de l’agriculture haïtienne avec l’aide technique des agronomes du terroir rompus aux techniques d’encadrement des agriculteurs haïtiens.

Pourquoi des chirurgiens pour l’agriculture haïtienne ?

Les maladies chroniques dont est frappée l’agriculture haïtienne depuis la fondation de la patrie n’ayant pas reçu les traitements agronomiques de choix depuis leur apparition se sont aggravées et ont donnés lieu á la formation de cancer qui dans les limites actuelles de la technologie médicale sont considérées comme des maladies terminales dégénératives. Sauf que, les ressources naturelles qui conditionnent l’agriculture sont renouvelables, il est possible avec une gestion d’un autre genre redonner sante a cette agriculture. Pour retrouver la sante ,l’agriculture haïtienne n’a pas besoin d’agronomes expérimentés encore moins des agronomes d’ONG, spécialistes des stratégies de faux semblants. Elle a besoin de stratèges , de visionnaires réalistes , véritables chirurgiens de politique agricole, capables de faire des diagnostics différentiels éprouvés et de proposer des traitements á court a moyen et á long terme. II est retenu des stratèges parce que les interventions doivent trancher d’avec la stratégie de gestion de l’urgence qui ont amplifié le malheur d’Haïti pendant les vingt dernières années. Parmi ces interventions stratèges il faut mentionner

1-La déclaration de patrimoine national de l’humanité de toutes les terres d’Haïti et comme telles elles sont devenues propriété directe de l’état Haïtien et sujettes a des exploitations strictement dictées par les spécialistes assermentés du MARNDR.

2-La reconstitution de la propriété moyenne des terres de l’exploitation agricole sur des bases économiquement rentables liés á la vocation naturelle des terres

3-Abrogation de la loi successorale sous sa forme actuelle et la promulgation d’une nouvelle loi empêchant l’émiettement de la propriété agricole et sa redistribution á tous ls fils et filles de la descendance.

4-La promulgation d’une nouvelle loi de la reforme judiciaire consacrant l’indépendance du pouvoir judiciaire et la cohérence des trois pouvoirs de l’etat et d’un nouveau code rural régissant le foncier.

5 La promulgation d’une loi sur le crédit rural mettant ce dernier a la portée du producteur haïtien ou qu’il se trouve sur le territoire haïtien , tout ceci en adéquation avec les services de recherche et d e vulgarisation du MARNDR.

6-la promulgation d’une nouvelle loi organique sur les ONG reconnaissant leur apport dans la gestion comptable des fonds dépensés strictement dans le cadre du plan de développement local légal des collectivités territoriales préparé par le pouvoirs déconcentrés et décentralisés de la collectivité territoriale.

En dehors de ces pré-requis, tout projet de politique agricole préparé unilatéralement par le MARNDR constitue un pis aller et n’augure rien de nouveau pour les producteurs haïtiens qui seront victimes des mêmes contraintes.

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