samedi 31 juillet 2010

Haiti Reconstruction: Centre de ville de Port-au-Prince: Ronald Baudin et Charles Castel rassurent

Haiti Reconstruction: Centre de ville de Port-au-Prince:
Ronald Baudin et Charles Castel rassurent
Cyprien L. Gary du Nouvelliste

Haïti: A la demande de l'ATH et de l'AMCHAM, le ministre de l'Économie et des Finances, Ronald Baudin et le gouverneur de la Banque centrale haïtienne Charles Castel, ont accepté de partager avec le grand public leur vision sur la réhabilitation et la reconstruction du centre-ville de Port-au-Prince lors d'un déjeuner-débat organisé ce mercredi au Karibe Convention Center sur le « Réaménagement du Centre-ville de Port-au-Prince »

Cet échange d'idées entre les représentants du gouvernement et les membres du secteur des affaires concernés a calmé les appréhensions des commerçants et propriétaires d'immobiliers de ce centre névralgique de la capitale haïtienne à l'avant-veille du lancement du grand projet de réaménagement annoncé du Centre-ville. Une initiative placée dans le contexte du plan de relèvement et de développement d'Haïti, explique le ministre des Finances qui a profité de l'occasion pour rassurer et mettre en garde les propriétaires concernés par ce projet.

« Les déclarations d'utilité publique que nous serons amenés à faire seront décidées dans le strict respect du droit des propriétaires à une juste et équitable indemnisation. Nous ne donnerons pas des indemnités dérisoires à des propriétaires sous prétexte qu'ils ne payaient pas suffisamment d'impôts locatifs. Mais nous ne permettrons pas non plus que l'État soit victime de surenchère », a déclaré Ronald Baudin sur un ton ferme.

Le projet de réaménagement tel que présenté par le président du Comité de facilitation de la reconstruction du Centre-ville de Port-au-Prince Ronald Baudin a de quoi faire rêver les Port-au-Princiens. Il consiste, selon lui, en la délimitation d'un périmètre pilote borné à l'Est par le Champ de Mars, au Nord par la rue des Césars, à l'Ouest par la mer et au Sud par la rue Saint-Honoré.

« Dans cet espace, nous allons réhabiliter des infrastructures publiques : drainages, électricité, système d'adduction d'eau, chaussée, trottoirs, signalisation, places publiques, etc. Le ramassage des ordures se fera régulièrement, l'électricité et l'eau seront disponibles 24h/24, les patrouilles policières 24h/24 et la circulation ne sera pas handicapée comme elle l'était avant le 12 janvier par le déploiement anarchique des marchandes sur les galeries, les trottoirs voire sur la chaussée », décrit le grand argentier qui souligne au passage que les trois pouvoirs ainsi que tous les ministères et les bureaux publics seront logés dans ce périmètre.

Une vingtaine d'immeubles répondant aux normes parasismiques seront construits, et, déjà, des institutions internationales envisagent de placer dans cette zone le siège de leur représentation. Interrogé sur le coût de ce projet de réaménagement, le ministre dit attendre l'étude complète du projet pour évaluer le montant du budget.

« Cependant, en ce qui concerne les 20 premiers immeubles publics qui vont être construits dans le cadre de ce projet, ils coûteront 150 millions de dollars américains. Et ce financement est déjà disponible », a-t-il indiqué.

Beaucoup de pas restent encore à faire avant le lancement de ce projet. A ce sujet, M. Baudin a fait état des négociations entre le gouvernement haïtien et la Fondation Prince Charles d'Angleterre pour l'établissement d'un plan d'aménagement pour le nouveau Port-au-Prince. Ces négociations sont à un stade très avancé et le contrat va être signé sous peu, annonce le titulaire des Finances qui en a profité pour inviter le grand public, en particulier, le secteur privé des affaires à collaborer à ce grand projet.

Car, d'après lui, le Centre-ville ne pourra pas être un projet fiable sans la contribution du secteur privé des affaires.

Les architectes urbanistes Lesly Voltaire et Paul Emile Simon au cours d'un exposé renforcé par des diaporamas Power Point ont fait visionner à l'assistance des images relatives au programme de réhabilitation du Centre-ville de Port-au-Prince entamé depuis 1999. Un programme ambitieux qui relate les grands changements envisagés par le gouvernement haïtien dans le cadre d'un plan global de réaménagement de l'espace tenant compte de la décentralisation, du développement touristique, de la construction des infrastructures, etc.

Trop beau pour être vrai, scandent des membres de l'assistance devant cette présentation hallucinante de deux experts qui s'y connaissent.

Un panel composé du juriste Frédéric Salès, des notaires Lesly Alphonse et Patrick Victor a exposé les inquiétudes des commerçants et propriétaires du centre-ville au risque d'expropriation abusive qui menace ces derniers dans le cas où l'Etat haïtien déciderait de déclarer les lieux zone d'utilité publique.

Les interventions successives de ces panélistes concernant le mode d'indemnisation qui devra accompagner l'expropriation ont soulevé un débat assez animé dans l'assistance. Ce qui a nécessité à chaque fois l'intervention soit du gouverneur de la BRH, Charles Castel soit du ministre Ronald Baudin pour signifier aux récalcitrants la volonté de l'Etat haïtien de ne pas léser les intérêts privés des propriétaires d'immeubles lors du processus de dédommagement.

« Nous sommes très attachés au respect des intérêts privés », soutient le gouverneur Charles Castel qui a souligné l'arme de la surenchère que certains propriétaires commencent à brandir rien qu'à l'annonce du processus. Cela est d'autant plus incompréhensible que la BRH et le ministère des Finances ont l'habitude de faire des affaires avec des propriétaires d'immeubles du centre-ville.

« Nous avons des références claires, la Banque centrale a eu à faire pas mal d'acquisitions avant le tremblement de terre sur une dizaine d'années. Nous avons une claire idée du prix au mètre carré du bas de la ville », confie M. Castel qui juge aberrant les prix avancés par des propriétaires d'immeubles à la BRH après le séisme.


Cyprien L. Gary

La classe politique est dépassée

La classe politique est dépassée
Jean Erich René

Ottawa le 29 Juillet 2010

Une fois de plus, les intellectuels de la classe moyenne haïtienne ne seront pas au rendez-vous des prochaines joutes électorales. Ils ne pourront pas obtenir le ticket d'entrée à cause de leur manque d'intégration sur le nouvel échiquier politique. Beaucoup d'entre eux n'ont pas saisi à temps la nouvelle réflexion politique et culturelle en cours depuis 3 décennies. D'où le profond malaise qu'ils éprouvent à se faire comprendre voire accepter et voter par cette nouvelle génération avide de changements mais qui ne retrouve nullement leurs aspirations à travers leurs discours plutôt entachés d'un traditionalisme desséchant et stérile.

Actuellement, il est triste de constater la pluralité des Candidats. En effet, la réalité sociopolitique nous oblige à prendre conscience de la présence sur l'échiquier politique de plusieurs visages représentatifs du pays du dehors et du dedans. Cette dichotomie traduit une différence capitale de lecture de la vie nationale. Cette remarque loin d'être anodine définit la contradiction de la trame du tissu social haïtien dont les mailles et les étirements depuis 25 ans surprennent les hommes politiques traditionnels.

Sommes-nous en train de fantasmer dans le but de chanter les funérailles de nos leaders qui ont longtemps erré sans jamais avoir accès au Palais National ? Sans aucune méchanceté de notre part, notre argumentaire basé sur un constat de fait, les invite à prendre conscience d'une nouvelle réalité qu'ils semblent encore ignorer. Quelles sont les attentes de la population haïtienne ? Quel est le modèle de leadership qu'elle préfère ?

La faune politique haïtienne est constituée du Gros et du Menu bétail avec la prédominance du dernier sur le plan numérique. Vox populi, vox dei, dit-on. Les intellectuels de la classe moyenne et la bourgeoisie traditionnelle, embarqués dans une lutte de couleur depuis deux siècles, ont prouvé leur incapacité à satisfaire les desiderata de la masse nécessiteuse. De plus la diaspora haïtienne, initiée aux rouages de la vie sociale et politique de l'Occident, a acquis une autre conception des mécanismes de fonctionnement de l'État et de la Société. Elle rejette d'emblée le modèle politique creux de nos éternels candidats. Sans plan, ni programme, ni projets, d'où sortiront le progrès social et l'avancement économique souhaités ? Il n'est pas question non plus d'exclure les Haitiens vivant à l'étranger des élections haitiennes puisque leur apport économique est appréciable et même indispensable. D'ailleurs à quoi servirait leur Ministère? Point n'est besoin de légiférer sur une quelconque problématique identitaire, car par leur agir social en faveur de leurs familles, ils appartiennent à la conscience collective haïtienne. De ce fait ils sont des citoyens à part entière.

Cette fainéantise de la classe politique haïtienne s'explique par la routine intellectuelle. Elle se complait dans un lyrisme exacerbé en martelant des phrases bien tournées pour électriser la foule et orienter le verdict des urnes en sa faveur. Depuis près d'un demi-siècle, les joutes électorales ne constituent plus le lieu géométrique des débats littéraires favorables aux tribuns. Aujourd'hui les données politiques tournent autour du concret. Qui plus est, depuis le séisme du 12 janvier 2010, la population sinistrée connait moult problèmes. Elle n'a plus d'oreilles pour les fallacieuses promesses des doctes candidats. Un toit, de la nourriture, du boulot, des écoles pour leurs enfants etc. telles sont les conditions du Nouveau Contrat Social.

Le candidat qui cristallise le mieux les besoins matériels de la population souffrante sera son favori même s'il est un allophone. Le langage des faits est plus convaincant que les circonvolutions éthérées de nos prétendus lettrés. Notre analyse, quoique sévère est une copie conforme de la réalité sociopolitique haïtienne en cette fin de 2010, année électorale ou pré-électorale. Les enjeux politiques sont rivés aux objectifs des Partis Politiques inscrits. Le calvaire des victimes du séisme du 12 janvier 2010 représente le plat de résistance. Il n'est pas question de tourner autour du pot, le malade est à l'article de la mort. Une prescription est urgente.

mercredi 28 juillet 2010

Wyclef Jean à la présidence d'Haïti - Un éventuel cauchemar pour les oncles Sam et Napoléon

Wyclef Jean à la présidence d'Haïti - Un éventuel cauchemar pour les oncles Sam et Napoléon

Wilson Saintelmy, Montréal 28 juillet 2010


Wyclef Jean a le potentiel d’être à la génération hip-hop en Haïti ce que Barack Obama est à la génération «Nexus» aux États-Unis.

Selon toute vraisemblance, la pop-star américaine d'origine haïtienne Wyclef Jean s'apprête à déposer sa candidature aux prochaines élections présidentielles en Haïti, fixées au 28 novembre 2010. Si les rumeurs étaient fondées, un tel geste aurait une portée beaucoup plus considérable qu'il n'apparaît à première vue.

Précisons que la recevabilité de la candidature de Wyclef Jean risque d'être le principal obstacle sur son parcours vers la magistrature suprême de l'État haïtien. Cependant, son éventuelle participation aux prochaines joutes présidentielles en Haïti semble avoir été accueillie avec le même scepticisme que celle de Barack Obama à l'investiture démocrate. Erreur. Il ne faut pas sous-estimer une telle initiative.

René Préval est de plus en plus assimilé à l'avatar haïtien de George W. Bush. Le tremblement de terre du 12 janvier 2010 est à celui-là ce que le 11 septembre 2001 et l'ouragan Katrina furent à celui-ci. De plus, Wyclef Jean a le potentiel d'être à la génération hip-hop en Haïti ce que Barack Obama est à la génération «Nexus» aux États-Unis. D'autant que Port-au-Prince a de plus en plus l'allure du «Bronx des Antilles». Jusque-là, rien pour donner des migraines aux puissances tutrices et à l'élite créole d'Haïti.

Mais lorsque ces dernières et les médias réaliseront que Jean risque d'être davantage l'avatar de Jean-Bertrand Aristide ou d'un Hugo Chavez plutôt que celui du Terminator, ils anticiperont à sa juste mesure l'impact de son éventuelle élection à la présidence d'Haïti. Un tel scénario serait la deuxième humiliation infligée par un «outsider» à l'élite politique haïtienne. Ce serait également un deuxième Waterloo politique, après celui de 1990, pour la communauté internationale concernant la mouvance populiste haïtienne telle qu'incarnée jadis par Jean-Bertrand Aristide.

Comme Aristide

Wyclef Jean est porteur de la même symbolique messianique que ce dernier. Il émerge comme son dauphin potentiel, du moins dans l'imaginaire des déshérités d'Haïti.

Tout comme Aristide, Jean est d'origine modeste, issu de la majorité bossale. Tout comme Aristide en 1990, Wyclef Jean est, en 2010, l'Haïtien le plus populaire à l'étranger en raison de sa célébrité artistique, et en Haïti, davantage pour son activisme social.

Avocats de la cause des pauvres, les deux hommes font désormais partie de la gauche progressiste de la diaspora haïtienne. Les deux auraient fait le saut en politique dans la trentaine avancée. Les deux sont des virtuoses de l'irrationnel; l'un par la théologie de la libération; et l'autre, par celle du hip-hop.

À l'instar d'Aristide, qui demeure un rescapé salésien devenu millionnaire, Jean est un miraculé du Bronx new-yorkais, béatifié dans la nouvelle Canaan et au panthéon mondial du hip-hop. Il apparaît aujourd'hui comme la réincarnation du rêve aristidien d'un lendemain meilleur pour la majorité bossale du pays.

Les deux hommes sont porteurs d'un double messianisme: judéo-chrétien et socio-économique (que l'on retrouve au coeur de la théologie de la libération et celle du hip-hop). Le potentiel révolutionnaire d'une expérimentation politique concrète de cette dernière religion musicale ferait désormais partie du possible à travers une éventuelle élection de Jean à la présidence d'Haïti. Ce fut néanmoins le cas pour la théologie de la libération avec Jean-Bertrand Aristide. Et nous connaissons la suite.

Faillite de l'élite

Peu importe la dynamique future entre la théologie de la libération et le hip-hop en Haïti, Jean-Bertrand Aristide et Wyclef Jean demeurent le produit de la faillite spectaculaire de l'élite créole haïtienne; faillite matérialisée par l'incapacité avérée d'une telle élite à combler le vide de leadership observé notamment dans l'Haïti postséisme.

Wyclef Jean sera, dans l'imaginaire populaire, la rançon politique de la trahison et du comportement fratricide de René Préval envers Jean-Bertrand Aristide, son ex-frère jumeau. Voilà qui fait de Jean le dauphin non désiré du patriarche déchu. Il a le potentiel d'être à Jean-Bertrand Aristide ce que Josué fut à Moise, prophétise déjà la mouvance aristidienne. Pour celle-ci, le double exil infligé à Aristide équivaut à une persécution inquisitive, sinon à un double pèlerinage forcé pour l'ex-président.

Cependant, par-delà l'interprétation caricaturale qu'elle provoquera, une éventuelle candidature de Wyclef Jean à la présidence d'Haïti enverrait un message non équivoque quant à la détermination de la diaspora haïtienne de démanteler l'embargo constitutionnel imposé à cette dernière par la Constitution de 1987.

Double révolution

Si Jean réussissait son pari, nous risquons d'assister à une double révolution en Haïti. Culturelle, la première verrait la langue créole émerger, pour la première fois dans l'histoire du pays, comme langue officielle prédominante avant l'anglais, question d'accommoder l'hypothétique nouveau chef d'État. Ultime forfait à l'oncle Napoléon: exit le français comme instrument bicentenaire de domination de la majorité bossale par la minorité créole.

Politique, la deuxième révolution s'ouvrirait sur deux avenues opposées. L'une risque de conduire Haïti vers un statut factuel de 51e État américain. L'autre l'engagerait sur l'autoroute bolivaro-chévariste, en tant qu'expression du populisme et de la mouvance néoprogressiste latino-américaine.

Plausible, ce dernier scénario serait une catastrophe politique pour l'oncle Sam. Démiurge du hip-hop, Jean n'a pas la carrure conservatrice d'un Schwarzenegger. Son univers mental est buriné par la solidarité organique et la culture revendicative des ghettos du Bronx new-yorkais.

Le hip-hop est aux Afro-Américains ce que la théologie de la libération est à la gauche bolivaro-chévariste. Une éventuelle alliance entre le capital, le populisme, la théologie de la libération et celle du hip-hop en Haïti? Voilà ce que couve l'apparente banalité d'une hypothétique présidence de Wyclef Jean. À suivre.

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Wilson Saintelmy, Montréal
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Éducation politique des Haïtiens

Éducation politique des Haïtiens

Jean Erich René

erichrene@bell. net



Il faut immuniser les Haïtiens et les Haïtiennes contre la gangrène politique que certains imposteurs s’amusent à propager au sein de la population en âge de voter, afin de se forger un leadership de mauvais aloi. Ils flattent les bas instincts du peuple par des propos complaisants choisis dans le dictionnaire des mensonges afin d’obtenir ses suffrages. Le renard, alléché par le fauteuil présidentiel, compte entrer au Palais National dans une ambiance de Mardi Gras. En effet, il porte le masque de Pinocchio pour amuser les enfants mais les adultes encore conscients restent indifférents devant ses grimaces.



Il faut assurer l’éducation politique de nos compatriotes afin qu’ils puissent faire un choix rationnel aux élections et ne pas tomber dans les pièges des nouveaux magiciens de la scène politique haïtienne. Comment peut-on demander à un peuple qui a faim, qui a soif et qui par surcroit dort sous des tentes, de séparer l’ivraie du bon grain! La prostitution n’est pas exempte aux bonnes familles. Après tant d’années de viol et de coups bas, la conscience politique citoyenne devient aberrante. Le déchouquage, les crimes autorisés, les vols qualifiés etc. ont grandement modifié le code de comportement en Haïti. Aujourd’hui nous sommes arrivés au point où certains membres du Conseil Électoral et même le représentant de l’Église Catholique sont mis à l’index pour nulle autre cause que le vol.



Autrefois, dans les classes primaires il y avait un Manuel d’Instruction Civique et Morale qui inculquait aux enfants certains rudiments. Un bref survol de l’organisation politique et administrative d’Haïti fixait certaines balises dans leurs jeunes cerveaux. Le professeur Wesner Emmanuel dans son livre « Histoire, Géographie et Éducation Civique », réservé aux élèves de la 7e année fondamentale a tenté de rappeler certains principes directeurs de la vie sociale et de l’environnement politique haïtien. Cependant ce support pédagogique en sciences sociales ne suffit pas pour inspirer à nos candidats le sens du devoir ni les exigences de leurs participations aux affaires publiques avec un sentiment de respect d’autrui et d’appartenance à une société polie.



Le peuple haïtien est analphabète à 85%. Il n’a jamais lu ni entendu les préceptes d’aucun manuel d’instruction civique et morale. Il ignore les vertus citoyennes. Il n’a jamais été initié aux rouages politiques et administratifs de l’Appareil de l’État ni au mécanisme de fonctionnement de l’économie, comment peut-il juger de leurs bienfaits dans le choix de leurs candidats aux élections législatives et présidentielles. Le Peuple haïtien n’a jamais été motivé sur l’importance des biens publics ni le respect de la vie humaine, les biens privés, le droit des citoyens relativement à leur choix, leur liberté, leur sensibilité, leur sentiment personnel. Il ignore complètement les principes fondamentaux de l’existence pacifique. Voilà pourquoi on viole facilement sa conscience en lui offrant le pingouin à la place de l’ananas.



Pour mieux chevaucher les masses populaires et voler leurs bulletins de vote, on les maintient dans une ignorance crasse tout en excitant leur colère et leur esprit de vengeance. Ainsi l’espace politique haïtien est transformé en une véritable mare de boue où normalement le cochon rêve de se proclamer ROI et le maringouin Violoniste. Peut-on laisser Haïti aller à la dérive au point de devenir le fief incontesté du menu bétail et de la gent ailée ?



Notre silence serait complice ! Comme le lion nous préférons regagner les bois pour y mourir au lieu de recevoir le coup de pied d’un âne au Palais National. Depuis 25 ans on assiste à une ségrégation dangereuse et inadmissible au niveau des décisions politiques majeures de nos Hommes d’État :

1. La classe moyenne, le réservoir des intellectuels les plus avancés d’Haïti, est écartée subtilement des joutes électorales, d’où leurs attitudes distantes et même béates par rapport aux événements de la vie nationale.

2. Lentement mais sûrement, les entreprises de l’État passent aux mains des Entreprises Privées et deviennent même la propriété de certains hommes politiques étrangers. Le Ciment d’Haïti, la Hasco etc. sont fermés au profit de certaines organisations mafieuses qui importent de préférence le ciment, la farine, tout en augmentant le chômage et la vie chère. La Teleco a été vendue et l’Administration portuaire contrôlée par le Club de Bourdon.

3. Le riz de l’Arkansas a évincé les planteurs de l’Artibonite au point de forcer le Mea Culpa de Bill Clinton devant la Commission du Sénat américain. Malgré tout, il insiste et persiste comme architecte de la reconstruction d’Haïti.

4. Le volant du pays, avec la complexité expresse du timonier de la barque nationale, glisse vers la République dominicaine.

5. La CIRH, cette nouvelle Commission Civile, de concert avec Jean Conzé, Petit Noël Prieur, Lamour Dérance, compte dicter ses volontés dans les intérêts de la Métropole.

Ii y a péril en la demeure. Notre avenir de Nation libre du monde est hypothéqué par les vendeurs de la patrie. Pour un réveil national, il faut mobiliser la jeunesse haïtienne et les medias. L’éducation politique des Haïtiens devient un impératif majeur de l’heure.

vendredi 23 juillet 2010

Existe-il une alternative à l’aide internationale ?

Existe-il une alternative à l’aide internationale ?
Jean-Eric PAUL
« Les Etats n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts »
Charles de Gaulle

Sortir Haïti du marasme actuel, nécessite de la part des Haïtiens l’esprit d’ingéniosité et d’innovation. Il faut transcender les démarches traditionnelles et les veilles habitudes qui ont conduit au naufrage national. Le 12 janvier 2010, est un jour qui marquera notre histoire. Jamais, on a enregistré un bilan aussi lourd en pertes humaine et matérielle. Le séisme aurait causé la mort de plus de 300 000 individus et une perte « d’environ 60% du PIB national[1] ». Après l’urgence humanitaire, il va falloir passer à la longue et fatidique tache de la reconstruction qui nécessiterait énormément de moyens financiers. Selon la BID, il faut14 milliards $ pour la reconstruction. Pour cette lourde tache, le Président de la République , M. Préval ne compte que sur la générosité de la communauté internationale. Le Président va de capitale en capitale, de conférence à conférence en vue de solliciter l’aide en faveur d’Haïti. Certes, Haïti ne peut prétendre pouvoir survivre actuellement, sans un appui international. Mais, là où le bât blesse, c’est que, de promesse en promesse, la situation socio-économique du pays va de mal en pis. Il serait irresponsable et non judicieux de compter que
sur la générosité internationale. Il en va de la dignité et de la responsabilité du peuple haïtien de trouver des ressources propres pour accompagner le processus de reconstruction. Dans ce qui suit, nous nous demanderons s’il est possible d’envisager d’autres moyens pour répondre aux besoins de ressources financières ? Le projet paraît bien audacieux en ces temps difficiles. Mais on se risquera tout de même à montrer que nous n’avons pas épuisé toutes les opportunités existantes.

Quatre (4) propositions pour faire face à la difficile épreuve de la reconstruction

Les Français disent toujours : " Nous n'avons pas de pétrole mais nous avons des idées". La question qui nous intéresse ici est celle de savoir comment trouver les ressources financières pour la reconstruction nationale hormis celles accordées par la communauté internationale. Pour répondre à cette question, nous formulons quatre (4) propositions.


A- La création d’une Banque Nationale de Développement


D’abord, il nous faut un cadre rationnel de financement national et cela ne peut se faire que par la création d’une Banque Nationale de Développement en vue de collecter les fonds nécessaires pour financer seule ou conjointement les grands projets d’intérêt collectif (Routes, aéroports, transports collectifs, logements sociaux et autres équipement collectifs). Elle pourrait aussi accorder des prêts à plus ou moins long terme aux collectivités territoriales, aux agriculteurs et industriels. Vouloir reconstruire c’est se donner les moyens adéquats. Une telle entreprise ne peut se faire en dehors de l’Etat. La question du développement ne saurait être une affaire strictement privée ou publique. C’est la raison pour laquelle cette banque ne pourrait être que le fruit d’un triple partenariat public/privé/international. Il s’agirait d’un consortium des banques dans lequel l’Etat posséderait au minimum une minorité de blocage. On pourrait ainsi imaginer le capital social de la Banque détenu par l’Etat haïtien, le secteur privés haïtien et certaines institutions internationales (la BID, Caribean Development Bank et autres banques privées étrangères). Elle aurait une totale autonomie de gestion avec un statut de société anonyme dirigée soit par un Conseil d’Administration ou par un Directoire avec Conseil de Surveillance. Elle aurait une structure organisationnelle, transparente, sérieuse et efficace au même titre que les grandes banques étrangères. Elle serait certifiée ISO (International Standard Organisation) appliquant ainsi les principes de management par la qualité et auditée chaque année. Les conditions d’accord de crédit seraient transparentes et réglementées. Le risque de crédit serait géré de façon efficace. Tous les prêts accordés seraient couverts par un mécanisme d’assurance (Crédit Default Swap) contre le risque de défaut de l’emprunteur (incapacité de rembourser, ne pas payer ses annuités à temps).

Canaliser les transferts des haïtiens d’outre-mer

Une fois, ce cadre de financement rationnel et solide créé, nous pouvons envisager la canalisation des transferts des Haïtiens d’outre-mer via la Banque Nationale de Développement et les orienter vers la reconstruction et le développement du pays. Selon le FOMIN[2], les transferts des haïtiens d’outre-mer vers Haïti, ont été évalués à 1.8 Milliards $ en 2007. Ce chiffre ne prend pas en compte les transactions faites par voie informelle. Elle pourrait à travers une stratégie de développement international, implanter une succursale dans chaque mégapole étrangère à forte concentration de la communauté haïtienne (New York, Montréal, Paris, etc.). Si la Banque prélève en moyenne 6% de frais sur ce montant. C’est 108 millions $ qui revient annuellement à la banque pour financer le développement.

Collecter une partie de l’épargne des haïtiens d’outre-mer

Outre la canalisation de transferts, on pourrait aussi envisager la collecte d’une partie de l’épargne des haïtien d’outre-mer à partir d’un simple dépôt à terme par exemple un « Plan Epargne Logement » de maturité 7 ans à raison de 200 $ ou 147 Euros par mois (taux de 1.36 $ = 1 euro). Si 500 000 Haïtiens d’outre-mer sur plus de 2 000 000 souscrivent à ce Plan épargne, c’est : 500 000* 200 $ = 100 000 000 $ par mois. Ce qui donne annuellement : 100 000 000 * 12 = 1.200.000.000 $ en terme de collecte d’épargne par la banque de développement. Plusieurs pays ont privilégié cette approche de canalisation de transferts et de collecte de l’épargne de leurs ressortissants. On peut citer les cas du Maroc, de la Tunisie avec plusieurs banques en France, Belgique et Espagne. On peut aussi mentionner le Mali avec sa banque de développement en France.


B- Le lancement d’un Grand Emprunt National


Dans le cas d’Haïti où tout doit être reconstruit, il n’est pas inutile d’en appeler à l’élan civique et patriotique de tous les haïtiens au sens d’un effort de solidarité nationale. Disposant de plus de 2 millions d’Haïtiens à l’extérieur du pays, l’Etat pourrait lancer un grand emprunt en direction principalement de la diaspora haïtienne via la Banque Nationale de Développement. En 1993, l’ancien premier ministre français Edouard Balladur, trouvant la France dans une situation socio-économique grave, a lancé un emprunt dit « Emprunt Balladur » aux français pour redynamiser l'activité économique. Le montant initial était de 40 milliards de francs ; il a eu un succès tel que l’Etat français en a recueilli environ 110 milliards de francs. Quant au cas d’Haïti, on chercherait à lever 1 000 000 000 $ à travers des « bons de développement » de maturité 10 ans, émis et garantis par la Banque Nationale de Développement (consortium réunissant Etat, Secteur Privé haïtien et l’International). Il s’agirait d’une forte mobilisation citoyenne, de toutes les forces vives du pays au sens d’un effort de solidarité nationale. L’argent récolté servirait à investir dans des projets d’utilité collective tout en préservant la rentabilité des investissements. On pourrait penser à créer des sociétés de transport terrestre, maritimes et aérien, logements sociaux, sociétés d’autoroutes, de chemins de fer par exemple, industries. On pourrait même donner droit et non obligation aux souscripteurs la possibilité de transformer le nominal et les intérêts à maturité en actions de ces sociétés à prix préférentiels. Ils deviendraient ainsi propriétaires de celles-ci. Pour assurer le succès d’untel projet, il faut des moyens incitatifs tels que la double nationalité, le vote des haïtiens à l’étranger via les ambassades, la rétention d’un mois de salaire de tous les membres des pouvoirs exécutif et législatif (Président de la république, PM, Ministres, Secrétaires d’Etat, Parlementaires, etc..) pour la souscription de ces bons, la mise en avant du patriotisme haïtien, la nostalgie du pays et le désir de vivre ensemble, transformeraient à coup sur ce projet en un grand succès national. Ces moyens incitatifs ont été mis en évidence par Dilip Ratha[3] qui reconnaît en cette approche un moyen sure et stable de financement. L’idée des Bons de développement est la meilleure façon de capter une partie de l’épargne des Haïtiens d’outre pour financer le développement. Actuellement, la qualité de signature de l’Etat haïtien ne lui permettrait pas de trouver preneur de ses bons sur un marché financier. Quand bien même, on trouverait preneur, cela reviendrait trop cher à notre pays de passer par les marchés obligataires étrangers. C’est dans ce contexte, qu’Israël a eu recours à sa diaspora. À la suite de la Guerre d’Indépendance, Israël était un pays économiquement sinistré. Les immigrants qui affluaient d’Europe et de pays arabes vivaient dans des abris primitifs. La nourriture était rationnée et le pays ne disposait d’aucune infrastructure économique. Après avoir essuyé un refus de la Bourse de New York de lever des fonds, le Premier Ministre David Ben-Gourion a pris la décision de créer l’Organisation des Obligations de l’État d’Israël pour financer les infrastructures du pays »[4]. Ces bons furent réservés à la diaspora juive établie partout dans le monde. De 1951 à nos jours, Israël a levé 31 milliards $ pour financer son économie.
L’expérience de l’Inde n’est pas non plus négligeable. En effet, à travers 3 opérations : « India Development Bonds » (1991) avec 1.6 milliards $, « Resurgent India Bonds » (1998) avec 4.2 milliards $ et « India Millennium Deposits » (2000) avec 5.5 milliards $ [5], l’Inde a sollicité le support de sa diaspora dans le cadre du financement de son développement. Selon Dilip Ratha, avoir recours à l’argent de sa diaspora via de bons est un moyen indépendant de mobiliser des capitaux pour financer pour financer le développement.


C- La création d’un fond souverain dit « Fonds Louverture »


Un Fonds Souverain est un fonds d’Etat. Le premier fonds souverain créé, a été le fonds du Koweït en 1953. L’idée de la création d’un tel fonds en Haïti, est loin d’être négligeable. Nombreux sont les Etats ayant jugé nécessaire de se doter d’un tel fonds. On peut citer la France , Norvège, Emirat Arabe Unis, Etats-Unis, Chine, Koweït, etc.…
Le Fonds souverain serait un fonds d’assurance
Chaque année le pays est susceptible d’être frappé par des cyclones et inondations pouvant causer d’énormes dégâts au niveau agricole et des infrastructures. Haïti a connu durant ces cinq (5) dernières années:
- Quatre (4) ouragans dévastateurs causant d’énormes dégâts humain et matériels
- Des émeutes de la faim aboutissant au départ du MP J.E Alexis.
- Plusieurs grèves de transports causés par la hausse de prix du pétrole sur le marché international.
- Un tremblement de terre terrible aux conséquences dévastatrices.
Mais ce que beaucoup d’entre nous ignorent, c’est qu’il existe des mécanismes qui permettent de gérer ces grands risques en terme d’assurance aux dommages causés. Il est possible de se prémunir tout aussi bien contre les risques liés aux matières premières qu’aux catastrophes naturelles. Le marché traditionnel des assurances ne permet pas de couvrir ces grands risques. Il existe des mécanismes appropriés pour les gérer. Avec un tel fonds, il deviendrait possiblement de se couvrir contre les catastrophes naturelles en termes de dommages causés.
Le Fonds souverain serait aussi un fonds spéculatif
Nous ne cesserons de le dire, il faut sortir de la vision traditionnelle pour embrasser une nouvelle approche. Cette nouvelle vision du pays passe nécessairement par l’esprit d’innover. La Banque Nationale de Développement, chercherait à avoir une expertise en terme de gestion d’actif. De cette fonction, on saura comment partir d’un fond initial, le faire fructifier pour financer le développement. Georges Soros plus connu chez nous pour ses œuvres caritatives que pour son talent de grand financier, a réussi à accumuler une véritable fortune en très peu de temps. Beaucoup d’entre nous, ignorent les techniques employées par ce Monsieur, qui lui ont valu d’être le 24 ième homme le plus riche des Etats-Unis avec une fortune estimée à 13 milliards $ en 2009, selon le classement du magazine Forbes, ce qui représente deux (2) fois la richesse d’Haïti (PIB national = 6, 95 milliards $ en 2009). Georges Soros a utilisé des techniques couramment utilisées par les grandes banques étrangères, les hedge Funds, etc. Ces techniques pourraient être aussi utilisées par nous pour faire fructifier le fonds initial et dégager ainsi des ressources pour financer le développement.


C- Le partenariat avec des fonds éthiques et souverains


Il existe une catégorie des fonds qu’on appelle couramment « fonds éthiques » qui financent des investissements dits éthiques. Ces fonds essaient de concilier des objectifs financiers classiques (recherche de performance) avec des critères de sélection sociaux, éthiques ou écologiques. L’investissement Social et Éthique peut être réparti aujourd’hui selon les trois axes de développement suivants :
1. L’Investissement Socialement Responsable
2. L’investissement solidaire
3. L’investissement islamique
Certains de ces fonds peuvent dans certains cas appliquer des critères d'exclusion tels que les secteurs de l'armement, de l'alcool et du tabac pour des raisons éthiques ou religieuses. Certains incluraient des investissements allant dans le sens du développement des pays du tiers monde. Dans le cadre des grands projets d’Etat, les partenariats en terme de financement avec les fonds éthiques et les fonds souverains étrangers ne seraient pas négligeables. Le puissant fonds souverain des Emirats Arabes Unis « Abu Dhabi Investment Authority » totalisant un montant total d’actifs de 875 milliards de dollars us, ayant des participations dans des nombreuses sociétés étrangères est un exemple possible de partenariat.

Paris,
Jean-Eric PAUL,
Economiste.

PS : article mis à jour, écrit en 2007, publié en partie dans le journal LE MATIN en novembre 2008

[1] http://www.ruefrontenac.com/nouvelles-generales/international/16891-bellerive


[2] Fonds Multilatéral d’Investissement (FOMIN) de la Banque interaméricaine de développement

[3] Economiste à la Banque Mondiale

[4] https://www.israelbonds.ca/qui.asp

[5] “Diaspora Bonds: Track Record and Potential” by Suhas Ketkar Vanderbilt University & Dilip Ratha The World Bank

In Migration and Development Conference World Bank, Washington DC , May 23, 2007

lundi 19 juillet 2010

Après le séisme, la barque nationale prend de l’eau

Après le séisme, la barque nationale prend de l’eau
Leslie Péan
Jeudi, 08 Juillet 2010

Dans le cadre de son appui à son homologue haïtien, le président dominicain Leonel Fernandez a organisé, le 2 Juin 2010 à Punta Cana en République Dominicaine, la réunion des donateurs internationaux pour sécuriser les promesses de fonds de dix milliards de dollars faites à New York le 31 Mars dernier. Cette réunion fait suite à deux autres organisées antérieurement en République Dominicaine. La première a eu lieu à Santo Domingo le 18 janvier 2010 sur le thème “Unis pour un meilleur avenir pour Haïti” et au cours de laquelle fut décidée la Coordination de l’aide par le biais de l’Organisation des Nations Unies depuis la République Dominicaine et confirmée la proposition de création d’un Fonds de donateurs. La deuxième s’est tenue les 17 et 18 Mars 2010 à Santo Domingo pour concrétiser les accords de la Conférence de Montréal du 25 janvier 2010 et préparer la plateforme pour la Conférence des donateurs du 31 Mars 2010 à New York.



Tout en étant reconnaissante à la République Dominicaine pour son soutien dans le malheur occasionné par le séisme du 12 Janvier 2010, la classe politique haïtienne regarde avec inquiétude sa mise à l’écart dans la politique de reconstruction du pays. Cette inquiétude grandit au fur et à mesure que le président haïtien manœuvre pour prolonger son mandat ou encore pour trouver une position de repli en intronisant son successeur.

Le président Préval a mis fin à la politique de collaboration avec les partis de l’opposition qui avait marqué les deux premières années de son gouvernement. Le séisme du 12 janvier n’a pas ébranlé ses convictions contre cette politique qui, malgré son caractère factice, était pourtant un facteur de stabilité. L’amendement de la Constitution de 1987 a été un ballon d’essai. Voyant que les réactions se retournent contre lui, le président recule mais seulement pour mieux sauter. Après le tremblement de terre, il revient à la charge avec un programme de prolongation de son mandat au-delà du 7 février 2011 qu’il boucle au pas de charge : annonce du projet de Loi d’urgence pour dix-huit mois, présentation de ladite loi devant la Chambre des Députés et du Sénat, vote, publication au journal officiel, le tout en moins d’un mois. Hanté par la perspective de devoir un jour rendre des comptes, le président Préval se bricole une immunité post présidentielle avec ce verrouillage total du champ politique.

La Loi d’urgence créant la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti (CIRH) n’a aucune justification et reflète uniquement l’obstination du chef de l’État à se perpétuer au pouvoir. Toutes les personnalités politiques ont dénoncé la Loi d‘urgence qui veut ligoter le peuple haïtien. La prouesse du gouvernement a été d’obliger la communauté internationale à accepter l’inacceptable et à se taire sur les choses avec lesquelles elle n’est pas censée être d’accord. D’où la recherche par cette communauté internationale d’autres relais à sa domination. Les manifestations à travers le pays demandant la démission de Préval pour crime de haute trahison des intérêts nationaux ont vite fait passer au premier plan Edmond Mulet, représentant des Nations Unies.

Le proconsul Mulet a pris le volant et annoncé la tenue d’élections générales le 28 novembre 2010, écartant la possibilité que le président Préval puisse jouer les prolongations et garder le pouvoir après le 7 février 2011. Une manœuvre pour tenter de désamorcer la mobilisation populaire qui dérange tous ceux qui estiment que les faiblesses internes de la population haïtienne ne peuvent que la conduire à l’anarchie. Thèse d’ailleurs récupérée et maquillée par le professeur Paul Collier qui voit dans tout mouvement de revendications populaires échappant aux filets du statu quo, une excroissance du banditisme. Dans son entendement, il se produit une érosion graduelle des motivations initiales transformant les militants pour la justice sociale en de vulgaires bandits psychopathes et sadiques. [1]

Les réseaux d’unités dominantes-dominées

La crise politique post sismique donne à voir la structure de la domination et les mécanismes d’assujettissement qui bloquent le renouveau. Trois discours s’affrontent. D’abord celui de la prolongation du mandat de Préval, puis celui de la fin de son mandat le 7 février 2011 et enfin celui de sa démission immédiate. La crise montre le fonctionnement du pouvoir dans sa hiérarchie, son côté pyramidal, ses différentes couches, ses aspects macro et micro, et ses complicités même parmi ceux qui le contestent. Mais le plus important dans la crise post sismique demeure la mise à jour des réseaux d’unités de prédateurs et de proies, de bourreaux et de victimes, qui structurent le chaos haïtien. L’incompréhension du fonctionnement de ces réseaux d’unités dominantes-dominées conduit certains à ne pas appuyer les manifestations dans les rues et à se ranger au contraire du côté du gouvernement Préval tout en prétendant le combatte en paroles. Le discours de la rue fait peur à tous ceux qui se mobilisent afin “d’en conjurer les pouvoirs et les dangers, d’en maîtriser l’événement aléatoire, d’en esquiver la lourde, la redoutable matérialité.” [2]

La loi du 4 Mai 2010 émise par le gouvernement Préval sous le prétexte de vouloir « harmoniser les mandats de tous les élus des années 2006 et 2007 » est contestée par les manifestations populaires. Ces dernières la questionnent dans son essence en mettant les projecteurs sur le pouvoir des forts qu’elle représente. D’où la discorde qu’elle soulève car tous les secteurs de la population n’y trouvent pas leur compte. On ne saurait passer sous silence le fait fondamental du refus présidentiel d’organiser les élections législatives aux dates où elles devraient se tenir. Ce refus fait partie d’une stratégie du président de ne pas respecter la Constitution.

Préval refuse de s’engager dans la voie de la concorde et condamne le reste de la classe politique et du pays à la soumission voulue par l’ordre international. En effet, l’éditorial du New York Times du 10 mai 2010 appelait aux élections en novembre en Haïti en déclarant « Si des élections honnêtes peuvent être tenues en Iraq, au milieu de la guerre, du terrorisme et des affrontements ethniques, elles peuvent se tenir en Haïti. La dernière chose dont Haïti aurait besoin ce serait d’ajouter une catastrophe politique par-dessus la catastrophe naturelle. Haïti a besoin d’un gouvernement légitime issu d’une élection légitime. Que la campagne commence ! » [3] Ce que Edmond Mulet devait entériner le 27 mai en convoquant les élections générales pour le 28 novembre 2010.

Le calcul de l’éditorialiste du New York Times manque d’exactitude, de logique et de sagesse. L’Ouest et le Sud-Est qui sont les deux départements principalement affectés par le séisme représentent près de 50% des électeurs inscrits au fichier électoral : 66% des bureaux de vote y compris les six mille établissements scolaires qui servaient de bureaux de votes ont été détruits. Des deux millions de sinistrés et déplacés vivant sous les tentes, au moins la moitié a perdu sous les décombres toutes pièces d’identité incluant carte électorale et acte de naissance, réduisant un électorat déjà faible. L’Office National d’Identification (ONI) ne peut pas délivrer plus de cent mille cartes par mois. [4] Les accusations portées par Rodol Pierre, ex vice-président du CEP suivies de celles du conseiller Jean Enel Désir sur les fraudes électorales et les pratiques occultes ont fait perdre au CEP toute crédibilité.

Egalement, la Loi d’Urgence en éliminant les libertés fondamentales pendant 18 mois ne permet aucune campagne effective des candidats indépendants. Enfin, le Gouvernement a les mains libres pour financer ses propres candidats au détriment des autres partis. Tous ces éléments indiquent que les ressorts de la machine électorale sont cassés et qu’il faudra plus de six mois pour les réparer. Il faut au moins trois audits des cartes électorales, du fichier électoral et du processus électoral, avec la participation des représentants des partis politiques, pour que les élections soient honnêtes et non une mascarade. Les donateurs qui se disent prêts à financer de nouvelles élections dont le coût est estimé à 38 millions de dollars américains sont exaspérés par les lenteurs du président Préval à publier le décret présidentiel appelant aux élections le 28 Novembre 2010. Un manque d’enthousiasme qui cache mal une volonté d’utiliser l’impossibilité matérielle de faire des élections dans six mois afin de rester au pouvoir indéfiniment. L’opposition refuse cette combine et évoque la Constitution qui prévoit qu’en cas de vacance présidentielle, le président de la Cour de Cassation devient président provisoire et organise les élections dans un délai de 90 jours.

Le discours des démocrates demandant la démission du chef de l’État pour ses violations de la Constitution est légitime et ne représente en aucune façon un refus d’organisation d’élections libres pour élire un nouveau président. De 1996 à nos jours, les élections organisées par le gouvernement Préval ont toujours abouti au chaos et ajouté d’autres dimensions à la crise politique. Dans la conjoncture, vouloir les élections avec Préval, c’est placer la charrue avant les bœufs. La justice électorale n’a jamais régné. Il est donc tout à fait normal que des gens sérieux refusent de jouer aux amnésiques en allant aux élections avec ce Conseil Electoral Provisoire (CEP) contrôlé. Les manifestations répondent à la violence du pouvoir utilisant les troupes armées des Nations Unies pour imposer sa volonté. C’est l’enjeu du combat actuel qui fait descendre des milliers de gens dans la rue pour exprimer leur désaccord, au péril de leurs vies.

Non à l’enterrement du dossier Robert Marcello

L’opposition refuse de consentir à absoudre un pouvoir qui organise l’affaiblissement du pays, se livre à des exactions financières, entre autres avec les 197 millions de dollars des fonds de la Petrocaribe financés par le Venezuela, nivelle par le bas la classe politique en introduisant de vrais dégénérés au Parlement, tente d’intimider par la force ceux qui, comme Robert Marcello, ont le courage de s’opposer à son césarisme.

Ce dernier point est important car la peur fait que l’intelligentsia ne dit pas grand chose là-dessus. Ce n’est pas un procès d’intention de dire que le gouvernement, par la lenteur de la justice, se fait complice de la disparition, depuis le 12 janvier 2009, de Robert Marcello qui était à la fois un cadre du parti Organisation du Peuple en Lutte (OPL) et le coordonnateur de la Commission Nationale des Marchés Publics (CNMP). Les démocrates disent avec toute leur force "Non à l’enterrement du dossier Robert Marcello". Le peuple a faim de justice sur ce dossier tout comme il veut faire la lumière sur les crimes perpétrés, sous le premier mandat du président Préval, contre le sénateur Jean-Yvon Toussaint en 1999 et contre le journaliste Jean Léopold Dominique en 2000. Le dossier Marcello ne doit pas être enlisé et ne peut pas être classé.

On sait qu’en 2007-2008, la CNMP (Commission Nationale des Marchés Publics) a attribué de gré à gré une grande part des marchés publics, soit 88 sur 233, représentant 38.5% de son portefeuille. Pourquoi l’assassinat de Robert Marcello correspond-t-il au décaissement des 197.5 millions de dollars pour le financement du Programme d’urgence post-désastre adopté par le gouvernement suite à la saison cyclonique 2008 ? Quels sont les rapports entre l’élimination physique de Robert Marcello le 12 Janvier 2009 et la publication trois jours auparavant d’un article du journal Le Matin dans lequel Jean Hector Anacassis, sénateur du Département de l’Ouest, demande que le budget du CNE (Centre National des Équipements) qui était alors de 21% du budget du Ministère des Travaux Publics, Transports et Communication (MTPTC) soit augmenté à 70% ? [5] Pourquoi les marchés confiés au CNE ne figurent pas dans la liste des marchés attribués par la CNMP ? Pourquoi Marcello avait-il été convoqué au Palais national quelques jours avant sa disparition ? Qui lui a remis après cette réunion une enveloppe contenant un chapelet et pourquoi ? On ne peut donc pas se démarquer de l’hypothèse que l’assassinat de Robert Marcello ait à voir avec son refus d’accepter que les travaux routiers confiés au CNE soient réalisés en régie, en dehors des procédures de la CNMP.

La disparition et la mort de Robert Marcello ne sont pas accidentelles. Il est clair qu’il s’agit d’un assassinat commandité. Il a payé de sa vie pour n’avoir pas voulu être un vassal et un obligé. Qu’a fait le juge d’instruction en charge de ce dossier ? Combien de personnes ont été questionnées ? Quelles sont les pistes qui ont été explorées ? Pourquoi une commission d’enquête indépendante n’a pas été créée pour investiguer l’assassinat de Robert Marcello ? Aucun projet démocratique ne peut être érigé sur de tels assassinats. La mort de Robert Marcello est un révélateur d’une forme de criminalité qui refuse aux parents des victimes la possibilité d’aller se recueillir sur les tombes de leurs êtres chers en faisant disparaître leurs dépouilles.

Les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) de Monsanto Les manifestations expriment un besoin de vérité dans toutes les couches sociales. En milieu urbain comme en milieu rural. Chez les étudiants comme chez les paysans. Après Les Cayes, Jacmel, Léogane , Port-au-Prince, ce sont Hinche et Papaye qui donnent la réplique au gouvernement. Les paysans refusent le cadeau empoisonné de la multinationale américaine Monsanto consistant en la distribution au cours des douze prochains mois de 475 tonnes de plants de maïs transgénique et de légumes [6]. En dépit des démentis du gouvernement, le Mouvement Paysan Papaye (MPP) a dénoncé cette tentative de mise à mort de l’agriculture paysanne avec ces organismes génétiquement modifiés (OGM). Selon son dirigeant Chavannes Jean-Baptiste, ces produits cancérigènes constituent « un très rude coup porté aux petites exploitations agricoles, aux cultivateurs, à la biodiversité, aux semences créoles, etc. et à ce qui reste de notre environnement”. [7]

La souveraineté nationale est attaquée sur le plan politique avec la présence d’Edmond Mulet, sur le plan économique avec la CIRH, sur le plan foncier avec l’arrêté présidentiel du 22 mars 2010, sur le plan militaire avec la MINUSTAH et enfin sur le plan alimentaire avec l’offensive de Monsanto pour se donner le monopole des semences alimentaires. Contre ces forfaits, le peuple s’exprime de mille façons. Avec près de deux millions de personnes sinistrées et une saison cyclonique qui vient de démarrer, on voit difficilement comment le gouvernement pourra faire face à un assaut simultané des différentes forces populaires. La logique du diktat masqué de la communauté internationale triomphera-t-elle des aspirations d’indépendance du peuple haïtien ? Si en Afghanistan, la coalition internationale se propose de dépenser 500 millions de dollars pour acheter la conscience des talibans modérés, la tâche parait plus facile en Haïti avec le milliard de dollars agité devant les milieux d’affaires. Les promesses d’argent de la communauté internationale pourront-elles désamorcer la charge explosive, faire baisser les tensions et créer le sens voulu dans la société haïtienne ?

Fantasme ou réalité

Le pari est risqué et même déstabilisateur malgré les apparences car le président René Préval persiste dans une voie de garage. Pour montrer qu’il n’est pas une ombre sans consistance, comme l’ont constaté tous les observateurs nationaux et internationaux, il donne du relief au Conseil Électoral Provisoire bidon de Gaillot Dorsainvil en lui confiant des tâches additionnelles à celles qui lui étaient assignées en premier lieu. Le pouvoir aveugle, dit-on. Le message des manifestations de rue ne passe pas du côté du gouvernement. Rien d’étonnant pour un groupe qui veut rester aux commandes. Mais du côté international, quels sont les enjeux ? Les donateurs étrangers semblent persuader qu’ils peuvent acheter la conscience de tous les Haïtiens avec de l’argent et même des fausses promesses d’argent. Il n’empêche. Cet excès de confiance dans le gouvernement moribond de Préval ne se justifie pas. On est loin de la prévention quand ce n’est pas carrément de l’irresponsabilité. Pourquoi ne pas se débarrasser de certains bagages et même de l’artillerie pour alléger le bateau et n’éviter qu’il ne chavire devant les vents de la tempête à l’horizon ?

Le président Préval ne met pas de gants pour violenter les Haïtiens qui, dans son entendement, ne sont que des grands enfants qu’on peut traiter n’importe comment. Le président haïtien a bien appris la leçon de ses chers maitres. Devant les protestations des dominés, la seule réponse qui vaille est celle de la surenchère. La recommandation des tuteurs internationaux est que les dominants ne doivent pas faire montre de faiblesse devant les dominés. La recette de l’hostilité est suggérée pour provoquer l’ultime étape de l’aliénation chez ces derniers et accoucher leur sujétion volontaire. Avec des forces armées étrangères si nécessaire. La leçon a été bien apprise depuis des siècles. Depuis 1444, quand un premier contingent de 230 Africains, capturés par les négociants esclavagistes européens, furent vendus au Portugal. Commencé avec la violence des razzias, le commerce de la traite prit de l’ampleur grâce à la corruption des chefs. Comme on le voit aujourd’hui du G8 au G20.

La voix était ouverte à une racialisation des rapports de production pour laquelle l’ignorance des chefs noirs et leur désir de pouvoir sont mis à contribution. Ces derniers sont embrigadés dans la lutte contre leur propre peuple, parfois en échange de pacotille et d’alcool, mais toujours en flattant leur désir de commandement et de gourmandise pour le pouvoir. C’était le démarrage d’un processus que l’Occident a perfectionné pour faire que les chercheurs de pouvoir déciment leur propre peuple et décapitent leurs propres enfants. Avec ou sans remords, cette violence esclavagiste et colonialiste herculéenne n’a jamais cessé. Elle continue aujourd’hui avec certains arrangements d’ordre politique, les derniers étant les G8 ou les G20 où les puissances se complaisent à revoir ensemble les mécanismes de l’engrenage meurtrier d’un empire qui ne sait plus quoi faire pour garder les habitants de la planète sous sa dépendance. Car, comme le démontrent les professeurs Rediker et Linebaugh dans un ouvrage savant, plus les têtes de l’hydre de la résistance sont coupées par la répression, plus la résistance produit d’autres têtes dans « l’histoire de l’exploitation et de la résistance à l’exploitation ». [8]

L’escalade du président Préval dans la banalisation de la tutelle internationale d’Haïti n’a d’égal que son augmentation de la magnitude dans l’échelle de Richter de la déchéance politique. Sa détermination de fragilisation de la société haïtienne est évidente dans le maintien du CEP malgré les protestations de toutes les couches de la société civile. Affichage d’une fondamentale croyance dans l’abrutissement d’un peuple qui aurait perdu la capacité de se révolter. Qui aurait opté de vivre sans conscience car cette dernière ne fait pas bouillir la marmite. C’est aller vite en besogne quand on sait que ce groupement humain a non seulement fait la révolution de 1804 contre les vœux de la communauté internationale, mais a trouvé les ressorts de création pour colmater les fissures qu’un ordre international lui impose pour le faire sombrer dans une inexorable déréliction. Les jours qui suivent la coupe du monde de football d’Afrique du Sud devraient apporter la réponse permettant de dire si le parti pris du président Préval contre le peuple haïtien relève du fantasme ou représente plutôt une réalité devenue méconnaissable après le séisme du 12 janvier 2010.

Leslie Péan est Economiste, écrivain

[1] Paul Collier, The Bottom Billion, Oxford University Press, 2007, pp. 20-37.

[2] Michel Foucault, L’ordre du discours, Gallimard, Paris, France, 1971, p. 11.

[3] « A Good Election Would Help », New York Times, 10 Mai 2010.

[4] Haiti : No Leadership—No Elections, A report to the Members of the Committee on Foreign Relations, United States Senate, One Hundred Eleventh Congress, Second Session, Washington, D.C., June 10, 2010.

[5] Jacques Desrosiers, « Le CNE : entre les priorités de la présidence et celles du gouvernement », Le Matin, Port-au-Prince, mercredi 7 - Jeudi 8 janvier 2009.

[6] Beverly Bell, “Haitian farmers commit to burning Monsanto hybrid seeds”, AlterPresse, lundi 17 mai 2010.

[7] “Courriel groupé de Chavannes Jean-Baptiste, 14 mai 2010” cité dans Beverly Bell, op. cit.

[8] Marcus Rediker et Peter Linebaugh, L’hydre aux mille têtes : l’histoire cachée de l’atlantique révolutionnaire, Éditions Amsterdam, Paris, 2008, p. 28.

Mis à jour (Jeudi, 08 Juillet 2010 20:34)

vendredi 16 juillet 2010

Semences de mais OGM un jeu de poker á trois

Semences de mais OGM un jeu de poker á trois
Michel William
14 juillet 2010

Le feuilleton de semences de mais OGM qui passe sur la plupart des antennes ou des colonnes de la presse nationale et internationale prend l’allure d’un jeu de poker á trois ou les joueurs , Monsanto, le ministre de l’Agriculture haïtienne et le leader du MPP bluffent sans donner l’impression de maitriser l’objet du bluff. Le résultat final est que des énergies importantes se perdent qui pourraient être mieux utilisées dans l’intérêt de la paysannerie que chaque joueur prétend défendre.

Monsanto, le joueur bluffer du commerce des semences

Le marché semencier d’Haïti tout grain confondu est estimé á 20.000 tonnes environ dont 7.200 tonnes pour le mais, 4.200 tonnes pour le millet,4.320 tonnes pour le riz et 3.400 tonnes pour le haricot , si l’on ajoute 900 tonnes supplémentaires pour les légumes et le pois Congo. La compagnie Monsanto vient de donner á Haïti 475 tonnes de semences hybrides de mais d’une valeur de 4 millions de dollars américains .En nous servant du prix donné par le MARNDR, le marché de 20.000 tonnes de semences représenterait un potentiel de 20 milliards de dollars américains ,si Monsanto devait le conquérir .Ceci est de la spéculation américaine qui a toujours mal apprécié tous les problèmes d’Haïti en nous créant des problèmes á des situations toujours mal évaluées.
En théorie Haïti a un besoin de 20.000 tonnes de semences . Dans la pratique, les habitants utilisent á 96% leurs propres semences locales qui donnent des rendements dérisoires de l’ordre 200 á 300 marmites de mais a l’ha ( ½ á ¾ de tonne) contre 1200 á 2.000 marmites á l’ha( 2 t a 5T/ha) pour les semences améliorées et hybrides utilisées depuis longtemps en Haïti. La raison majeure est que le paysan haïtien n’a pas accès au crédit agricole qui lui permettrait d’acheter les intrants agricoles pour obtenir cette production. L’agriculture pratiquée aujourd’hui en Haïti est une agriculture humanitaire qui contraste avec l’agriculture commerciale et qui fait l’affaire des ONG et des organismes d’assistance technique qui survivent dans la gestion directe de petits projets. Même dans l’éventualité de bénéficier des fonds de la CIRH dirigée par l’ancien président américain Bill Clinton, l’agriculture haïtienne au milieu de ses déboires environnementaux et structurels n’offrent pas assez de garanties pour canaliser une partie importante des fonds hypothétiques des 10 milliards de dollars de la reconstruction. D’ailleurs le plan d’investissement du MARNDR pour les cinq prochaines années ne visent que 790 millions de dollars dont une infirme partie est prévue pour les semences. Si Monsanto se positionne c’est pour avoir une partie de ces fonds prévus pour l’achat des semences..La presse internationale grossissant les faits considérablement compare MONSANTO au chef des bisounours qui essaierait de faire main mise sur le marché semencier haïtien en détruisant l’existant.
Joanas Gué, le ministre stratège qui capitalise sur la grande disponibilité de semences de mais hybride pour assurer sa propre survie politique
La presse internationale qui appelle Monsanto Bisounours, compare le ministre Gué á la jeune Candide au pays des bisounours, du genre bouki et malice. Monsanto serait le bouki américain et Gué le ti malice haïtien, toujours victime de la logique paysanne de bouki. En fait c’est á tout un autre scenario auquel on assiste.
Le ministre Gué est porteur d’une mission celle de transformer la vision d’augmentation de la production agricole du Président Préval en politiques agricoles publiques concrètes. Gué n’a pas les moyens de faire cette politique, car la majeure partie des fonds destinés á l’agriculture sont gérés par l’étranger lui-même et par les ONG. Il est obligé de jouer constamment avec la nébuleuse image de « Partenariat » qui cache la toute puissance de la communauté internationale dans l’utilisation á sens unique de l’aide publique au développement. D’ailleurs la toute récente déclaration du président de la république á propos du gaspillage des fonds par les ONG en dit long. »m’pa bezwen konen so’w fe ak kob ou, banm travay selman »
Un des facteurs clé et le plus immédiat pour faire augmenter la production agricole dans le décor humanitaire est l’utilisation de semences améliorées. Mr Gué n’a pas de fonds pour acheter traditionnellement les semences .Les statistiques de décaissement du budget de la république au profit de cet intrant accusent des chiffres annuels de onze á dix huit millions de gourdes sous le ministère de Severin François, cinq fois ministre. Ce chiffre a été majoré sous Gué grâce á l’apport des fonds d’urgence 36 millions de dollars et aujourd’hui par l’apport des fonds du tremblement de terre. En dehors de ces disponibilités, le gros de l’argent des semences est géré par l’ONG OXFAM et par la FAO qui reçoit ses fonds de l’Union européenne.
Le ministre Gué qui pour la première fois reçoit une offre de 4 millions de dollars de semences de mais hybride ou deux cent millions de gourdes s’empresse de planifier l’utilisation de cette aide dans les régions irriguées du pays pour montrer l’augmentation concrète de la production agricole et pour continuer de mériter de la confiance de son chef. Les semences reçues de Monsanto sont elles des OGM ?Non dit Monsanto, se sont des semences hybrides conventionnelles .Non ,dit le MARNDR, ce sont des semences hybrides que le commerce et le MARNDR utilisent depuis longtemps dans l’agriculture haïtienne sans causer de dommages.
La stratégie du leader du MPP
Le leader du MPP n’est ni bouki ni malice.Il est un leader paysan qui est capable de mobiliser 10.000 paysans pour convaincre politiquement toute la fauve politique du pays qu’il est dans son bon droit. Il est une force politique et un transfuge de Lavalas du président Préval. Soutenu par les alter mondialistes et la presse en général en quête de nouvelles á sensation, il bâtit sa stratégie d’attaque du président Préval sur la présence dans le pays de mais OGM, préjudiciable á la production nationale et á la santé alimentaire de la population haïtienne . La stratégie a réussi. Il multiplie les interviews dans la presse, dépense follement des énergies pour maintenir la mobilisation paysanne sur un problème de semence OGM qui n’existerait pas d’après le chef de service national de semences , l’agronome Emmanuel Prophète. Le leader du MPP oublie que depuis longtemps nous consommons en Haïti l’huile de cuisine faite avec du soja OGM et que le mais moulu importé des USA et d’autres pays pour la nourriture provient de semences de mais OGM plantées á l’étranger .
Réflexions
On est en présence de trois stratèges qui manipulent la question semence á des fins inavouées pour le même et unique groupe dont tous ils prétendent défendre les intérêts.
Monsanto défend sa part de marché á venir dans le business des semences en Haïti. Pour Monsanto, s’il peut entrer sur le marché semencier haïtien avec des semences hybrides non discriminées par les planteurs pourquoi viendrait elle avec des semences OGM discriminées qui créeraient un climat d’instabilité préjudiciable au climat des affaires ?
Le ministre Gue lui-même qui défend sa propre survie politique a- t- il intérêt aussi á entrer dans le pays des semences OGM qui creuseraient son propre tombeau ?La réponse est non. De même il a intérêt á promouvoir effectivement la production agricole qui garantirait sa pérennité dans le pouvoir.
Le leader du MPP a choisi politiquement la bonne stratégie qui est la mobilisation du peuple, la presse locale et internationale sur un sujet mondialement brulant. Comme toute stratégie politique elle est payante á la seconde. Si le leader du MPP ajoutait á sa stratégie la mobilisation paysanne pour avoir accès au crédit qui permettrait á la paysannerie d’accéder aux technologies performantes , la stratégie serait plus payante et durable. Aussi longtemps que le leader du MPP réussit á acculer le MARNDR sur la position défensive li sera gagnant. Cependant le jour où le MARNDR sûr du monopole de son autorité de ses compétences et de ses connaissances sur les questions agricoles décide d’utiliser la télévision locale et les stations de radio pour faire la lumière sur la question semence et accompagner objectivement les planteurs de mais hybride de la république dans la production de ce céréale pendant toute la saison de plantation du mais, les informations techniques et économiques sur le mais circuleront á gogo dans tout l’arrière pays, le voile du mensonge tombera et c’est le pays qui en profitera. Mais comme en Haïti on a affaire á un état mythomane où les responsables ne se soucient ni si ce qu’ils disent ni sur ce qu’ils font est vrai ou faux il y a de fortes chances que les trois stratèges ignorent ces réflexions et continuent leur feuilleton á trois comme si rien n’était.

Ref Problématique de la production des semences en Haïti Haïti IMPACT Michel William
Projet Seeds MPP
Politique semencière MARNDR SNS
Unité de programmation MARNDR 2008-2009
Wilkypedia internet
Conférence de presse MARNDR
Politique agricole MARNDR Site web Ministère agriculture
Dossier OGM Haïti Le Matin Michel william

samedi 3 juillet 2010

Identité Numérique vérifiable?

Identité Numérique vérifiable?
Didier Franck Wache

Avons-nous une pièce d’identité? Un titre valable? Certifiable?
Pas vraiment n’est ce pas?

On fait comme on peut avec les moyens du bord. Nous avons eu aux cours des années une pièce d’identité émise par l’autorité fiscale revêtant plusieurs formats puis une carte d'électeur…

Souvent on s’aperçoit qu’un même individu possède plusieurs identités, plusieurs noms, est né à différents endroits et parfois il peut même être debout devant vous et vous présenter son acte de décès (il est même mort puis ressuscité!!!)

L’identité est une chose très importante que nous devons prendre avec beaucoup de sérieux parce qu’elle est la base de notre société. Elle permet par exemple :
. À un individu de se présenter et faire valoir ses droits
. À un service de santé de connaître et servir sa population
. À un service d’immigration local ou international de servir un citoyen
. À une école d’émettre un certificat valide
. Au ministère de l’éducation d’émettre des diplômes aux méritants
. Au Ministère de la Justice, de la Sureté nationale d’interpeller la bonne personne et d’exercer un certain contrôle.
. À des entreprises privées ou publiques de pouvoir identifier leurs employés et d'assumer les responsabilités qui en découlent.
. A des institutions financières de donner du crédit suivant les aptitudes du demandeur et non pas en fonction de la couleur de la peau, de qui tu connais, de qui est ton oncle ou ton endosseur…
. À des descendants de prouver, de justifier leurs droits ancestraux et par la même occasion de régler tous ces conflits inutiles…
. À des signataires d’accord (de contrat) l’obligation d’aller au bout ou d’assumer les conséquences de leurs actes.
. Au ministère des finances de réclamer la participation de chacun aux dépenses de la nation.

Pouvez-vous imaginer combien d’haïtiens voyagent sous des noms d’emprunt? Combien parmi nous qui ont reçu un refus pour une demande de visa dans une ambassade, détruisent leur passeport, se font un nouvel acte de naissance et recommencent le processus. (Faux et usage de faux, vous connaissez? N’est-ce pas la routine de tous les jours généralisées.)

Il faut qu’on arrête d’aller voir les juges de paix, l’officier de la DGI ou autre pour des documents en qui personne n’a confiance, mais faute de mieux on fait avec…

Nous sommes au 21ème siècle. L’aire de la communication où les outils technologiques abondent, permettent d’implanter de petits bureaux à travers le pays pour recevoir les doléances et servir.

Imaginez que vous soyez à Savane Zombie, à Fond des Blancs, à Fond des Nègres, à Verettes, à Plaisance, aux Côtes-de-Fer, à la Gonâve, à Thiotte, à Tiburon, à Saint-Louis, à Hinche, à Marchand Dessalines, Saint-Michel, à Fort Liberté, … Que vous n’avez pas votre carte d’identité ou que vous l’avez perdue et vous en avez besoin maintenant! Et bien oui, vous pourrez vous présenter à n’importe quel bureau de l’état civil le plus proche et un officier auquel vous donnerez votre numéro identité pourra après des vérifications mineures vous remettre une nouvelle carte immédiatement moyennant les frais d’impression.

Comme nous vivons dans le siècle de la « transparence » nous pourrons mettre à la disposition de tous les publics un site d’accès internet qui permettra à chacun de vérifier publiquement l’identité de celui qui se présente devant lui. C’est le mode le plus fiable, parce que même si vous faites des fraudes sur la carte, vous ne pouvez pas modifier le contenu d’un serveur sur le web.

Le nouveau système permettra d’enregistrer notre photo, les empreintes de nos doigts, nos noms et, qui sait un jour, nos codes génétiques.

Pour mettre un tel système en place, il faut des ordinateurs identiques à ceux que vous connaissez, que vous utilisez tous les jours, un lien Internet (Satellite, Microwave, Radio, Fibre optique, ou Câble), une imprimante à carte (avec des cartes vierges), un lecteur d’empreinte, et un logiciel de base de données qui fonctionne sur un serveur placé sur le net. Auquel vous ajoutez un logiciel Espion qui fonctionne un peu comme Google et qui ira chercher tout les doubles et les fraudeurs dans un temps record. (Eh Oui, Piyay la fini)

Il faut savoir que le jour que nous implanterons un tel système, vous conserverez votre identité déclarée jusqu’à la fin de votre vie physique ou de votre visite chez St-Pierre.

Lorsqu’on aura dévalisé votre maison, votre bureau, votre véhicule, les forces de l’ordre pourront plus facilement retrouver les auteurs à l’aide des empreintes.

Vous verrez aussi beaucoup de spécialistes du vol, de la tricherie, de la diffamation abusive, des Comberlands, se convertir à des trafics plus sereins parce qu’ils vont vite réaliser qu’une fois qu’ils sont fichés, enregistrés, ils deviennent des vivants morts.

Les entités apprendront à se partager les informations sur les « Mové Zafé », bref ceux qui détruisent notre société et votre avenir.

Voyez, ce sont des petites choses simples, implantées en moins de deux ans au niveau national et même international pour servir l’ensemble des haïtiens qui peuvent modifier le cours de votre vie, votre environnement immédiat et donner à ce pays l’image que vous désirez voir.

Didier Frank Wache
Dfwache (@) yahoo (.) ca
Identité numérique vérifiable

vendredi 2 juillet 2010

Aide et Sécurité alimentaire en Haïti : les défis de l’après le 12 janvier 2010.

Aide et Sécurité alimentaire en Haïti : les défis de l’après le 12 janvier 2010.

Haïti, Membre du Conseil d’Administration du Programme Alimentaire Mondial (PAM) fixe ses priorités.


En novembre dernier, avant même la catastrophe du 12 janvier 2010, le Gouvernement haïtien avait défini, de concert avec le Programme Alimentaire Mondial (PAM), un programme d’intervention pour l’amélioration de la sécurité alimentaire. A cette époque, le Gouvernement était fier d’expliquer la nette amélioration de la situation de la sécurité alimentaire obtenue dans le pays grâce aux efforts soutenus matérialisés à travers d’importants investissements dans le secteur agricole, après le passage dévastateur des quatre cyclones de l’année 2008.

Le 12 janvier 2010 a tout changé …

Comment se pose le problème de la sécurité alimentaire en Haïti ?
Les statistiques des dernières années montrent qu’en Haïti, l’offre alimentaire est d’une part constituée, par la production agricole nationale (42 à 45 %) et d’autre part d’importations commerciales (45 à 50%) et de l’aide alimentaire (6 à 7%). Au début des années 80, ces importations ne représentaient que 19% de l’offre alimentaire.


La majorité de la population fait face depuis longtemps à un grave problème d’insécurité alimentaire chronique. La phase critique a déjà été atteinte depuis plus d’une quinzaine d’années. Avant le tremblement de terre on notait déjà qu’un Haïtien sur deux vivait dans l’extrême pauvreté (avec moins de US$1.00 par jour) tandis que la moitié de la population n’avait pas accès à la ration alimentaire minimale établie par la FAO et 80% des ménages déclaraient ne pas satisfaire adéquatement leurs besoins alimentaires.

Comment a évolué la situation avec le séisme du 12 janvier 2010 ?
A la fin 2009, juste avant le séisme, des prévisions encourageantes permettaient d’espérer que l’offre alimentaire assurée par la production nationale allait prendre le dessus sur les importations et dépasser la barre des 50%, ce qui représenterait un bond hautement significatif. Ce progrès enregistré dans la production nationale jumelé aux interventions soutenues du PAM, avait contribué à l’amélioration globale de la situation de la sécurité alimentaire. Le nombre de personnes se trouvant en situation d’insécurité alimentaire avait chuté de 3 millions de personnes en avril 2008 à 1.9 millions en septembre 2009.

Le 12 janvier 2010, en 35 secondes tout a basculé. Les chiffres sont dramatiques :
- plus de 230 mille personnes ont perdu la vie, soit environ 10% de la population de la région métropolitaine de Port-au-Prince;
- Plus de 600 mille déplacés;
- 1.3 millions de sans abris;
- Plus de 2.5 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire

De plus, le tremblement de terre a provoqué :
- un accroissement soudain et très significatif du nombre de personnes par foyer en zone rurale ;
- un déficit de produits alimentaires de base en zone rurale;
- une hausse substantielle des prix des denrées alimentaires de base en zone rurale ;
- une certaine utilisation des stocks de semences pour la consommation humaine.

Quelle a été la réponse du Gouvernement ?

La population des zones dévastées vivait déjà dans des conditions très précaires. Avec un taux de chômage avoisinant les 70%, cette population assurait ses besoins au jour le jour à partir d’activités informelles. Brusquement elle s’est vue privée de tout revenu à cause de la paralysie de l’ensemble des activités. Grâce à la solidarité venant de toute part, d’importants transferts d’argent des familles haïtiennes vivant à l’étranger et des opérations de distribution massive de nourriture coordonnées par le Gouvernement, avec entre autres, la collaboration et l’appui efficace du PAM, la crise alimentaire majeure qui menaçait l’ensemble du pays a pu être évitée.

Haïti, qui est d’ailleurs membre du Conseil d’Administration du PAM, a exprimé sa reconnaissance envers toute la communauté internationale et spécialement envers les pays donateurs du PAM qui ont permis à cette Agence d’être le principal outil pour ces interventions.

La coordination des opérations d’aide humanitaire a demandé beaucoup d’efforts. Pendant plus de 12 semaines, chaque matin, à 7 heures, le Ministre de l’Intérieur, responsable de la protection civile tenait une réunion préparatoire avec l’ensemble des agences des Nations Unies et d’aide humanitaire. Également à 8 heures, une autre réunion présidée par le premier Ministre en personne réunissait ces mêmes agences, les responsables gouvernementaux et les chefs des Missions et des Ambassades accréditées en Haïti. A cela, on doit ajouter les réunions des clusters (groupe de travail) animées par les agences des Nations Unies et les commissions de coordination spéciales mises en place par le gouvernement pour l’énergie, la santé, les abris provisoires, et la distribution de l’eau et de la nourriture.

Ces quatre commissions ont été pour la plupart dirigées par des personnalités de la société civile haïtienne, mobilisant des dizaines de bénévoles. Un exemple éloquent est le leadership dans la distribution de l’eau qui a été assuré par une entité gouvernementale, la DINEPA, qui a su, de manière originale, mettre à contribution l’expertise d’agences comme l’UNICEF et la Croix Rouge aux côtés de celle d’ONG nationales et internationales et du secteur privé haïtien. En ce qui concerne la question de l’aide alimentaire, grâce à la coordination assurée par le gouvernement avec les divers intervenants regroupés au sein du cluster food et l’expertise du PAM, des opérations massives de distribution d’aliments ont été organisées tout en responsabilisant les collectivités territoriales, tant à la capitale que dans d’autres régions du pays où s’étaient réfugiés des centaines de milliers de déplacés.

Quelle sont les perspectives ?

Après avoir finalisé le PDNA, le Gouvernement a rapidement, élaboré le Plan d’Action pour le Relèvement et le Développement d’Haïti en concertation avec un ensemble d’acteurs nationaux et internationaux concernés. Dans le cadre de ce Plan, le Ministère de l’Agriculture a défini le Plan National d’Investissement Agricole, évalué à environ 800 millions de dollars sur 5 ans et le Plan National de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle. Ces deux plans s’insèrent dans une proposition de politique agricole bâtie selon une vision nationale d’une agriculture ayant les caractéristiques suivantes:

· moderne, fondée sur l’efficacité et l’efficience des exploitations familiales et la promotion des entreprises agricoles grâce à l’implication du secteur privé ;
· productive et compétitive sur le marché local et sur le marché international, permettant d’assurer la sécurité alimentaire de la population ;
· génératrice des revenus décents;
· respectueuse de l’environnement ;
· génératrice d’excédents pour le fonctionnement des entreprises agro-alimentaires


Concrètement, il s’agit de :

· Réaliser des investissements dans des infrastructures publiques (systèmes d’irrigation, routes agricoles, structures de stockage et de transformation…) ;

· Fournir les appuis destinés à augmenter la compétitivité des filières sélectionnées (vivres et tubercules, fruits, élevage, riz, etc.) et corriger les imperfections du marché, y compris des subventions (semences, engrais), tout en mettant en place des mécanismes de diminution progressive du niveau de ces subventions ;

· Réorganiser les services agricoles publics de base (crédit, sécurité foncière, formation, recherche…) ;



Les problèmes d’Haïti n’ont pas commencé le 12 janvier. Par contre, la catastrophe a mis en évidence une nouvelle fois nos problèmes de mal développement. Sans vouloir s’étendre sur les causes historiques de l’insécurité alimentaire, il ne faut jamais oublier le poids de la politique économique de ces 25 dernières années, qui a engendré l’exode rural et qui explique l’urbanisation anarchique de Port au Prince, ce qui a rendu cette ville si vulnérable.

Aujourd’hui, les propositions qui sont faites dans les Plans d’investissement agricole et de sécurité alimentaire tiennent compte des erreurs du passé. Il convient peut être de souligner que la reconstruction du pays ne se pose pas seulement en terme physique, car il s’agit aussi de reconstruire nos institutions, notre capital humain, notre système éducatif et les rapports sociaux.

Quelle sont les priorités immédiates ?

Dans ce contexte, en ce qui concerne la sécurité alimentaire, le Gouvernement insiste sur trois priorités :
1- Coordination des actions. En plus de coordonner les opérations des différentes institutions, il est impératif de poser la problématique de la coordination des ressources humaines. Après avoir évalué à plus de 80% le nombre de professionnels qui ont quitté le pays au cours des 30 dernières années, le renforcement des institutions publiques se voit aujourd’hui menacé en terme de disponibilité de ressources humaines par la prolifération d’ONG et d’institutions internationales sur le terrain, qui se livrent à une compétition sans merci pour le peu de ressources humaines qualifiées disponibles (environ 400 ONG interviennent actuellement en Haïti dans le domaine de l’agriculture).

2- Création d’emplois pour améliorer la sécurité alimentaire. Depuis plus de deux mois, le Gouvernement a réuni les principales agences ayant des ressources disponibles pour réaliser de grands chantiers « cash/food for work » et a défini avec ses partenaires des modalités pour une harmonisation de ce programme. L’objectif est d’obtenir un impact sur la production alimentaire, la diminution de la vulnérabilité des populations face aux désastres naturels, et/ou l’assainissement des zones dévastées. Aujourd’hui, ce programme se bute à certaines difficultés : au début du mois de juin 2010, sur 648 projets présentés par des groupes communautaires, des collectivités territoriales ou des ONG, 150 ont été étudiés et approuvés, mais seulement 15 ont pu réellement démarrer. A ce compte, le Gouvernement doit obtenir de ses partenaires non seulement une augmentation des ressources disponibles pour ce programme, qui est un des outils les plus efficaces pour à la fois améliorer la sécurité alimentaire et engager des actions structurantes, mais aussi la mise en place de mécanismes pour alléger les procédures de mise en œuvre.

3- Achats locaux et cantines scolaires. Rappelons-nous que plus de 60% de la population d’Haïti vit dans les zones rurales et 50% de la population active œuvre dans l’agriculture. Aujourd’hui ce nombre a probablement augmenté avec le déplacement des populations des zones sinistrées vers les zones rurales. Encore une fois, le Gouvernement a la ferme volonté d’utiliser les mécanismes d’achats de produits agricoles locaux pour les opérations d’aide alimentaire dans le but de protéger et renforcer la production nationale, et aider la grande majorité de la population à sortir graduellement du cercle infernal de la dépendance alimentaire tout en continuant à soutenir ceux qui sont les plus vulnérables (enfants, femmes enceintes et allaitantes, porteurs du VIH-SIDA) à l`insécurité alimentaire.

En ce sens, le programme des cantines scolaires, qui touche actuellement un million d’enfants (dont 300 mille avec les fonds du trésor public) constitue une des façons efficaces de toucher un des plus grands groupes vulnérables de la population. L’objectif à moyen terme est d’atteindre 2.2 million d’enfants (à un coût optimum de 40 gourdes/jour/enfants). La CNSA (Coordination Nationale de Sécurité Alimentaire) a calculé que la production nationale agricole pourrait en 2010 assurer 60% des besoins des programmes d’aide alimentaire. En utilisant des denrées provenant de la production nationale pour nourrir les enfants, on réalise non seulement un investissement dans la jeunesse mais aussi on permet à leurs parents d’avoir accès à des revenus supplémentaires.

Cette stratégie s’inscrit dans le cadre du Plan National d’Investissement Agricole et du Plan National de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle qui visent à promouvoir une agriculture et une pêche productives, diversifiées et respectueuses de l’environnement et assurer la disponibilité de produits alimentaires de qualité sur une base constante afin d’arriver à satisfaire 80% des besoins de la population haïtienne d’ici l’horizon 2025.

Références :

www.agriculture.gouv.ht - Site Web du Ministère de l’Agriculture des Ressources Naturelles et du Développement Rural (MARNDR),

www.cnsahaiti.org - Site Web de la Coordination Nationale de Sécurité Alimentaire

www.refondation.ht – Site web de la Plateforme pour la Refondation d’Haïti du Gouvernement de la République d’Haïti.

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