dimanche 29 août 2010

Entre Jacques Edouard Alexis et Jude Célestin Que choisir ?

Entre Jacques Edouard Alexis et Jude Célestin Que choisir ?
William Michel
29 Aout 2010

Wyclef , le candidat trouble fête évincé de la course á la présidence et l’opposition politique traditionnelle absente du processus ne signifient pas pour autant la fin de la politique ni pour le peuple ni pour le pouvoir. Aussi longtemps qu’il existera même un lambeau de nation á organiser , une masse á faire croire en son salut et des intérêts économiques á sauvegarder, la politique gardera ses droits et des leaders émergeront pour prétendre á leur gestion. La politique as usual continue. Jacques Edouard Alexis et Jude Célestin seront les deux candidats qui bénéficieront de la confiance de la communauté internationale et de la fraction infirme de la population qui ira voter ce 28 novembre. D’aucuns poseront la question á savoir est-que au niveau des spéculations le premier tour est déjà joué qui mettrait face á face au deuxième tour Alexis et Célestin ?

La réponse á cette très pertinente question ne se fait pas attendre. Tant mieux pour les incrédules , pardon pour les intelligents comme Baker, Manigat ou même Céant qui á la faveur de quelques promesses mirobolantes auraient lâché l’ombre pour la proie en donnant un peu de crédibilité au processus. Les autres membres de la grande famille INITE s’abstiendront de toute participation réelle aux élections pour ne pas émietter l’électorat déjà faible et réduire les chances de leurs deux favoris. Ailleurs l’administration prévale a donné déjà la preuve de son expérience qu’elle ne perd jamais sur le terrain électoral, même si ces élections entachées de fraudes massives ont eu des résultats discutables.. Aujourd’hui la situation est nettement différente. Si hier il y avait des fraudes massives dans le processus électoral, aujourd’hui c’est la raison d’état qui le caractérise. Les lisières sont franchies dès le départ. La communauté internationale par l’entremise des Nations Unies et de l’OEA parle d’une voix unitaire très claire et a choisi le camp de la continuité. Du coté du CEP, le choix des candidats aura été fait á l’encontre de la loi électorale et de la constitution . Ce choix démontre que le CEP est un organisme d’état qui entend faire des élections une question d’état obéissant á une raison d’état.

La raison d’état est qu’avec la CIRH qui charrie tous les espoirs d’investissements pour les cinq ans á venir et qui a á son actif l’autorité des Nations Unies appuyée par la force militaire de la MINUSTHA pour imposer toutes les formes de gestion au pays , la communauté internationale entend préserver l’ordre établi .Elle a besoin d’un apparatchik taillé sur mesure . L’équipe de L’INITE et d’Alexis se présente comme la seule qui soit capable de lui offrir cette opportunité. Il se trouve qu’en face de cette communauté internationale qui approuve toute la politique du président Préval il n’y a aucune force politique intérieure capable de mettre en danger son plan et de contrarier le processus électoral. La communauté internationale se sent á l’aise pour manœuvrer et n’a aucun intérêt á faire un jeu politique dubitatif qui viendrait saper les bases sures de sa gouvernance du moins pour les cinq années á venir. Il en sera ainsi jusqu'à ce que l’opposition politique comprenne que pour remplacer l’équipe de Préval et avoir la bénédiction de l’internationale elle doit faire front uni , ne pas se présenter en équipes dispersées et ne pas intégrer aucun gouvernement pluriel.

Sur la base de ce calcul deux candidats seraient aptes á garantir les intérêts de la communauté internationale , ceux de l’équipe au pouvoir et ceux de la bourgeoisie haïtienne. Ces candidats doivent sortir des rangs de la même famille qui connait déjà les vices et les risques du métier. Il s’agirait des candidats Alexis et Célestin qui ont en commun la même base électoraliste de terrain pour les départager. La bataille entre ces deux candidats pour la conquête de la fraction de l’électorat qui ira voter s’annonce âpre et rude. Jacques Edouard Alexis ne fera pas de cadeau á Jude Célestin pendant que le sénateur Lambert et son collègue du nord mèneront la vie dure á JEA. Ce sera une élection « Fê koupe Fê « sans pitié entre deux ténors prévaliens avec des alliances très stratégiques
Cette base électoraliste serait formée des alliés du bloc CPP, des maires , des casecs ,des délégués , des vices délègues , des ministres de l’Intérieur, de la Justice ,de l’Agriculture et de l’organisation interne du CEP ayant tissé des relations privilégiées avec ces deux candidats .Cette base décidera indépendamment de la volonté de Mr Préval qui des deux candidats sera élu á la magistrature suprême du pays le 28 novembre 2010. Sur l’aile gauche de Jacques Edouard Alexis il faut compter avec l’alliance éventuelle des blocs régionaux formés de ses anciens ennemis de l’OPL, de l’AA, du PONT ,de la fusion qui ne pouvant pas empêcher les élections iraient gonfler le camp d’ Alexis.

Pour que rien n’échappe au contrôle de l’un ou l’autre de ces deux candidats il faut que l’internationale et le pouvoir s’arrangent que le pourcentage des votants á ces élections ne dépassent les 15 á 20% de la population en âge de voter . Ce qui laisse prévoir que même avec un coup d’état á l’intérieur du coup d’état électoral, le choix restera entre Alexis et Célestin.

Et si Wyclef cherchait plus de célébrité pour faire plus d’argent !

Et si Wyclef cherchait plus de célébrité pour faire plus d’argent !
William Michel
28 AOUT 2010

Chrysostome Harahagazwe dans un article posté le 18 janvier 2010 et intitulé « DRAME HAITIEN : LES LEÇONS BURUNDAISES !!! » écrit ceci sur Haïti « La médiocrité du leadership et l’oppression de la population par la classe dirigeante, conduisent inexorablement à la misère, aux guerres, à la destruction de l’environnement et partant aux catastrophes » Par catastrophe ici il faut s’entendre des cyclones des tempêtes des tremblements de terre de la vulnérabilité de la population et de l‘arrivée au pouvoir de leaders qui ont ruiné le pays. Par analogie au cas Wyclef, il faudrait y voir la course à la présidence par un monsieur qui n’en aurait pas l’étoffe. Pour étayer sa thèse il évoque l’évolution en sens inverse des deux frères siamois de l’ile ,celle de la république dominicaine avec des leaders éclairés visionnaires et une élite consciente de ses responsabilités historiques ,celle de la république d’Haïti avec des leaders rétrogrades obscurantistes sans vision du futur et une élite égoïste soucieuse seulement de sa réussite individuelle . Le journaliste burundais analysant respectivement l’évolution historique négative du Burundi après 50 ans et celle pire d’Haïti après deux cents ans d’indépendance met en garde celle la, pour éviter l’ « Haitisation » du Burundi et recommande que les dirigeants burundais s’inspirent des exemples du Rwanda et de la république dominicaine menés par des leaders éclairés s’entourant d’une élite plutôt saine pour éviter que le Burundi qui marche déjà sur les traces d’Haïti ne s’enfoncent d’avantage dans la médiocratie.. La lecture de cet article me fait revenir sur le phénomène Wyclef

Le cas Wyclef
Wyclef a tout l’air d’un idiot intelligent avec deux grands I qui cherche à manipuler l’opinion internationale pour devenir plus riche. Il est guidé dans sa stratégie par l’expérience des Fugee récupéré par l’establishment américain qui a fait de lui un grand star en l’exposant aux plus grandes chaines mondiales de la presse parlée et qui lui ont permis de faire ses premiers millions en vendant des millions de CD et de DVD .

Un deuxième événement, le séisme du 12 janvier, lui a offert une deuxième opportunité de s’exposer á ces grand medias internationaux en prenant fait et cause pour les morts et les rescapés. Il en a profité pour collecter 16 millions de dollars au nom des rescapés du désastre haïtien si l’on devait se fier aux données circulant sur l’internet.

Ayant pris gout à l’argent facile aux dépens des mass media, il aurait déduit que s’il continue bien de gérer ceux-ci comme il l’a très bien fait jusqu'à présent, le renforcement de son exposition aux grandes chaines mondiales de télévision peut lui ouvrir une fenêtre permanente sur le monde de la richesse. C’est ainsi qu’il aurait monté de toute pièce une comédie de candidat á la présidence .Il aurait conçu une stratégie qui embarque la grande majorité des jeunes et des chômeurs ,qui le propulse á l’avant scène de la politique haïtienne et qui le met à nouveau sous les rampes de la grande presse internationale. De sa déclaration de candidature á la présidence de la république d’Haïti sur CNN á date, Mr Wyclef n’a cessé de multiplier les interviews et est présent chaque jour sur toutes les antennes des télévisions et journaux du monde. Son nom est sur toutes les lèvres. Il est en train d’utiliser sa déclaration de candidature a la présidence de la république d’Haïti a des fins insoupçonnées des autres. Déjà il vient d’annoncer qu’il retourne à la musique en mettant sur le you tube sa toute dernière chanson « prizon kou KEP la » et spontanément il décide de faire appel au verdict du CEP.

Sa déclaration de candidat á la présidence s’apparente á la stratégie d’un enfant du ghetto new Yorkais type « JPP jan’l pase’l pase » qui croit qu’ à la faveur d’une promotion sociale tombée du ciel il peut se permettre toutes les libertés jusqu'à jouer au prestige de l’institution de la présidence pour augmenter son fond de commerce basé sur ses talents artistiques incontestés. Cette stratégie aurait failli bien tourner à son avantage politique au niveau de la jeunesse misérable haïtienne qui éprise d’admiration pour le chanteur et en quête d’un génie messianique pour la sauver l’aurait plébiscité comme président de la république. Cette stratégie empreinte de langage totalitaire lui aurait gagné d’autres sympathies qui, ne pouvant pas défaire le président Préval dans aucune élection contrôlée , auront misé sur la popularité du star pour contraindre le CEP à respecter le verdict des urnes et á ne pas dire comme Joseph Staline : ce qui compte ce ne sont pas ceux qui votent mais ceux qui comptent les votes »( internet haitian politics).

Cette plaisanterie pleine de bon sens du point de vue des affaires et chargée d’impondérabilité d’un point de vue politique a pris de vitesse toute la classe politique haïtienne qui, paniquée, a fomenté une sortie de scène qui a l’air d’un vrai complot politique. De fait Wyclef a été écarté de la course á la présidence mais il a réussi son premier coup . En plus d’être connu comme un grand artiste il a manœuvré pour devenir le centre d’intérêt permanent des grandes chaine de television du monde qui conditionneront la sortie de son prochain album ..

Tout compte fait , ramené au niveau d’Haïti, Wyclef a tout l’air d’un Bernard Madoff dans la gestion économique de ses entreprises de musique. Il aurait décidé de berner politiquement tout le monde en utilisant les grands moyens pour arriver á ses fins. Madoff a joué toute la classe politique américaine et la finance internationale pour mener une vie de faux prince , Wyclef a choisi de jouer la politique et les grands media internationaux pour rester sous les feux de l’actualité ,devenir plus célèbre et gagner plus d’argent .Wyclef serait un idiot intelligent borné et non un idiot sot. La presse télévisée et la musique qui sont ses meilleurs atouts peuvent aussi le ruiner s’il devra payer un jour pour la publicité qui lui est aujourd’hui gratuite. Pwason renmen dlo, se dlo kap touye’l. Wyclef c’est Tyson, c’est Ogé Simpson d’un autre genre. Ferait il un bon président s’il était encore dans la course ? Malgré toutes ces analyses j’ai l’intime conviction qu’il serait différent des autres.

mardi 24 août 2010

Wyclef á la fois un aventurier une révélation et une déception

Wyclef á la fois un aventurier une révélation et une déception
William Michel
24 aout 2010

Wyclef est un aventurier capable de toutes les imprévisions en politique, une révélation de la diaspora politique et une déception pour la masse des jeunes haïtiens . C’est ce qui ressort de sa rencontre avec le président de la république á l’issue de laquelle son exclusion potentielle du processus n’a pas fini de soulever des interrogations. Les suspicions fusent en tout sens et vont de la fausseté á la traitrise en passant par la soif de l’argent á tout prix. Certains se réjouissent déjà du machiavélisme du président Préval qui élégamment a su trouver le moyen le plus odieux pour empêcher qu’un aventurier politique remplace un débonnaire á la présidence d’Haïti.

Wyclef serait un faux pour lui-même et un faux pour la classe politique haïtienne parce qu'en posant sa candidature , il ne croyait pas en lui-même, il n’avait rien d’un homme politique et il n'avait aucun projet de société pour Haïti. Sinon, comment expliquer qu'un candidat ayant toute cette popularité potentielle immédiatement après avoir rencontré le président de la république seulement deux jours avant la proclamation de la liste des présidentiables ait pu accepter avec autant de facilité et de sourire son éviction de la course á la présidence ? Comment comprendre á la sortie de la réunion sa demande aux partisans chauffés á blanc de rester calme sous le fallacieux prétexte qu’il n’est connu encore de personne les candidats qui seront agréés ou exclus.

Au demeurant si Mr Wyclef n’a rien laissé filtré de la rencontre, il y a au moins deux signes qui laissent croire qu’un deal a été trouvé entre Wyclef et le président. Le tout premier signe est l’intime poignée de main qui révèle le sceau d’un deal gagnant -gagnant pour les deux hommes suivi du comportement silencieux et serein du millionnaire qui contraste avec la réaction froide mais instantanée de l’homme politique qui crierait au scandale et qui demanderait á ses partisans de gagner les rues pour donner une fin de non recevoir á cette exclusion de dernière heure. Le second signe patent est lorsque l’agence Reuter de la bouche de son correspondant que tout le monde dit depuis longtemps proche du président a vendu la mèche en déclarant que de source proche d’un conseiller électoral, il a appris que Wyclef était déjà exclus du processus ? Pourquoi le correspondant de Reuter et pas un autre journaliste ? Pourquoi la primeur de la nouvelle á ce correspondant de Reuter qui dit ( nan Ranmase) qu’il est un fanatique de Wyclef ? Tout porte á croire que le jeu était déjà connu au moins de ces trois.

Ailleurs la candidature de Wyclef pourrait bien avoir été un canular ou un deal conçu simplement pour dynamiser le processus électoral boudé par l’opposition .Cette thèse ne serait pas loin de celle qui voudrait que la présence de nombreux candidats du palais national dans cette course soit des figurines prêtes á déclarer éventuellement forfait les jours á venir tout en se préparant á renforcer la candidature de Jude Célestin de l’INITE. Ces différentes spéculations conduisent la classe politique á croire que Wyclef n’a pas l’étoffe d’un homme politique et confirment la préoccupation qu’il pourrait devenir l’aventurier le plus dangereux qui émergerait sur la scène politique après Aristide . Fort de de cela , un vaste complot serait ourdi pour faire comprendre á ce Monsieur qu’il ne serait pas l’homme du moment et qu’en n’acceptant pas le rejet de sa candidature , il s’exposerait indubitablement á des dérapages.

Wyclef est la révélation de la diaspora politique. Profitons de cette occasion pour faire le distinguo entre la diaspora haïtienne classique faite de rudes travailleurs pourvoyeuse d’argent á la population haïtienne et la diaspora politique , appendice de la clase politique haïtienne á l’étranger qui vit en parasite sur la diaspora classique( Sansarik) et qui a fait du mal á l’administration publique haïtienne dans tous les postes occupés á date. Par révélation il faudrait entendre que Wyclef en tant que réussite de la diaspora politique a une phobie bleue de l'argent pendant qu'il aime l'argent au point de jouer même son va tout pour l'avoir. Parallèlement Wyclef a appris aux dépens de l’establishment américain et de la diaspora lavalassienne que la meilleure façon de faire de l'argent rapide est d'entrer en politique. Certes il a fait un peu d'argent dans le HIP POP, mais il a gardé l'expérience et l'amertume d'un monsieur qui a travaillé dur dans les premiers jours á Brooklyn pour faire ses premiers dollars . N'eut été l'apport de la politique américaine pour promouvoir son style de rappeur bon enfant utilisé pour contrecarrer la montée du rap violent noir américain peut être que Wyclef n’aurait pas connu cette ascension fulgurante dans le monde des arts? En bénéficiant du support financier et politique de l’establishment américain, notre candidat aurait pris gout á l’argent facile .Il devient un amoureux de l’argent et est prêt á tout pour faire de l’argent. Sa candidature á la présidence d’Haïti pourrait avoir été motivée par l’ambition de l’argent d’autant plus qu’on parle de lui comme un mauvais gestionnaire qui aurait fait baisser le profit des entreprises possédées tant en Haïti qu’aux Etats-Unis. Sa soif de l’argent pourrait avoir inspiré au stratège Préval l’idée d’une rencontre pour fui faire une offre substantielle en échange d’un retrait de sa candidature sous la forme voilée d’un carnet du CEP. Dans ce sens, Wyclef ne serait pas différent de la majorité des déçus de la diaspora politique qui croient que la meilleure façon de faire de l’argent facile est de s’imbriquer dans la politique haïtienne ou d’occuper un poste qui faciliterait le drainage des deniers publics. En effet depuis la quarante cinquième législature qui comptaient 17 sénateurs étrangers jusqu'à l’administration publique infestée d’étrangers musiciens, de chauffeurs de taxi,de racketters et brasseurs dans les gouvernements d’Aristide et de Préval, la diaspora a donnée la preuve par mille qu’en Haïti elle a perdu sa vision et qu’elle n’aspire qu’ á faire de l’argent facile en intégrant contre la constitution les institutions de l’Etat ( loterie nationale, les ministères , le parlement, la Primature, ) pour disparaitre aussitôt que leur job aura pris fin. Simeus a été jusqu'à corrompre la cour de cassation. A force d’intégrer les institutions haïtiennes au mépris de la loi et de la constitution , la diaspora politique facilitée dans son œuvre d’Harpagon par le régime lavalaso-prévalien vient de donner le ton á la politique du CEP qui croit cette fois qu’on n’a pas besoin d’amender la constitution pour faire les choses autrement. Il suffit qu’il ait l’accord tacite du président de la république protégé par la MINUSTHA pour mener le processus électoral á sa façon sans se soucier des pénalités de la justice. L’acceptation par le CEP des candidatures sans leur certificat de décharge et l’acceptation par Mr Wyclef du rejet de sa candidature pour violation de la notion de résidence sans protestation aucune, montre que l’on vit dans un pays sans repère et que le pire est toujours possible avec une diaspora politique aveugle, ambitieuse et incapable de se structurer pour offrir une alternative valable á Haïti. La diaspora doit commencer á établir son parti politique en Haïti pour commencer á faire l’éducation politique de la paysannerie d’où elle recrutera ses candidats au Casec, á la mairie, aux législatives et aux présidentielles parmi les jeunes qui attendent beaucoup d’elle.La diaspora n’a pas pu exploiter son envoi de deux milliards de dollars l’an et a joue le jeu politique traditionnel d’attendre les élections pour émerger. Malgré le savoir et sa force économique proverbiale la diaspora n’a pas eu d’alternative basée sur l’économie, le savoir et la démocratie.. Mr Wyclef de la diaspora, aurait il vendu sa potentialité de devenir président de la république d’Haïti pour un plat de lentille ? Sinon, quel serait le prix payé á Mr Wyclef pour accepter une défaite politique irréversible ?
.
Mr Wyclef est aussi une déception pour les jeunes d’Haïti proches de 53% de la population totale.

Le rap en tant que musique d’expression du refoulement de la jeunesse et d’espoir qu’un jour Dieu pourrait lui donner une chance á la vie décente de la minorité , a fait de Wyclef un modèle de réussite. Le rap a connu un élan extraordinaire en Haïti. Il a été amplifié par des groupes locaux tant commerciaux que religieux. Le rap est sur toutes les lèvres de la jeunesse haïtienne. Wyclef parle le langage de la jeunesse délaissée d’Haïti. Il s’habille comme elle. Il chante les misères de cette jeunesse. Bref la jeunesse haïtienne s’identifie á lui. La candidature de Wyclef est venue redonner á la jeunesse l’espoir que les mouvements politiques Lavalas et LESPWA ont contribué á détruire après l’avoir éveillé. Il est devenu le nouveau sauveur de la jeunesse et de la paysannerie haïtienne. Ce n’est pas sans raison que aussitôt la nouvelle de sa candidature á la présidence d’Haïti annoncée elle a été répandue comme une trainée de poudre dans tout le pays. On parle tout de suite du phénomène Wyclef.. D’aucun commençait á comparer la candidature de Wyclef á celle d’Aristide de 1990. La dimension médiatique que le candidat s’apprêtait á donner á sa campagne en avait fait le reste. Wyclef était président avant les élections.

C’est dans ce contexte de fièvre électorale et de candidature populairement acceptée que la rumeur de son éviction du processus commençait á circuler dans tous les coins du pays. On percevait déjà l’odeur d’une colère sismique qui envenimait l’atmosphère. On projetait déjà les impacts négatifs qu’aurait une telle bombe á retardement. Et puis vint la nouvelle de la rencontre avec le président de la république qui comme une baguette magique a changé du tout au tout. Notre Wyclef étranger au cirque d’animaux politiques feint d’ignorer le rejet de sa candidature , accuse cette rumeur de nouvelle non fondée. Comme pour refroidir l’ardeur de cette jeunesse prête á tout , l’icône et idole de la jeunesse haïtienne offre une poignée de main rassurante avec le président de la république et demande á ses partisans de garder leur calme , pour ne pas céder aux « Zen ». « Comme en Haïti « La fimen pa konn soti san dife » la nouvelle effectivement tomba fort tard dans la nuit du 20 Aout 2010. Notre Wyclef a reçu son carnet, il est ajourné pour les prochaines présidentielles de 2016. Il est calme et satisfait. Aucune réaction de la jeunesse ne s’en est suivie. La jeunesse a encaissé le coup et a classé Wyclef dans la même veine des politiciens haïtiens. Toute la classe politique traditionnelle d’Haïti a poussé un ouf de soulagement et a gagné la première manche. Une nouvelle fois la jeunesse a été déçue. L'histoire retiendra que Wyclef vient de perdre la chance de devenir président et qu' á partir d'aujourd'hui sa cote de popularité entame une chute verticale qu’il lui sera difficile d’arrêter

mercredi 18 août 2010

CIRH : des millions et des projets

CIRH : des millions et des projets

Roberson Alphonse
Louis Gary Cyprien
17 aout 2010
Le Nouvelliste

Personne ne peut prétexter l'absence de projets pour ne pas décaisser les fonds promis pour la reconstruction d'Haïti, a fait remarquer Bill Clinton, co-président de la CIRH. La commission a approuvé 29 projets d'un montant de 1 milliard 600 millions de dollars dont 905 millions sont déjà disponibles.


Haïti: 29 projets d'un montant de 1 milliard 600 millions de dollars ont été approuvés à la deuxième réunion de la CIRH. De ce montant, 905 millions sont disponibles, a annoncé le Premier ministre Jean-Max Bellerive, coprésident de cette commission le 17 août 2010 à l'hôtel Karibe Convention Center. « Nous avons des discussions afin de trouver l'intégralité de ce montant », a expliqué M. Bellerive, confiant, qui a, sur un ton décontracté, salué l'effort de l'ex-président Bill Clinton ayant multiplié voyages, rencontres avec les bailleurs et autres institutions dont le géant de l'aéronautique Boeing en passe de financer à hauteur de 2.2 millions dollars un projet dans le domaine de l'éducation.

« Nous avons résolu le problème. Personne ne peut prétexter l'absence de projets spécifiques maintenant, a fait remarquer Clinton. A chaque rencontre, a-t-il ajouté, la CIRH approuvera de nouveaux projets. » Insistant sur la philosophie de la Commission consistant à approuver un maximum de projets avec le support du gouvernement et d'autres partenaires, Clinton a par ailleurs estimé qu'il ne faut pas s'arrêter en chemin. Malgré les élections. « Tout le monde a un intérêt dans le relèvement du pays. Quel que soit l'élu des prochaines compétitions électorales », a-t-il indiqué.

Quelques projets

Les projets votés par le CIRH couvrent des domaines aussi variés que l'agriculture, l'eau et l'assainissement, l'éducation, le ramassage des débris, la santé, le logement, les infrastructures, la création d'emplois, l'énergie, l'institutionnel. Selon un communiqué publié par la Commission, le gouvernement a fixé des objectifs spécifiques à atteindre dans quatre domaines prioritaires, à savoir l'éducation, le logement, le ramassage des débris et la prévention des désastres.

Parmi les projets prioritaires de la CIRH énumérés ce mardi par le directeur exécutif de ladite institution, l'économiste Gabriel Verret, le ramassage des débris qui jonchent en grande partie les rues de Port-au-Prince y figure également. Un cachet de 17 millions de dollars est alloué à ce projet qui s'étend sur 12 mois. La prévention des désastres compte également parmi les priorités de l'équipe de Clinton et de Bellerive. L'importance de ce volet est telle que la CIRH promet de s'y mettre d'ici le prochain trimestre. Dans le cadre de ce volet, la CIRH envisage de faire évacuer environ 500 000 personnes vivant dans des zones dites à risques par rapport aux catastrophes naturelles.

La subvention de la rentrée scolaire pour 325 000 enfants est une autre priorité que se fixent les dirigeants de la CIRH qui nourrissent l'espoir de scolariser 300 000 enfants qui n'ont pas les moyens d'aller à l'école. La Commission envisage aussi d'accorder une subvention à 750 000 étudiants. 120 000 abris transitionnels doivent être construits dans les 18 prochains moins selon les prévisions de la CIRH qui envisage dans le même temps de réparer 80 % des maisons endommagées par le séisme du 12 janvier. En ce qui a trait aux infrastructures routières, la CIRH annonce la réhabilitation de 210 km de routes, principalement des routes nationales 2, 3 et 4. Dans un autre registre, elle se donne comme objectif de réhabiliter et de réparer un total de dix ports à travers le pays.

La CIRH projette, par ailleurs, dans un délai de 5 ans, de faire du port des Cayes un port régional et d'en construire 8 nouveaux. De même, elle a l'intention de poursuivre les travaux de construction de l'aéroport du Cap-Haïtien et de construire 5 aéroports supplémentaires.

La CIRH aura deux autres réunions avant la tenue des élections du 28 novembre 2010.

Roberson Alphonse

Louis Gary Cyprien

mardi 17 août 2010

Le deal électoral plausible du 28 novembre 2010

Le deal électoral plausible du 28 novembre 2010
William Michel
16 aout 2010

On dit quelquefois que la politique a sa logique que la logique ne connaît pas .On dit aussi que cette logique n’est assimilée au niveau des initiés que dans le souci majeur de protéger les intérêts économiques vitaux acquis dans l’exercice du pouvoir. .Existerait il une logique dans la décision respective de Mr Baker et de Mme Manigat d’intégrer le processus électoral boudé par la majorité des partis politiques majeurs et de crédibiliser une opération qui n’aurait de crédit qu’aux yeux du palais national et de l’international qui gèrent le politique haïtien ?Est-ce que tous les candidats de l’INITE potentiels victimes aujourd’hui du droit de décharge , faisant partie du cabinet privé des conseillers immédiats du Président Préval n’ont pas été á l’origine du dysfonctionnement institutionnel du pays qui nous vaut cet imbroglio électoral ? Au nom de quelle théorie du droit politique pourraient ils profiter de leurs propres erreurs qui seraient plutôt des idées préméditées ou de mauvais calculs.

L’analyse du comportement des acteurs politiques porterait á croire que par delà les alliances et les mésalliances de la classe politique, par delà les discours de l’international et des différents candidats voulant renouveler le personnel de la classe dirigeante du pays il existerait, ou une entente qui donnerait le 28 novembre 2010 un parlement majoritaire aux hommes actuels du palais national et l’apparence de l’exercice du pouvoir á mme Manigat ou á mr Baker, ou un consensus que les élections n’auront pas lieu á la date prévue. .Si cette analyse est acceptable , ce serait le nouveau séisme que le stratège René Préval aurait provoqué en drillant profondément le terroir politique haïtien. Où se cacherait la vérité sous les décombres impénétrables du séisme politique conçu par le président René Préval et par ses proches du palais national .

Tout d’abord analysons les décisions irrévocables respectives de mr Baker et de mme Mirlande Manigat de participer coute que coute au processus électorale qui laisse la population indifférente á moins de l’apparition d’un candidat Messie qui viendrait rallumer la flamme électoraliste. A date, le candidat Wiclef Jean ferait les frais de ce Messie jusqu'à la proclamation par le CEP des noms des candidats ayant surmonté les épreuves de candidature présidentielle.

Le coup de Baker s’expliquerait par la garantie donnée par l’internationale qu’après les élections le business se fera as usual et que les bénéficiaires seront les ténors de la sous-traitance et des compagnies étrangères de construction dans des joint venture avec les petites compagnies d’Haïti. Une telle décision rallierait l’ancien fameux groupe des 184, le groupe dit de Bourdon, les tous récents millionnaires du pouvoir Lavalsso Preval des vingt dernières années. Elle plairait aussi á la communauté internationale qui attendrait de mr Baker une politique de centre droit proche de l’extrême droite chilienne ou colombienne des temps passés. Mr Baker n’aurait aucune préoccupation pour accepter ce deal qui consacrerait la continuité du statuquo avec un simulacre de renouvellement des dirigeants du pouvoir exécutif qui entérinerait la formation d’un cabinet Sud Dartiguenave entièrement gagnée á la cause de la présence des Clinton, des Paul Farmer , Des Nations Unies ,de l’OEA, du CARICOM et des ténors de l’INITE dans la continuité du pouvoir.

Le coup de Mme Manigat serait du très pur Lesly Manigat qui dans sa hantise permanente de percée Louverturienne chercherait dans cette entente controversée la reconquête du pouvoir exécutif á travers les traditionnelles manœuvres politiques dont l’ancien leader du RDNP est capable quitte á concevoir des acrobaties politiques plus périlleuses pour rétablir l’équilibre du pouvoir exécutif. En plus de la présidence, il serait promis á mme Mirlande quelques élus á la chambre législative.

Si cette analyse des décisions respectives de Mr Baker et de Mme Manjgat de rallier les processus électoral ne ferait pas la quasi unanimité aux yeux d’autres politologues haïtiens non intéressés aux retombées de leurs commentaires , comment expliquer au niveau du palais national ce pléthore de candidats Pro-Préval ou lavalasso prévalien qui viennent numériser le nombre des candidats aspirant au fauteuil présidentiel et du meme coup se diminuer chacun les chances de réaliser un bon score au niveau de la proportion des votants prête á dédouaner la politique du président Préval ? Certains seraient venus pour combler le vide causé par l’absence des grands ténors de l’opposition Haïtienne dans le processus électoral et donner plus d’apparence légale aux élections programmées .D’autres se seraient faits inscrire pour pouvoir jouer la partition assignée á savoir le droit á la contestation légale de leurs propres compagnons de combat étant donné que tous ces derniers constitutionnellement parlant tombent sous les fameux articles qui prescrivent obligatoirement le certificat de décharge de la chambre bicamérale qui n’existe pas, ou la démission un an á l’avance de leur poste de ministre avant toute déclaration de candidature présidentielle. Serait-ce enfin pour compliquer la situation du CEP qui devant la complexité du processus mal ficelé aurait mijoté la possibilité de renvoyer les élections sine die ?

Tous les candidats lavalaso-prevaliens , á l’exception peut être du « rigide » Jacques Edouard Alexis , qui bien imbu des embuches que lui tendent des principaux rivaux pour la chaise présidentielle aurait ficelé au CENAREF un plan B alternatif au cas où l’INITE ne le choisirait pas comme candidat officiel du pouvoir, tous ont retenu une leçon apprise des joutes électorales de 2006. Ils ont appris que la démultiplication des candidats dans le parti pour donner plus de visibilité internationale au processus électoral ne fait que réduire la chance du parti INITE qui verrait chacun de ses poulains après avoir franchi le cap d’acceptation de candidature réaliser que des scores de 0, ½, 1 , 2 a 3 pour cent de la population en âge de voter .Tous ces prétendus concurrents du palais national auraient fait cette analyse et en toute connaissance de cause ils auraient décidé de présenter leur candidature pour les présidentielles du 28 novembre pour créer des diversions et faciliter le deal de Baker qui aurait en présence d’autres difficultés la préséance sur celui de Mirlande Manigat dont on redoute les retournements de l’ancien leader du RDNP.

Dans ce deal la candidature de Wiclef Jean serait un pis aller .Wiclef, s’il est accepté par le CEP pourrait faire échouer le deal sismique de Mr Préval ,comme étant le seul candidat á pouvoir déjouer le plan des hommes du palais national et á réaliser un score fleuve même avec une élection sélection. Cependant aux yeux du pouvoir comme de l’opposition, la candidature de Wiclef apparaît similaire á celle de Jean B Aristide de 1990. N’étant pas un adepte de parti politique son inscription au processus électoral ouvrirait le pas á l’aventurisme politique et pourrait valoir un nouveau J.B.A qu’aucun acteur important sur la scène politique nationale et internationale ne voudrait voir se reproduire. D’aucuns déjà font allusion á la chanson du star HIP POP candidat « Si j’étais président » qui prévoit son élection le vendredi, son assassinat le samedi et son enterrement le dimanche.

Dans ce deal aussi, le parti fanmi Lavalass ne ferait pas non plus de poids .D’une part ses candidats ne sont pas aussi populaires qu’ils le font croire sur le terrain. En témoignent les résultats médiocres des élections législatives de février 2006 qui n’accordaient á ce parti qu’une dizaine de d’élus au sénat et á la chambre des députés á coté du vote fleuve donné á Mr Préval..D’autre part une bonne partie des membres du parti fanmi lavalas s’est ralliée au camp de Préval qui a consacré le divorce définitif d’avec l’ancien président JBA..

Bref ,Samedi dernier au cours de l’émission Ramasse, l’ancien Sénateur Edgar Leblanc Fils a déclaré péremptoirement qu’en l’absence de la commission bilatérale du parlement ,l’exécutif en conseil des ministres peut prendre un décret et donner une décharge générale á tous les anciens grands commis de l’état qui briquent aujourd’hui le poste présidentiel. Mr Edgar soutient que ceci a été fait sous le gouvernement de Gérard Latortue, que cette mesure a été prise sous le règne des gouvernements éphémères de six sept mois et que le président Préval ne veut pas le faire pour ne pas être obligé de donner décharge générale á des anciens compagnons qui auraient perdu sa confiance.

Si dans toutes ces réflexions ,c’est le deal Baker qui fait tache d’huile et si les anciens parlementaires du bloc CPP devenu UNITE n’arrivent pas á se faire élire en majorité, le pourcentage élu de ce parti pourrait négocier avec l’équipe de Baker une majorité parlementaire pour s’assurer des décisions politiques á venir, voir la Primature et conserver le pouvoir . Finalement comme la cerise sur le gâteau pour confirmer ce plausible deal, les candidats Baker et Mirlande Manigat n’ont pas osé lever le moindre petit droit pour contester les candidats des autres partis pro présidentiels.

dimanche 15 août 2010

Jude CNE, candidat de INITE

Jude CNE, candidat de INITE
Frantz Duval
duval@lenouvelliste.com


Jude Célestin. Ce nom ne vous dira pas grand-chose tant l'homme est discret. Dites Jude CNE, du nom du service des équipements lourds qui réalise des routes aux quatre coins du pays, et tout le monde saura que l'on parle du directeur général du Centre National des Equipements, le bras robuste et fidèle qui permet à René Préval de donner forme à ses projets les plus audacieux en termes d'aménagement du territoire. Le Nouvelliste vous présente Jude Célestin, le jeune loup qui a ravi sa place à Jacques Edouard Alexis pour devenir le candidat de INITE.


Haïti: Jude Célestin est né le 19 juin 1962 à Port-au-Prince d'une mère originaire de Grand-Gosier et d'un père Jacmélien. Le candidat de INITE est un produit de ce Sud-Est si important aux yeux du sénateur Joseph Lambert, Jude, comme tout le monde nomme le DG du CNE, y garde des attaches solides et a un pied-à-terre à Thiotte où il a, pendant des années, cultivé des terres et investi dans l'exploitation de caféiers.
Jude passe son enfance au Bois-Verna, dans la bâtisse qui loge le collège Fernand Prosper. Toute la famille est d'ailleurs composée d'enseignants : son père, sa mère, ses tantes et oncles, tout le mode fait sacerdoce de transmettre le pain de l'instruction.

Le futur candidat a une enfance tranquille et fréquente le Petit Séminaire Collège Saint-Martial. Il a la chance d'aller à l'école chez lui pendant quelques années en fréquentant le collège Fernand Prosper avant d'achever son secondaire au Centre d'Etudes Secondaires. Ses études achevées, il part pour la Suisse et entreprend une formation universitaire en génie. Il se spécialise dans la mécanique. Le travail manuel le fascine, la vitesse et les moteurs aussi.

En 1985, ingénieur en mécanique, il revient en Haïti et commence à travailler à la Minoterie d'Haïti. Sa première quinzaine de travail, il la passe en salopette, les mains dans le cambouis, à réparer tout ce qui ne marche pas.
Résultat : sa paie est de six cent soixante gourdes soit quarante gourde par jour. Le salaire d'un simple ouvrier. Le Français qui dirige le service où il est affecté lui présente des excuses : on a confondu l'ingénieur avec un manoeuvre tant il mettait la main à la pâte.

Il gravit tous les échelons de la direction technique avant de devenir directeur d'usine en 1991. C'est le plus haut poste dans l'entreprise à côté du directeur général qui siège en ville, à la rue Pavée. Jude règne sur Lafitteau. En cette année 1991, la Minoterie marche bien, l'ingénieur veille.

C'est à la Minoterie qu'il rencontre pour la première fois René Préval, Premier ministre à l'époque, lors d'une visite d'inspection de celui-ci. L'histoire d'une longue amitié commence, mais les deux hommes ne le savent pas encore.
Entre-temps, Jude Célestin se marie, divorce, est père de famille. La famille, il en fait son roc. Pour son clan, il en est d'ailleurs le leader. Sa soeur Rita, très proche de lui, témoigne qu'il n'est jamais là pour les fêtes, mais est le premier qui accourt quand il y a des pleurs ou un problème quelconque.

Passionné des gadgets, sportif, coureur automobile, fan de motocross, ce séducteur qui ne fréquente pas les fêtes, oublie les invitations mondaine, n'a pas voyagé à l'étranger ces deux dernières années, dort peu et se réveille tous les jours à 4 h 30 pour être au bureau à 6 h.

En fait, il est enchaîné à son travail, quel qu'il soit. Jusqu'à sa démission remise au président Préval, il ne vivait que pour son CNE inventé pour lui au fil des années de bons et loyaux services.

« Parrain de mon mariage, il arrive en retard. De peu, il a failli me conduire à l'hôtel en bottes et salopette», raconte Rita Célestin.

Fin 1997, Jude Célestin rencontre à nouveau René Préval qui cherche un ingénieur pour s'occuper du parc des équipements lourds que la présidence est en train de constituer pour pallier les déficiences du ministère des Travaux Publics.

Jude a des qualités qui impressionnent le président. Il est calme, discret même, appliqué et fait ce qu'il doit faire dans les délais, sans entrer dans les discussions à n'en plus finir des ingénieurs des Travaux publics. Au fil des mois, Préval le renforce dans son rôle d'interlocuteur privilégié de la présidence et donne à Jose Ulysse la responsabilité du SMCRS. Les deux hommes étaient sur les rangs pour piloter le CNE.
Le CNE fait de beaux coups et quelques couacs. N'en déplaise aux autres - les hommes des TP - Préval s'en emmourache et les critiques le renforcent dans son choix. A la fin de sa présidence en 2001, le CNE est déjà une très belle machine.
Le retour au pouvoir de Jean Bertrand Aristide (qui ne fait pas des routes sa priorité) met de l'eau dans le gaz des ambitions du Centre National des Equipements. Les moyens baissent. Se réduisent à presque rien. En février 2002, Jude Célestin quitte son poste.

La traversée du désert, il le passe à l'UNOPS, un organisme des Nations Unies mais surtout à Marmelade, auprès de René Préval qui s'est replié sur la ville natale de ses parents. Préval qui mange son pain noir apprécie la compagnie de celui qui est ce fils qu'il n'a pas et de cet ami qui le comprend plus que les autres, rapporte un habitué des week-ends à Marmelade pendant cette période.

En 2006, Jude, fin tacticien, ne remonte pas sur les tracteurs du CNE dès le retour de son président au pouvoir. Le Centre est l'objet de scandales. Le parc d'équipements est en pièces. Il y a plus de carcasses que de tracteurs sur la cour de l'ancien Sepren, le Service Permanent d'Entretien du Réseau Routier National du ministère des Travaux Publics, à Varreux, où loge le CNE.

Cette bâtisse, quand Jude en parle, il en a surtout la nostalgie des premiers moments lorsqu'un soir le président Préval lui demande d'aller visiter les locaux désaffectés du Sepren pour savoir si cela peut convenir à l'organisme qu'il rêve de mettre sur pied.

Quelques jours plus tard, Jude Célestin y prend poste avec pour siège une marmite recouverte d'un morceau de carton et cinq employés dont certains y sont encore. La route qui le conduira à devenir Jude CNE n'était pas clairement tracée à l'époque.
Pendant toute l'année 2007, le CNE se débat dans des affaires administratives. Une commission d'évaluation fait le ménage, et ce n'est qu'en septembre 2008 que le directeur des années fastes du CNE en reprend le contrôle après les ravages de quatre cyclones.

Il faut tout reprendre à zéro pour regarnir le CNE. Les millions de Petrocaribe abondent. Le maillage routier annoncé par le président Préval ne se concrétise pas avec les fonds de la communauté internationale mais se fait partout à travers le pays, grâce à l'opiniâtreté des techniciens du CNE.
Toujours présents, de jour comme de nuit, les camions et tracteurs percent des voies, nivellent des talus et construisent les routes promises par le chef de l'Etat pendant sa campagne présidentielle ou pour lui permettre de faire d'un élu local un indéfectible allié.

Jude reprend les anciennes formules. Il se remet à recruter des femmes. Avant son départ, en 2002, près de 50% du personnel du centre est de sexe féminin. Chauffeurs de camion, opératrices d'engins lourds, mécaniciennes, monitrices, ingénieurs, les femmes font tout au CNE. Elles s'en iront après le départ de leur Dg, celui qui a eu à dispenser les cours de formation, débauchées par des ONG ou par des entreprises dans le secteur de la construction.

A son retour en 2008, Jude Célestin recommence avec les dames. « Elles donnent des résultats extraordinaires. Elles sont les meilleures élèves lors de l'apprentissage et sont très appliquées après. Leurs équipements sont propres et bien tenus. Elles sont fiables et prennent soin de tout ce qui est sous leur responsabilité. Atout supplémentaire, elles ont un pouvoir d'attraction extraordinaire. Dans un quartier difficile, elles monopolisent l'attention, calment le jeu. Sur les chantiers durs, leur présence galvanise les hommes qui ne veulent pas perdre la face », confesse Jude Célestin pour expliquer son parti pris pour le sexe faible dans la réalisation de tâches qui sont réputées pénibles, interdites aux femmes.

Jude avoue même que l'intégration des femmes au CNE est l'une de ses plus grandes réussites au sein de cette institution. « Quand une femme travaille, on peut être sûr que les enfants sont bien nourris et vont à l'école, que la maison est bien tenue et qu'il y aura de l'épargne », confie celui qui est aussi chargé de recueillir les confidences de ces dames qui devenues autonomes et chefs de famille grâce à leur chèque, doivent calmer la déprime de leur mari, souvent chômeur.

L'autre satisfaction de Jude : les nouvelles routes percées par le CNE sous sa direction. Et il raconte son expérience sur le tronçon Lascahobas-Belladère, il y a quelques années.

« Il fallait une semaine, une semaine, pour franchir les 21 kilomètres qui séparent les deux villes. Nous nous sommes mis au travail et avons réussi à faire la route en inventant des solutions au fur et à mesure sous le regard curieux et moqueur des riverains. Il a fallu à un certain moment « enterrer la boue » en creusant des tranchées immenses où on prélevait des matériaux et qu'on comblait avec la boue retirée de la chaussée. Quand on eut fini, pendant les dernières semaines des travaux, personne de l'équipe du CNE ne payait rien aux habitants de Belladère. Tout leur était offert en signe de remerciement», raconte avec des yeux qui brillent le candidat de INITE qui reçoit Le Nouvelliste chez lui dans les hauteurs de Pétion-Ville ce vendredi au sortir d'une longue réunion politique.

Le candidat Jude ne s'étend pas sur le déroulement de la semaine décisive qui l'a vu devenir le candidat de INITE en emportant la décision finale après la démission de Jacques Edouard Alexis de la Plateforme suite à une réunion orageuse vendredi dernier avec les mammouths du parti-plateforme.

Pour le moment, il partage son temps entre séances de réflexion sur le programme qu'il aura à défendre, réunions de préparation de sa future campagne électorale et rencontres avec les élus, candidats et soutiens de la Plateforme présidentielle.
Quand on demande à ses conseillers s'ils sont confiants à la veille du carnet du 17 août, l'un d'eux répond sans ambages « toutes les pièces requises par la loi électorale ont été soumises au CEP, nous sommes confiants de la suite. La seule personne qui contestait la candidature de Jude s'est désistée ».

Ceux qui entourent le candidat sont des vieux de la vieille qui ont fait et gagné toutes les campagnes électorales depuis 1990 et aidé deux hommes à accéder à la magistrature suprême en quatre occasions. Ils connaissent le terrain et les hommes qui la composent. Jude leur apporte le bain de jouvence qui ne coule plus dans leurs artères. Et c'est cela tout le charme du jeune candidat qui doit apprendre beaucoup et vite de ces expérimentés tuteurs dont le président Préval est le premier.

Quand on demande à Jude Célestin ce qu'il pense de son choix comme candidat à la présidence pour la plateforme INITE, il devient pensif et sort une anecdote qui date de vendredi dernier, le jour où il est entré au palais à la réunion de désignation en tant que directeur général du CNE et en est ressorti avec la responsabilité de défendre les couleurs de la Plateforme.

« Avant d'aller au palais, j'étais à la Croix-des-Bossales pour visiter un chantier. Les égouts obstrués, l'eau arrivait au mollet des marchandes restées là pour débiter leurs marchandises. Quand je suis entré dans l'une des rues avec ma voiture, un dame m'a apostrophée : « Ou fou pou ap antre la a ak bèl machin sa a ». J'ai constaté qu'elle s'inquiétait seulement du sort de la voiture alors qu'elle-même pataugeait dans la boue. Après ma désignation, c'est à elle que j'ai pensé en premier en me disant qu'il allait me revenir, plus encore qu'avant, de la sortir de cette situation, elle et tous les autres Haïtiens », raconte un Jude réputé peu bavard mais qui a mille histoires à raconter, une sur chaque mètre de chantier qu'il a mis en place ces dernières années.

La force du candidat Célestin est d'ailleurs d'avoir des points d'ancrage dans chaque commune du pays. Nombreux sont les élus locaux qui lui sont redevables d'un coup de tracteur qui a assuré leur élection ou améliorer le décor d'une fête patronale. Il jouit du même soutien auprès de ceux qui tiennent les cordons de la bourse, élément déterminant dans une campagne électorale.

Le candidat a aussi la faiblesse de sa force. Il endosse le bilan du pouvoir sortant et doit défendre le bilan de ses actions à la tête du CNE. Dans un pays qui adore les vierges en politique, il y a du pain sur la planche.

Celui qui se présente comme un homme simple, travailleur, qui respecte tout le monde et aime son pays, va se présenter dans le premier combat électoral de sa vie et cela au plus haut niveau. Ceux qui le croient dénué d'expérience politique oublient qu'il fait partie du premier cercle du pouvoir de René Préval depuis plus de douze ans.

« Samedi après le dépôt de ma candidature, je me suis dit que je devais appeler tout le monde, tous ceux qui le veulent, tous ceux qui savent travailler, pour qu'ils viennent participer au relèvement du pays. On va avoir du boulot et, comme pour le CNE, seule une équipe où chacun fait ce qu'il a à faire pourra relever le défi.»

Jude CNE va mettre sa machine en route. Le tracteur de l'INITE a un jeune opérateur. Dans un pays qui compte plus de 60% de sa population parmi les moins de 40 ans, c'est un signal, un slogan, une promesse. Un privilège qu'il partage avec peu d'autres candidats.


Frantz Duval
duval@lenouvelliste.com

« Un espoir prometteur dans la riziculture »

« Un espoir prometteur dans la riziculture »

Valéry DAUDIER
vdaudier@lenouvelliste.com

Avec un rendement de 4 à 6 tonnes métriques par hectare, la nouvelle variété de riz dénommée Prosequisa-4(P-4), expérimentée à la ferme de Mauger dans l'Artibonite, pourrait augmenter la production nationale de riz. Selon le chef de la Mission technique de Taïwan en Haïti, Carlos Hsiang, qui a présenté jeudi cette nouvelle variété à une centaine de planteurs de l'Artibonite, « la P-4 est un espoir prometteur dans le domaine de la riziculture dans le pays ».


Haïti: Les plus grandes variétés de riz dans l'Artibonite est le TSC-10 et Schela. En fait, en 1998, cette région a connu un déclin dans la riziculture. Le riz dénommé Crête- à-Pierrot plus connu sous le nom de La Crête - la variété de plus prisée -, a disparu après l'apparition d'une maladie connue sous le nom de "paille noire". Pour remédier à ce problème, la mission technique de Taïwan et l'Organisme de développement de la Vallée de l'Artibonite (ODVA) ont donc apporté une nouvelle variété de riz qui est la TCS- 10. Depuis, elle est la seule à avoir une fiche technique.

Selon l'agronome Carlos Hsiang, chef de la Mission technique de Taiwan qui est à pied d'oeuvre dans cette région pour l'expérimentation des semences, le rendement moyen rizicole de la Vallée de l'Artibonite ne dépasse pas 2,5 tonnes métriques par hectare. Il estime qu' « avec l'arrivée de la prosequisa-4, cette nouvelle lignée de riz qui atteint 4,6 tonnes métriques en milieu paysan, un vent d'espoir souffle encore dans le pays sur le domaine rizicole ».

En effet, après plus d'une décennie, dans le but d'augmenter la production rizicole et d'initier d'autres variétés dans le pays, l'ODVA et la Mission technique taïwanaise ont investi beaucoup d'efforts dans la recherche. Ainsi, différentes lignées de riz, après la mise en place des parcelles de démonstration et des parcelles d'essais régionaux, commencent à bénéficier de l'appréciation des riziculteurs.

« La lignée la plus prometteuse est la prosequita-4. Les travaux effectués par la mission à cet effet ont été appréciés par plus d'un tant dans le département du Sud que dans l'Artibonite, si l'on se réfère au rendement obtenu à la ferme expérimentale de Mauger de 6,6 tonnes métriques par hectare et de sa forte capacité de repousse », a avancé Carlos Hsiang, très dynamique, qui expliquait à une centaine de planteurs les avantages de cette nouvelle variété.

Selon M. Hsiang, la prosequisa-4 résiste aux vents ; elle a une bonne culture de repousse ; elle comporte beaucoup de tiges et elle est compétitive des mauvaises herbes. Le seul inconvénient, dit-il, c'est qu'on doit attendre quelques jours de plus que les autres variétés, avant la récolte.

A en croire l'agronome taïwanais, les agriculteurs peuvent obtenir annuellement entre 12 à 15 tonnes métriques de riz suivant une culture normale et deux cultures de repousse. « L'expérience a été faite à la ferme expérimentale de Mauger, a-t-il fait savoir. Cette méthode de culture pourrait non seulement augmenter le rendement annuel, mais elle diminue aussi le coût de production comme le labourage, pour ne citer que cela », a-t-il ajouté.

En ce qui a trait aux résultats partiels des travaux déjà effectués sur la lignée de Prosequisa-4, de janvier 2009 à janvier 2010, selon une culture normale de deux repousses, 15 tonnes métriques pour un hectare ont été récoltées à la ferme expérimentale de Mauger. A Torbeck, commune des Cayes où cette mission technique de Taiwan est aussi présente, sur 600 hectares, un rendement moyen de 4,64 tonnes par hectare a été obtenu (milieu paysan). A Trois-Bornes et à Pierre-Paul (localités de l'Artibonite), de janvier à juin 2010, toujours en milieu paysan, la culture de Prosequisa-4 a donné un rendement de 4,27 t/ha.

Plaidant pour un meilleur accompagnement des planteurs à opter pour cette nouvelle variété, M. Carlos Hsiang croit que cette initiative pourra être bénéfique pour le pays. L'agronome a souligné que Haïti importe en moyenne 70 % de riz consommé. La consommation nationale de riz est de 500 000 tonnes alors que la production nationale de riz est de 150 000 tonnes pour 60 000 hectares cultivables.

Valéry DAUDIER
vdaudier@lenouvelliste.com

Cette tornade qui vient du nord…

Cette tornade qui vient du nord…

Par Liliane PIERRE PAUL
samedi 14 août 2010,
Radio Kiskeya


Il y a moins d’un an dans une interview exclusive à Radio Kiskeya, la star du hip-hop Wyclef Jean se refusait à admettre qu’il se préparait à se porter candidat à la Présidence. Aujourd’hui, c’est fait. Il en a fait l’annonce sur le puissant réseau américain CNN et le jeudi 5 août 2010, il a présenté officiellement sa candidature à la direction des opérations électorales du CEP. Il ne fait aucun doute que cette candidature est venue donner une dimension inattendue à ces élections qui jusque-là semblaient opposer d’une part le pouvoir à la recherche d’une formule de continuité et d’autre part, les ténors de l’opposition qui contestaient d’avance le processus électoral sans vraiment démontrer la capacité d’en empêcher la réalisation.

Comme une tornade, l’annonce de la candidature de Wyclef Jean a donné l’impression de tout balayer : Inite, la plateforme au pouvoir, a perdu son apparente cohérence interne et l’opposition semble encore en quête d’une nouvelle formule de mobilisation. Si Wyclef Jean arrive à franchir sans difficultés le saut à obstacles que constituent les critères d’admission du CEP (17 documents obligatoires dans son cas) sa candidature marquera certainement un tournant dans une dynamique électorale dominée jusque-là par le clan au pouvoir.

Cette candidature n’est pas sans rappeler celle de Jean Bertrand Aristide en 1990, même s’il faut éviter le piège de la comparaison abusive. Comme Aristide, il y a vingt ans, Wyclef Jean est un outsider sans réel programme et porteur d’un discours populiste et messianique qui mobilise les couches les plus défavorisées et la jeunesse nombreuse et marginalisée des bidonvilles du pays. Ce discours effraie, ou tout au moins, dérange l’establishment. Car, comme avec Aristide en 1990, la présence de Wyclef Jean dans la course électorale est vécue comme une remise en cause des élites politique et économique qui ont échoué à faire d’Haïti un pays viable pour ses ressortissants.

Mais, contrairement à Aristide qui disposait en 1990 d’un solide réseau d’appuis au sein de l’église catholique (TKL), d’une frange importante de la bourgeoisie d’affaires, des médias indépendants, des organisations socio-professionnelles et des intellectuels progressistes, on n’est pas du tout sûr en 2010 que Wyclef Jean dispose de tels appuis. Ses soutiens les plus évidents viennent du mouvement rap créole dont il est le parrain. Il s’agit d’un mouvement contestataire très prisé au sein de la jeunesse marginalisée des quartiers pauvres de nos villes que Wyclef Jean désigne sous le nom de ghettos. Ce mouvement qui a ses propres règles, ses rituels et ses propres codes de communication saura-t-il mobiliser l’ensemble de la jeunesse haïtienne aujourd’hui déboussolée, sans repère dans une société en crise ? L’appui de la jeunesse des ghettos aura-t-il une expression électorale dans un pays où les jeunes de moins de 30 ans représentent plus de la moitié de la population ? On ne saurait le dire pour le moment. Ce qui est certain, c’est que l’effet Wyclef dans l’opinion publique haïtienne et internationale est sans conteste. Son nom est sur toutes les lèvres en bien ou en mal et son statut de mégastar du hip-hop mobilise la grande presse internationale replaçant ainsi Haïti sous les feux de la rampe pour des raisons différentes que celles d’il y a 7 mois, lors du séisme dévastateur du 12 janvier.

Par ailleurs, dans une société aussi complexe que la nôtre, son statut de mégastar venue de la diaspora peut tout aussi bien lui être profitable que nuisible. Depuis la candidature ratée de l’industriel Dumarsais Siméus, débarqué du Texas, c’est la première fois que le pays est ainsi confronté à sa diaspora. Car, quoi que dise l’ex-leader des Fugees, il est un candidat venu de la diaspora. Il est un modèle de réussite dans la logique du grand rêve américain. Cela fascine et fait peur en même temps. Tant que Wyclef Jean associait le drapeau haïtien à ses succès internationaux, il faisait l’unanimité. Mais, les réactions ne sont plus les mêmes quand il sollicite le suffrage des citoyens pour la magistrature suprême. Tous ses handicaps sociaux sont alors propulsés au premier plan, à commencer par ses problèmes linguistiques. Il ne parle pas le français au grand dam des francophones et francophiles et il parle un créole de ghetto qui préoccupe, sinon agace la majorité silencieuse. Tout cela complique encore davantage sa méconnaissance avérée du pays dans ses codes sociaux, ses us et coutumes.

Mais, il n’est pas à une contradiction près. Son mouvement « Fas a Fas » apparaît comme une proposition de huis-clos haïtiano/haïtien opposant riches et pauvres, jeunes et vieux, mulâtres et noirs, citadins et paysans, haïtiens du dedans et haïtiens du dehors. Cependant, peut-il y avoir huis-clos haïtiano-haitien sous la protection de la MINUSTAH et des ambassades « amies » ? D’un autre côté, il s’est fait inscrire sous la bannière du mouvement « Vivre Ensemble », une toute petite rigole du mouvement lavalas déjà sérieusement morcelé. Saura-t-il refaire l’unité de cet électorat de plus en plus atomisé ? S’il ne passe pas à la trappe du CEP le 17 août prochain, l’un des problèmes majeurs qu’il aura à confronter sera de prouver qu’il a autant de talent pour réussir dans le showbiz international que dans la politique locale. La bataille sera rude. Il devra abattre toutes ses cartes dont certaines demeurent encore de grandes inconnues : Quelle sera l’attitude de la diaspora ? Surtout celle très puissante des Etats-Unis ? Quel sera le comportement du gouvernement américain ? Quelle sera la position de l’élite noire américaine ? Le monde des superstars : des Oprah, 50 Cent, Puff Daddy, Beyonce, Danny Glover, etc. ? Et la très musicale communauté évangélique afro-américaine ?

En faisant fi de la contestation de la légitimité du CEP par des partis politiques parmi les plus importants du pays, contestation relayée par des organisations de la société civile, Wyclef Jean ainsi que certains candidats du camp démocratique, cautionnent une institution discréditée totalement et à la solde de l’exécutif. Ils jouent gros, à leurs risques et périls. Wyclef Jean ne sera-t-il qu’une tornade soudaine, puissante, dévastatrice et éphémère ?

Complicité d’ingérence

Complicité d’ingérence
Écrit par Guy Ferolus
Vendredi, 13 Août 2010 17:25

L’utilisation de la presse par les diplomates étrangers accrédités en Haïti illustre parfaitement le degré d’abrutissement auquel se livre le pays tout entier a un moment critique de notre vie de peuple « libre » où des forces étrangères occupent injustement le pays.
L’ingérence étrangère s’insère dans la pratique quotidienne de toutes les structures politiques de l’Etat et est voulue par la classe dirigeante dans son ensemble. Cette ingérence est recherchée et alimentée par les politiques et surtout la presse haïtienne très gourmande en matière de sollicitation des représentations diplomatiques. Dans les grands médias les déclarations des ambassades étrangères se disputent la Une tandis que le discours de nos dirigeants est relégué au second plan. Curieux ! Ce que pensent l’ambassadeur américain est plus important que la prise de position d’un ministre ou d’un élu. Ainsi pour comprendre la destitution d’un premier ministre, le vote du budget de l’état ou toute autre question de politique nationale il faut interviewer un diplomate étranger. Pourquoi les journalistes sont-ils si friands de l’avis des diplomates ? Est-ce parce qu’on ne prend pas au sérieux les dires de nos dirigeants? Ou est-ce le souci de la pertinence dans le traitement de l’actualité qui pousse nos chers journalistes à aller chercher l’information à la source c'est-à-dire auprès de ceux-là qui détiennent les clefs du pouvoir ?

Dans cette Haïti complexe un journaliste qui se respecte doit s’arranger pour avoir les informations de première main, en d’autres termes des informations venues directement des ambassades étrangères, là où s’exerce, vraisemblablement, la réalité du pouvoir politique.
De leurs coté les diplomates ne se privent pas de cette tribune qui leur est offerte par la presse. Ils sont sur toutes les radios, commentant la gestion de nos institutions, les actes de nos politiques etc.
A Port-au-Prince un ambassadeur n’est pas seulement un diplomate étranger mais un acteur tout puissant du jeu politique avec qui on doit avoir de bons rapports si on veut exister. C’est drôle, Haïti cumule tous les paradoxes ! En même temps, ce pays regorge de nationalistes de tous poils prêts à brandir le drapeau national, à ressasser les exploits de Dessalines dans un coup de tonnerre viv lib ou mouri en fustigeant l’ingérence étrangère.
Mais comment un ambassadeur peut-il entrer dans un tel jeu en foulant au pied le devoir de réserve lié à sa fonction ? Comment nos dirigeants, nos chers parlementaires habitués à des déclarations à l’emporte-pièce peuvent-ils laisser faire sans même lever le petit doigt pour protester, et dénoncer l’immixtion des puissances étrangères dans la gestion de notre destinée ? Qu’est-ce qu’un diplomate a à dire sur la nomination ou la destitution d’un premier ministre ? Qui se préoccupe de son avis sur l’organisation des élections?
La question est beaucoup plus complexe qu’elle n’y parait. Eh oui ! Quand il s’agit d’Haïti on engendre du complexe par le simple. L’ingérence étrangère dans la politique du pays ne date pas d’hier. Les Duvalier ont dirigé le pays avec un bras de fer pendant quarante ans sous la bienveillance et la bénédiction de la communauté internationale et il n’a fallu que d’un simple coup de fil des américains en 1986 pour chasser BabyDoc du pouvoir. Plus récemment, le départ précipité de Jean Bertrand Aristide est en partie l’œuvre concertée de la diplomatie franco-américaine, mise à part une forte mobilisation populaire visant la destitution du pouvoir lavalas. Gérard Latortue nous a été imposé par le voisin superpuissant. René Préval, malgré sa popularité apparente, ne serait pas revenu aux affaires si facilement et dans les conditions que l’on sait si ce n’était la volonté de nos « bailleurs de food ». L’opposition anti-Préval qui dénonce l’occupation militaire du pays et le départ des forces étrangères n’a pas hésité à aller se plaindre au domicile de l’ambassade américaine auprès de Cheryls Mills, chef cabinet d’Hilary Clinton.
Cependant, il faut avouer qu’on n’a pas su prendre en main notre destiné. On nous finance tout : nos élections, nos infrastructures, le budget de nos institutions, notre pain quotidien... Et en contre partie on nous demande des comptes selon la formule tristement célèbre qui finance commande. Dans ce cas de figure dirions-nous qu’il est normal que les diplomates étrangers font des déclarations intempestives et que nos talentueux journalistes y prêtent autant attention.
Les journalistes devront prendre conscience de l’incohérence de leur démarche consistant à tendre, à tout bout de champ, leur micro aux diplomates accrédités en Haïti. Ce faisant ils souillent leur métier et en même temps leur patrie. L’avis d’un diplomate étranger, quelque soit son estime et son prestige, devrait compter moins que ce que pense le plus insignifiant de nos élus.

mardi 10 août 2010

Une autre philosophie de vie

Une autre philosophie de vie
(les leçons d'une catastrophe)
Dr Erold Joseph
Le Nouvelliste
7-8 Aout 2010

Haïti: A la mémoire du Dr Vély Jean-François, membre de l'Association de Santé Publique d'Haiti (ASPHA) mort récemment. A celle du Dr Boris Chandler, mon prof à la Faculté de Médecine et de Pharmacie qui vient, lui aussi de faire le Grand Voyage. Ils ont échappé au séisme, mais pas à la maladie. A mon cousin Mike, mon oncle Jean-Michel, son épouse, emportés eux, par le séisme. A tous ceux qui vont partir très prochainement et qui ne le savent point ....
« Ce que l'on n'apprend pas par la sagesse, il faut l'apprendre par les malheurs »
Baird T Spalding

Il était une fois trois amis d'enfance : Robert, Pierre et Elie. Haitiens, ils vivaient en Haïti. Robert avait en quelque sorte réussi sa vie, tel qu'on l'entend communément. Il était un haut cadre des Nations Unies, avait un salaire en devises américaines, était marié à une fille de la haute société. Il avait construit deux grandes maisons l'une à Fermathe (un véritable château), l'autre à Jacmel. Il voyageait lui et toute sa famille au moins une fois l'an. Il adorait les fêtes mondaines et les amis, fumait, buvait et s'amusait follement en week-end. Il disposait de trois voitures de luxe, sans compter celle qui était mise à sa disposition par l'Organisation des Nations Unies. Les trois enfants de Robert allaient en classe dans une école étrangère établie dans le pays.
Pierre, marié lui aussi et père de deux enfants, était ingénieur mais gagnait plus modestement sa vie. Il avait bâti sa résidence au haut de Delmas. Il disposait d'une petite assurance-santé pour lui et sa famille . Il menait une vie sobre, ne fumait ni ne buvait et pratiquait régulièrement le sport. Il avait de saines habitudes de vie, selon l'expression consacrée en santé publique.

Elie, quant à lui, malgré sa grande intelligence, était ce que l'on appelle communément, « un déjoué ». Marié et divorcé, il avait sombré dans l'alcoolisme et vivait seul en ville dans un petit appartement peu coûteux. Blagueur, de tempérament enjoué, il profitait de l'existence malgré le caractère modeste de sa condition.
Le jour du séisme du 12 janvier, Robert se trouvait à l'hôtel Montana avec ses amis des Nations Unies. Il fut sorti des décombres, mais a dû être amputé de la jambe droite. Il perdit sa fille adorée de 18 ans , et deux de ses voitures personnelles. Sa résidence à Jacmel s'est entièrement effondrée. Par contre, celle de Fermathe est intacte.

Pierre, quant à lui, est mort à son bureau. Il avait tout fait pour conserver une bonne santé , mais n'a pu conserver sa vie.

Elie, par contre, est le seul à avoir été épargné par le séisme : il n'a absolument rien perdu, ni proche parent, ni possession. Il avait d'ailleurs peu ou pas de bien matériel, donc rien à perdre. Il vient de mourir toutefois, il y a une semaine, d'un accident de voiture. Il a été renversé par un chauffard, un « tet mato » qui conduisait un camion. Sa veuve éplorée, racontait, lors des funérailles, qu'il souffrait d'un cancer de la prostate au stade terminal, ce qui l'avait d'ailleurs conduit à l'alcoolisme, puis au divorce.

Voilà donc trois trajectoires de vie, trois destinées différentes, en référence avec le tremblement de terre du 12 janvier. Pour paraphraser le fabuliste Lafontaine, on peut dire que tous furent frappés. A l'exception peut-être d'Elie, lequel a eu plus tard son camion. Mais, quelles leçons tirer de tout cela?

PREMIÈRE LEÇON : Nous devons tous mourir un jour ou l'autre. Et ce jour peut être aujourd'hui.

Que tu sois riche ou pauvre, âgé d'un mois, de cinq ans, de trente, cinquante ou de cent années , que tu sois homme d'affaires, président, premier ministre, parlementaire, chef de parti politique, que tu sois un homme ou une femme du pouvoir, du savoir ou de l'avoir, tu mourras un jour ou l'autre. Je te le jure sur la tête de ma mère qui a déjà fait le grand voyage. Autant donc, s'y faire tout de suite. Ce n'est qu'une question d'année, de mois, de semaine, de jour, de minute, ou même de seconde. A moins que pressé, tu ne t'en charges toi-même. Alors, tu auras l'avantage d'en déterminer le lieu, la date, le scénario et la mise en scène. Un « auto-goal »!
En fait, nous sommes tous en train de mourir, certains plus rapidement que d'autres. Il s'agit d'une vérité de La Palice que nous semblons oublier. C'est pourtant la leçon essentielle à tirer de ce terrible cataclysme. Si nous reprenons notre exemple de départ, lors même qu'Elie aurait été raté par le camion, un autre attaquant, le joueur numéro 9, Cancer, se préparait déjà à inscrire le but au cours de ce fameux match de Coupe du Monde que l'humanité s'acharne vainement à mener contre la mort depuis la nuit des temps.

Le déni de la mort est une caractéristique fondamentale de la civilisation occidentale. L'homme, en général, se conduit comme si son existence sur terre devait durer éternellement. Nous sommes comme des enfants qui jouent à cache-cache avec la mort, qui se bouchent les yeux et de ce fait, s'imaginent ne pas être vus. Ce refus d'accepter notre « Condition Humaine », nous entraine à construire notre existence sur du sable. Ce monde que nous avons bâti nous parait merveilleux et réel jusqu'à ce que la mort d'un proche, de plusieurs proches, de centaines de milliers de proches ou l'imminence de la nôtre fasse s'écrouler cette illusion. Pour répéter le grand maitre tibétain, Sogyal Rinpoché : « Quand vous tombez d'une très grande hauteur, vous ne pouvez qu'atterrir sur le sol : le sol de la vérité ».

La solution: vivre avec le sentiment de notre « impermanence » sur terre. Impermanence des êtres. Impermanence des choses...

DEUXIÈME LEÇON : seul le présent est nôtre.

Garder constamment à l'esprit le sentiment de cette « impermanence ». Accepter la mort pour mieux apprécier la vie et en profiter pleinement. Vivre chaque jour comme s'il était le dernier. Les grands penseurs de tous les temps, les grands chefs religieux ont toujours prôné le culte de l'instant présent.
« Le passé est passé, le futur ne s'est pas encore manifesté et la pensée actuelle, au moment où nous en faisons l'expérience, se mue déjà en passé. En réalité, seul l'instant présent, le maintenant nous appartient ».

Est-ce à dire que toute planification est inutile et superflue dans la vie? Nullement. En tant qu'être humain évoluant dans un monde matériel, il convient d'en respecter les lois et les règles. Toutefois, nous devons toujours garder à l'esprit que nos prévisions, nos plans peuvent tomber à l'eau et accepter cette éventualité lorsqu'elle survient. De la petite contrariété à l'impondérable majeur, il y a plusieurs niveaux de remise en question. La tragédie du 12 janvier a été une remise totale en question, non seulement de notre façon de gérer notre pays mais de notre conception de l'existence en général.
Tout être humain a le droit, voire le devoir d'aspirer au bien-être, de profiter pleinement de la vie. Améliore tes conditions matérielles. Fais ce qu'il te plait sans nuire à autrui, sans oublier la loi de la modération, et tout en étant prêt à assumer pleinement les conséquences de tes actes. Savoure les matches de foot si tu es un fan du « soccer ». Ecoute la musique rap ou le jazz si cela te plait. Danse et bois ton Barbancourt ou ton Prestige si cela te chante. Ecoute toujours ton coeur, pas forcément ta raison. Fais l'amour à la femme ou à l'homme qui te plait . Vis avec elle ou avec lui, si tel est ton désir. Sinon, adopte le célibat qui a aussi ses joies. Embrasse ton enfant et dis-lui que tu l'aimes avant qu'il ne parte ou que toi, tu ne partes. Agis selon tes croyances et tes valeurs. Prie ou déifie Bouddha, Jésus-Christ, Krishna, Mahomet ou Marx... Selon ta foi et ta vision des choses. Dis merde à cette société superficielle, à tous ces imbéciles qui veulent te juger et régenter ta vie alors qu'ils ne peuvent gouverner la leur. Car il n'y a ni football, ni musique, ni danse, ni alcool, ni religion, ni sexe, ni progéniture, ni jugement à la con dans le royaume des morts où tu vas, inéluctablement!

TROISIÈME LEÇON : chercher le sens de la vie, ou du moins, donner un sens à sa vie.

Yu Dan rapporte l'histoire suivante dans son ouvrage sur le philosophe chinois, Confucius :
Un réformateur religieux passait près d'un chantier de construction. Il y vit une foule d'hommes en sueur transportant des briques sous un soleil ardent. Curieux, il interrogea un des travailleurs : « Que faites-vous là? ».
L'autre, maussade, lui répondit avec hargne :
-Vous le voyez bien. Je transporte des briques. Et c'est une tâche extrêmement dure.
Avisant un deuxième travailleur, il lui posa la même question. L'autre plus calme, rangea soigneusement ses briques sur le sol et dit : « je construis un mur. »
A un troisième ouvrier, il fit la même interrogation. Ce dernier était jovial. Il s'épongea le front, déposa ses briques, releva fièrement la tête avant de déclarer : « Nous construisons une cathédrale.

Les trois hommes effectuaient exactement le même travail. Mais, leur degré de bonheur était différent en raison du sens que chacun attribuait à sa tâche.

Pour apprécier pleinement la vie et en profiter, il faut d'abord accepter notre condition de mortel, faire confiance à la vie, pratiquer le « lâcher prise ». Si tu as peur de t'abandonner à l'eau, tu ne connaitras jamais le plaisir de la nage. Que tu sois athée ou croyant, matérialiste ou spiritualiste, sache que le bonheur, non pas « l'idéal des pourceaux » auquel se référait ironiquement Einstein mais, la sérénité, l'équanimité, ne vient que lorsqu'on a enfin trouvé sa « légende personnelle », pour répéter Paulo Coelho . Donne donc un sens à ta putain de vie, vis-la et meurs! « Ma religion est de vivre et mourir sans regret » a écrit Milarépa, un poète oriental. Platon disait que « l'essentiel n'était pas de vivre, mais de bien vivre ».

Le bonheur réside souvent dans l'appréciation des petites choses, des petits plaisirs, des petits instants de la vie. Un coucher ou un lever de soleil. Une tasse de thé ou de café. Un verre avec des amis ou des proches. L'extase devant un beau paysage, une femme ou un homme bien bâti comme moi (rires). Il ne se trouve pas forcément dans les grandes fêtes mondaines ou les grands orgasmes. Ne pas demander à l'existence plus qu'elle ne peut ou ne veut nous donner.

Malheureusement, nous cherchons « le bien vivre » dans le pouvoir, le plaisir effréné et l'accumulation compulsive de biens matériels. Notre société de consommation nous y encourage constamment par le biais de la publicité tous azimuts. Et pourtant, combien de compatriotes ont perdu en une minute, tout comme Robert, lors du passage de Goudougoudou (1), leur maison, leurs voitures, leurs économies, le fruit de toute une vie de travail et d'accumulation! Combien de chefs se sont retrouvés le lendemain sans pouvoir réel! Tous ces gens sont aujourd'hui sans repère, sans boussole, et reprennent déjà, une fois la période de stupeur passée, les « bonnes habitudes ». Les politiciens s'entredéchirent pour le pouvoir de régner sur les ruines et les décombres. Au lieu de trouver un consensus et de développer une vision commune de la « renaissance haïtienne ». Chacun veut gérer l'assistance internationale et se croit plus apte à le faire. La philanthropie lucrative et cacophonique bat son plein. La violence séculaire pointe à l'horizon. Attendons-nous le prochain cyclone ou le prochain tremblement de terre pour comprendre et changer? Pour choisir la sagesse au lieu de la déraison ? Ansy Dérose, ce génie de la musique haitienne qui avait saisi la grande leçon de l'impermanence, plaidait pour « l'union qui fait la force » dans nombre de ses chansons : « Nou tout, ce minm kote nou prale. Ann kimbe main juskann rive »(2).

Nul ne saurait toutefois, être heureux et épanoui tant qu'il n'a point assigné à sa vie une mission qui se situe au-delà du matériel, de la satisfaction de ses besoins et désirs personnels et de ceux de ses proches. Il faut retrouver ce rêve qui souvent existait dans l'enfance ou l'adolescence et qui a été égaré durant le voyage.
L'amour, la compassion, la connaissance et la sagesse, telles sont les grandes clefs de l'énigme de la vie. Le premier engendre le second et la troisième devrait entrainer la quatrième. Qu'on ne dise pas à notre départ : « Il a été riche et puissant ». Mais : « Il a été utile »...

Citons, pour terminer, Manly P.Hall :
« Vivre dans le monde sans en explorer le sens, est comme errer dans une grande bibliothèque sans toucher les livres.. »

Dr Erold Joseph
Eroldjoseph2002@yahoo.fr
Phone: (509) 3777-65 81
Prochain article, si je suis encore en vie : « Que se passe-t-il à la mort? »
(1) nom que les Haitiens donnent affectueusement au tremblement de terre pour tenter de l'apprivoiser.
(2) « Nous faisons tous la même route. Tenons-nous la main jusqu'à la destination finale. »


Dr Erold Joseph
Eroldjoseph2002@yahoo.fr

Le phénomène Wyclef !

Le phénomène Wyclef !
Agr. Michel William
Le 9/08/2010

Haïti: Haïti est un pays doublement occupé. Occupé par les Nations Unies sur mandat du Conseil de Sécurité qui nous gratifie d'une souveraineté surveillée, occupée avec la gouvernance de Mr Bill Clinton, ancien président américain dont la majorité des collaborateurs se retrouvent dans l'administration d'OBAMA et co-chairman de la Commission intérimaire de reconstruction d'Haïti appelée à gérer les dix milliards de dollars promis par la communauté internationale. Diplomatiquement parlant et pour les cinq ans á venir, Mr Clinton est le véritable gouverneur d'Haïti qui refuserait le contenant du poste pour assumer son contenu en exigeant et obtenant du président haïtien René Préval qu'il prenne toutes les dispositions politiques et légales qui légaliseraient et faciliteraient sa gestion en s'appropriant des impairs qui rendraient caducs et non opérationnels le programme du gouverneur américain en Haïti. C'est une politique génocidaire pour les hommes de l'INITE et ce génocide politique est d'autant plus meurtrier qu'il coïncide avec la période des élections qui place les collaborateurs immédiats du président haïtien dans le collimateur du verdict des Urnes, si le résultat des Urnes devrait être respecté.

La présidence de Mr Préval touchant pratiquement à sa fin est la mieux indiquée pour entériner ces politiques génocidaires pendant que ses proches manoeuvrent pour continuer à garder un pouvoir épuisé qui ne peut plus desservir les intérêts politiques et financiers des puissances occupantes d'Haïti ni ceux de la masse des laissés pour compte qui demandent son départ. Toute la stratégie de la communauté internationale en Haïti aujourd'hui consisterait à trouver un leader nouveau sans programme qui endosserait sans le dire celui de la CIRH et qui serait capable de mobiliser la très grande foule sur la base d'émotions ou d'un populisme divin qui ferait du candidat le nouveau Messie d'Haïti, le temps de la campagne électorale. Aucun des hommes de Lavalas devenu INITE, L'AVNI, Ayisyen pou ayiti, Platfom 16 desanm, MODEJHA, Mobilisation pour le Progrès d'Haïti (MPH) n'est porteur de ce populisme divin..

Au niveau de la classe politique traditionnelle des vingt dernières années, le discours programme a été épuisé par une communauté internationale et ses alliées les ONG qui n'ont financé que de petits projets sans durabilité. Il a été également galvaudé par la stratégie du Président Préval qui, en intégrant dans le pouvoir l'opposition politique sans l'intégrer objectivement dans les mesures de politique, lui a fait perdre à cette dernière son discours de projet de société et sa capacité traditionnelle de mobilisation des foules des années 86. Aucun leader de l'opposition traditionnelle classique haïtienne est capable de mobiliser la grande foule pour donner à l'internationale la démonstration de sa force. A la limite on pourrait penser à Mr Chavannes Jean Baptiste qui, dans la jungle des politiciens traditionnels, a réussi à démontrer sa force régionale de mobilisation en mettant chaque fois dans les rues de la ville de Hinche huit à dix mille personnes .

Dans cette optique, M. Wyclef, rappeur haïtien international, dont le message a été inconsciemment amplifié dans tous les albums parus de 2001 à nos jours par les équipes de barikad Crew, d'ISOLAN, de Rock Fame, de Lucky Dube, de Brothers Posse , de JAH NESTA et par d'autres mini-groupes rap à caractère religieux a créé dans tout le pays, j'insiste sur tout le pays, un courant de sympathie et d'admiration qui rallie les préoccupations de la jeunesse votante d'Haïti voir la paysannerie, et qui dès l'annonce de la candidature du chanteur HipHop, a créé le phénomène Wyclef.

C'est un phénomène qui a fait frémir de rage toute la classe politique haïtienne et qui a déclenché le cri d'orfraie au niveau de tous les partis politiques y compris l'INITE . D'ailleurs le slogan de Wyclef « Fas a Fas » manti kaba ( de moi ), a toute l'odeur du slogan fast food d'Obama « Yes we can », dans le pire momentum de la politique américaine où Obama ne peut jeter que les semences d'une volonté de changer. L'allusion politique de Wyclef qu'Obama est à l'Amérique ce que Wyclef Jean est à Haïti en dit long. Au demeurant, le phénomène Wyclef que toute la classe politique haïtienne qualifie de nouveau populisme ressemblerait à celui d'Aristide de 1990 ou à celui d'Obama durant la campagne présidentielle américaine.

Cependant Wyclef n'est pas Aristide et ne saurait être comparé à Aristide. La force de Wyclef réside dans le message bon enfant du rappeur qui a évité les formes violentes du Rap américain pour épouser celles de l'espoir en Dieu qu'un jour tout changerait pour la population des misérables. Ce message semblerait produire le même effet que les discours populistes respectifs d'Aristide des années 86 sur la masse des votants haïtiens qui sont les jeunes (53% de la population ), la paysannerie, les protestants et les vodouisants ou d'Obama sur la génération jeune de l'Amérique. Tout comme pour Aristide, les sondages « teledjol » donnent déjà Wyclef gagnant dans toutes les stations de radio au niveau local tandis qu'au niveau international, la candidature de Wyclef à la présidence haïtienne a produit le même effet d'ouverture sur le monde que le séisme du 12 janvier 2010.

La candidature de Wyclef vient de rappeler à la mémoire du monde l'Haïti d'après 12 janvier et a contribué à attiser la flamme des pays donateurs qui se faisait mourante face à l'urgence de la reconstruction d'Haïti. Mr Sainthelemy avec Nancy Roc a dit que Wyclef vient de donner à Haïti 200 millions de dollars de publicité mondiale gratuite en déclarant sa candidature sur CNN et autres grandes chaînes étrangères de télévision. C'est une prouesse dont n'est capable aucun leader haïtien. La candidature de Wyclef a fait aussi apparaître une donne nouvelle qui n'aurait pas été maîtrisée par le CEP de Gaillot Dorsainvil, à savoir la présence des grands media internationaux dans la cuisine de chaque mesure prise par le CEP, le forçant ainsi à apparaître moins indécent dans la gestion du processus électoral.

Il s'ensuit que Wyclef a une force locale et une force internationale qui sont deux atouts majeurs dont a besoin tout gouvernement futur haïtien pour mettre tout le monde au travail, pour récupérer l'administration publique haïtienne malade de tous les maux et pour réaligner la coopération internationale sur la nouvelle profession de foi de OBAMA et de SARCOZY en passant par les Clinton, les Chavez, les Castro et les Lula, qui veulent changer le paradigme de leurs approches à la problématique du développement haïtien après qu'ils ait reconnu leur part de responsabilité dans la dérive haïtienne. Wyclef semblerait être la nouvelle chance qui passe. On voudrait craindre son populisme qui pourrait continuer la dérive des lavalassiens tous poils confondus. Cependant l'évolution de Wyclef, l'environnement dans lequel il a évolué aux Etas Unis et le « millionnaire » qu'il serait devenu devraient donner une lecture toute autre de son populisme. Le populisme de Wyclef pourrait s'apparenter à celui de Clinton en Haïti, à celui d'Obama ou à celui de Dumarsais Estimé, dans la perspective qu'il s'appuierait sur le plan de la CIRH pour donner un autre visage à Haïti.

Le programme de la CIRH qui sera celui de n'importe gouvernement futur d'Haïti a besoin d'un homme Messie capable de légaliser par son leadership toutes les politiques futures que la CIRH aura commanditées. C'est ça la réalité politique future d'Haïti pour les cinq prochaines années avec la présence de Mr Clinton à la tête de la CIRH. Nos journalistes devraient faire attention aux pièges des politiciens qui les porteraient à questionner leur programme de gouvernement, quant au fond le programme de tout futur gouvernement d'Haïti est déjà indiqué et se retrouve dans celui de la CIRH. Cette réflexion est contraire à celle de la radio « Echo D'Haïti » qui dit et je quotte « L'internationale a grand besoin pour se rassurer, de voir que les Haïtiens sont partie prenante de la reconstruction mais pas de simples observateurs ». Ceci est archi faux. L'Internationale a besoin de populiste divin pour donner plus de transparence à la politique initiée par M. Préval en mettant au-devant de la scène des visages vierges et nouveaux très populaires qui conféreront de la légitimité á toutes les interventions de la CIRH en Haïti. Pour le moment, Wyclef apparaitrait comme le seul candidat nouveau, qui puisse offrir à l'Américain les moyens de sa politique en Haïti et à l'équipe de Préval une retraite assurée et dorée.

D'aucuns croient que la candidature de Wyclef pourrait avoir été un dernier coup politique de Préval. Si c'en était bien le cas, ce coup devrait être répertorié comme le plus joli des fleurons politiques ( denye koud tiwel devan simetye) conçus et infligés par le surprenant président à l'endroit de la classe politique haïtienne pour la détruire systémiquement. Il n'est que d'attendre le Carnet du CEP pour démentir cette analyse avec les conséquences infernales que l'on prévoit.


Agr. Michel William

jeudi 5 août 2010

Pour une vraie République avec de vrais citoyens

Pour une vraie République avec de vrais citoyens
Dimitri Norris
28 Juillet 2010

Je m’étais toujours promis d’éviter de disperser mon énergie et de me consacrer exclusivement à mes activités professionnelles. Mais ces derniers jours je réagis assez violemment aux différents propos que j’entends autour de moi et je me sens pratiquement obliger de faire la leçon à tout un chacun qui en ma présence déclare qu’il n’ira pas voter aux prochaines élections.
Tout d’abord j’aimerais dire qu’en écrivant cet article, je n’ai pas l’intention d’entrer dans aucune bataille politique et que mon ambition ici est purement pédagogique.
Ma rédaction va porter sur trois thématiques : Qu’est-ce qu’une République et qu’est-ce que cela implique?, Qu’est-ce qu’un parti politique et ses implications dans la marche de la Cité? Et enfin porter une réflexion sur l’attitude de l’Exécutif relatif à la bonne marche du processus électoral. Cela m’oblige à me poser la cuisante et brulante question suivante : Qu’adviendra-t-il de tout cela?

Haïti est une République depuis 1806, nonobstant l’épisode de l’Empire de Soulouque. Le Siècle des Lumières a donné naissance à trois révolutions qui ont bouleversé le monde à tout jamais : La Révolution Américaine qui a donné naissance en 1776 à la Fédération des Etats-Unis, première république des Temps Modernes si on fait abstraction des républiques de la péninsule italienne (République de Venise, etc…). La Révolution Française de 1789 a sonné le glas des monarchies absolues et a engendré la première République française. La Révolution de Saint Domingue qui a été la première révolution anti-esclavagiste et anticolonialiste des temps modernes et qui, fait rare, a triomphé et entrainé dans son sillage la naissance des républiques latino-américaines. J’ajouterais qu’elle a donné naissance à la République d’Haïti. Nous sommes donc d’accord que ses différents événements ont profondément remodelé l’Histoire du Monde.

Ces différentes révolutions ont porté sur les fonds baptismaux des nations qui ont connu des fortunes diverses. Moins de deux siècles après la création de l’Etat américain, celui-ci est devenu la première puissance industrielle du monde et pèse d’un poids incroyable sur les relations internationales. La République s’est finalement imposée en France après avoir connu dans un premier temps la Restauration de la Monarchie, puis le Second Empire. En Haïti dans un contexte fort différent de celui des deux premiers, il apparait évident aujourd’hui que cette société après deux siècles d’existence et deux siècles après avoir opté pour ce régime de gouvernement n’est pas encore arrivé à intérioriser les valeurs républicaines. Et c’est là toute la raison d’être de cet article.

Premièrement il est nécessaire pour moi d’expliquer à tout un chacun ce qui signifie le vocable République. La République fait référence à un Etat où tous les individus sont égaux en droit et en devoir devant la LOI. Une République digne de ce nom se doit de promouvoir l’égalité des chances entre les individus. Ce n’est pas un hasard si la devise des républicains est : « Liberté, Egalité, Fraternité. » Au cas où ceux qui liront cet article en doute, il leur suffit de regarder une pièce de monnaie produite sous le pilotage de la Banque de la République d’Haïti et vous remarquerez, j’en suis sûr, que sur une des faces il est écrit : « République d’Haïti » et sur l’autre face : « Liberté, Egalité, Fraternité ». Jusqu'à la venue de l’Euro, l’Etat Français produisait des pièces de monnaie reprenant la même devise ce qui montre la familiarité des deux Républiques, prenant leurs sources dans le même moule historique.

Une République est constituée d’un ensemble de citoyens qui à la manière d’un organisme animal ou végétal représente les cellules du corps social ou encore si vous préférez de la Nation. Dans une République, on ne peut pas être les sujets de sa Très Gracieuse Majesté Britannique. Les Citoyens ne sont pas des individus like this like that. Les Citoyens sont des individus qui ont pour obligation de se positionner par rapport à la chose publique, ce qui voudrait dire par rapport à la Politique (ce n’est pas un hasard si j’écris Politique avec grand P). Le mot République vient du latin : res, qui veut dire chose et publica, qui signifie publique. L’Haïtien a la mauvaise habitude d’étudier par cœur ce qui entraine qu’il ne réfléchit sur ce qu’il lit quand encore il lit. Le Citoyen pour participer à la marche de la Cité peut donc se positionner de deux manières : soit il se porte candidat pour une fonction élective, soit il remplit ses devoirs d’électeur. Il assume sa responsabilité de donner à la Politique telle ou telle direction. Ce n’est pas forcément en manifestant à longueur de journée, ou encore en érigeant des barricades, en mettant le feu au caoutchouc, en brisant des vitres de voiture qu’on se positionne comme citoyens. Pour mieux comprendre ce que représente dans l’Histoire Universelle cette conquête du droit du citoyen, il faut savoir que ce n’est pas tombé du Ciel. C’est un processus de luttes très actives qui ont commencé dès le 18ème siècle que chose bizarre, la République d’Haïti a pratiquement disposé dès sa création, tout au moins du point de vue théorique. Au cours du dix-neuvième siècle en France, on mourrait encore sous les barricades pour mettre en place ce régime politique et faire échec à la Monarchie. Pour vous en convaincre, je vous invite à lire ce roman écrit par un Dieu de la plume (Victor Hugo), les Misérables. Un incident d’une banalité extrême m’a permis un jour de comprendre ce que signifie le concept de République. J’étudiais à l’étranger plus exactement en France dans un établissement d’enseignement supérieur où une femme dans la soixantaine était responsable de la bibliothèque. Cette femme d’origine espagnole était probablement venue dans ce pays toute jeune à la fin des années 30 et était fille de républicains espagnols. Un jour alors que je sortais de l’école pour aller prendre un bus, une personne eut à déclarer qu’elle n’irait pas voter Dimanche et cette femme de lui répondre : « Vous n’avez pas le droit de faire ça. Il y a des pays dans lesquels les gens sont disposés à mourir pour avoir ce droit. » Je l’ai regardé et je me suis dit qu’en ce moment en Haïti des gens étaient disposés à mourir pour avoir ce droit. Qu’est-ce qui a changé? Il y a probablement un immense désenchantement par rapport à ce qu’on attendait du Changement que devait apporter la Démocratie.

Autre vocable important : La Démocratie. Que signifie la Démocratie? Le concept Démocratie, chose étonnante, est encore plus ancien que celui de République. Il vient du grec Démos qui signifie peuple et du grec Kratos qui signifie pouvoir. La Démocratie, c’est le pouvoir politique exercé par le peuple. La Démocratie, c’est un système politique dans lequel le peuple est appelé à exercer le pouvoir à travers ses représentants au Parlement, on parle alors de Démocratie représentative ou encore de Démocratie participative. Il est alors sollicité plus souvent et de manière plus directe. La Démocratie représentative est aujourd’hui la forme de gouvernement la plus répandue sur la Planète avec évidemment des variantes avec la présence ou non d’un Exécutif à deux têtes. La Démocratie participative est expérimentée en Suisse ou encore au niveau local dans certaines communes telles que Porto Alegre au Brésil sous le leadership du Parti des Travailleurs de Lula. J’ai eu l’opportunité de voir en Suisse que la population était appelée à se prononcer sur l’opportunité ou non d’émettre dans un canton tel ou tel type de contraventions. Il y a une chose extrêmement importante dès qu’on parle de Démocratie. La Démocratie s’exerce essentiellement à travers des partis politiques.

Qu’est-ce qu’un parti politique? C’est un regroupement de personnes qui partagent des points de vue similaires quant à la Direction qu’il faut donner à la Cité ou encore à la politique du Pays. Il y a deux choses qui caractérisent un Parti politique. La première, un Parti politique a une doctrine, un corps de pensée d’où il tire un Projet de Société. La deuxième, un Parti politique fait du recrutement. Il va chercher à avoir des adhérents et des sympathisants. Les adhérents vont cotiser pour permettre aux partis de trouver de l’argent pour participer aux campagnes lui permettant d’aller aux élections et de les gagner. Les sympathisants au moment des élections vont apporter leur voix aux partis en question de façon à ce que celui-ci puisse remporter les élections. De ces deux caractéristiques cardinales, nous pouvons en déduire deux autres. Un parti politique endoctrine son électorat et en particulier ses adhérents. Ensuite un parti politique met en place une organisation de manière à ce que quelle que soit les circonstances il puisse participer aux élections. Après avoir énoncé ce qui précède, il est indispensable pour moi de déclarer qu’il n’existe pas en Haïti jusqu'à présent de parti politique. Ce qui peut contribuer à expliquer en parti, l’échec de l’après 86.

Les partis politiques en Haïti n’ont pas à proprement parler une doctrine et encore moins un projet de société. En fait, vous me dites si je me trompe, qui peut me dire ce qu’un parti politique haïtien quel qu’il soit veut faire quand il arrivera au Pouvoir. Mais ce qui m’a le plus choqué, c’est que pour des raisons que je ne m’explique pas, ils ne font pas de recrutement. Tout récemment quelqu’un a eu à déclarer en ma présence qu’il est possible qu’il y ait en Haïti près d’une centaine de partis politiques. Je lui avais répondu pour en fait lui montrer l’absurdité de la situation que le problème n’est pas là. Sur une population de dix millions d’habitants, s’il y avait un million de personnes qui adhéraient aux partis politiques ; un parti politique pourrait avoir au moins dix mille adhérents. Je doute aujourd’hui qu’il y a en Haïti un seul parti qui ait autant d’adhérents. Je milite en Haïti comme professionnel depuis près de vingt ans, j’ai des amis qui sont membres ou chefs de partis politiques. Jamais pas une fois, un d’entre eux ne m’a dit de venir participer à une réunion du parti. C’est pas normal. En 2002, je me suis rendu au Forum Social Mondial à Porto Alegre. J’ai passé cinq jours au Brésil, j’ai été invité à participer à une rencontre du Parti des Travailleurs.

J’ai parlé d’endoctrinement. Parlons-en. Les partis politiques surtout les plus extrémistes recrutent en général très jeunes. On a reproché à l’actuel Pape d’avoir été membre des jeunesses hitlériennes. L’endoctrinement est tel qu’il adhère au même parti toute leur vie et ne remette jamais en question publiquement les prises de position du mouvement. L’histoire d’Aragon qui est restée toute sa vie membre du parti communiste français indépendamment du fait qu’éclatait au grand jour les exactions du régime stalinien est là pour l’attester. La force d’un parti, c’est la discipline de ses membres. Alors comment pouvez-vous m’expliquer qu’un leader politique haïtien puisse changer de regroupement au cours de la même semaine? Il n’y a pas chez nos hommes politiques, vous me dites si je me trompe, la capacité de dire en peu de mots ce qu’ils veulent que la Société soit comme a su si bien le faire un Barack Obama ou un Nelson Mandela. Pour faire dans un tout autre registre, Hitler. Je suis désolé, Hitler a su faire rêver le peuple allemand. J’ai lu le discours de Barack Obama après les déclarations de son pasteur, j’ai pleuré à chaudes larmes. Je sais de quoi il parle, j’ai vécu aux Etats-Unis. Quel est l’homme politique haïtien en ce moment qui est capable de présenter au peuple haïtien un Discours qu’il dit avec toute son âme et dans lequel celui retrouve son projet de société?

Il y a un homme politique qui a marqué le vingtième siècle et qui de mon point de vue est probablement la plus grande figure de notre époque et que les hommes politiques haïtiens gagneraient à prendre en exemple. J’ai nommé Nelson Mandela. Il y a à peine une semaine de cela, une de nos télévisions présentait un documentaire sur cet extraordinaire personnage. Le commentateur a eu a dire qu’il a tenu le même discours en sortant de prison que celui qu’il avait tenu vingt-huit ans plus tôt en y entrant. Ces propos pourraient se résumer à ceci : « Il ne veut ni de la domination des blancs, ni de la domination des noirs. Il veut qu’ils vivent ensemble. »

Aujourd’hui Nelson Mandela a 92 ans, il est sorti de prison à l’âge de 72 ans. Il est entré en prison à l’âge de 44 ans. Je suppose qu’il a ce discours depuis le début de sa vie publique. Cela montre à quel point il a su rester conséquent envers lui-même, envers ses idées et envers son peuple. C’est aussi en un mot le credo de l’ANC. Cela veut dire qu’il a porté ses convictions toute sa vie. En 2010, nous avons vu avec la Coupe du Monde de Football ce que la force de l’esprit humain animé de véritables convictions peut faire. Dans notre histoire nous avons dans les personnages de Toussaint Louverture et de Jean Jacques Dessalines, des personnages de la même trempe. Lamartine a eu à dire de Toussaint Louverture ce qu’aujourd’hui on peut dire de Nelson Mandela ou de Fidel Castro : « Cet homme fut une Nation ».

L’ANC est un parti politique, il a une doctrine, il a un corps de pensée, il a un projet de société ; il n’en démord pas. Cela lui a pris cinquante ans pour le concrétiser. Voila ce qui s’appelle avoir de la conviction. Il a recruté et ses membres ont fait avec lui tout le chemin nécessaire jusqu'à la victoire finale et Dieu seul sait ce que cela a couté d’efforts et de sacrifices. Aujourd’hui à la télévision, j’ai vu une femme politique qui dans un premier temps était au MIDH, puis dans la Famille Lavalas et maintenant dans Respe. C’est quoi cette blague! Vous imaginez Jeff Bush traversant chez les Démocrates ou encore un Kennedy chez les Républicains. Soyons sérieux. Les hommes politiques haïtiens changent de camp plus vite que des girouettes au vent. Comment voulez-vous que les électeurs les prennent au sérieux? Comment voulez-vous qu’on soit motivé par ces gens la?

Bon maintenant passons aux choses sérieuses. La troisième thématique sur laquelle je m’étais promis de me pencher, c’est d’aborder la question relative à l’attitude de l’Exécutif par rapport au processus électoral. La première chose qu’il me semble important de signaler, c’est qu’aujourd’hui on parle d’élections pour transférer le pouvoir en Haïti et non pas de coup d’Etat. C’est un progrès. Il n’y a pas si longtemps, cela n’aurait pas paru saugrenu de voir une personne apparaitre sur le timon des affaires en Haïti à travers ce biais. Et lorsque je parle de coup d’Etat, je parle de coup d’Etat militaire ou à partir d’une force armée. Aujourd’hui l’ensemble des acteurs politiques semble être d’accord pour parler d’élections pour prendre le pouvoir politique. Ce qui n’est pas encore clair c’est si les groupes politiques veulent atteindre leur objectif en procédant à un coup d’Etat électoral ou en acceptant le verdict des élections à travers un processus électoral crédible. C’est le débat de l’heure.

La Constitution haïtienne de 1987 qui est supposée être en application montre clairement comment on doit mettre en place le Conseil Electoral Permanent. Les différents pouvoirs qui se sont succédé depuis 1986 n’ont jamais réalisé les élections indirectes qui auraient permis de mettre en place le Conseil Electoral Permanent et nous éviter toutes les crises que nous avons connues. A l’avènement du second mandat de l’actuel tenant du Pouvoir Exécutif, nous avions une excellente opportunité de mettre en place ces institutions qui auraient permis à la base de la population haïtienne de participer (le choix de ce mot n’est pas innocent) à la gestion de la chose publique. Les élections indirectes auraient permis la constitution des assemblées locales, des assemblées départementales, du Conseil Interdépartemental et finalement du Conseil Electoral Permanent. La mise en place de ces institutions auraient permis à la société haïtienne de participer plus étroitement à la construction d’une nouvelle société, de s’impliquer davantage dans le développement de leurs communautés. Aujourd’hui le gros de la population haïtienne se sent étranger dans son propre pays et le rêve haïtien, c’est l’obtention du visa américain dans le meilleur des cas, dominicain dans le pire des cas. Et encore ils risquent parfois de s’enfuir sans même avoir ces documents. La majeure partie des citoyens haïtiens perçoit ce pays comme un espace captif dont il faut s’enfuir à tout prix. Comment construire un pays avec de tels individus et le pire, c’est que le pouvoir en place fait tout pour que cela perdure? Haïti, c’est une République en mal de citoyens. L’Haïtien, c’est un citoyen en mal de République.

La Constitution Haïtienne de 1987 si elle avait été appliquée aurait permis l’avènement d’un pouvoir articulé qui aurait incité un nombre important d’acteurs à jouer le rôle qui est le leur dans la conduite de la Cité. Plus un pouvoir est articulé, plus il permet à la société de trouver des réponses à ces problèmes qui tiennent compte de l’intérêt et des aspirations de la majorité de ses citoyens. Ce n’est pas un hasard si les sociétés qui ont adopté cette forme de gouvernance sont aujourd’hui les sociétés les plus avancées. Après cinq ans de pouvoir, que constatons-nous? Au lieu qu’on aille vers une plus grande articulation du Pouvoir, une plus décentralisation de celui-ci qui aurait permis à un plus grand nombre de citoyens de s’y retrouver ; on a été vers une plus grande centralisation et on peut le dire vers une plus grande personnalisation. Le pouvoir politique est concentré entre les mains du Président de la République et du gouvernement. Ce sont là les causes profondes de l’actuelle crise que l’on rencontre. Les propos tenus par l’actuel Maire de Port-au-Prince relatifs à la crainte de la constitution d’une République des maires révèlent bien ce schéma de pensée.

Les actuels tenants du Pouvoir Exécutif sont mille fois plus réactionnaires que les Duvalier père et fils. En disant cela, je ne retire rien à la barbarie duvaliériste. Mais François Duvalier survient à un moment où sur l’échiquier international, il était difficile d’avoir autre chose qu’un Duvalier en Haïti. L’Amérique sortait à peine du maccartisme. Nous étions à l’époque où les américains voyaient un communiste dans chaque arbre. Nous étions à l’époque de la guerre froide. Duvalier était pour eux celui qui pouvait faire le sale boulot. L’Amérique latine était truffée de dictatures, en veux-tu en voila. Somoza au Nicaragua, Balaguer en République Dominicaine, François Duvalier était dans l’air du temps dans les années 60. Jean Claude Duvalier était déjà anachronique dans les années 80 mais ce que l’on assiste aujourd’hui en 2010 dépasse les sommets de tout ce que l’on peut imaginer. La couleur dominante de l’Amérique Latine aujourd’hui est le rose, allant du rose clair avec Lula, Kichner au rose foncé avec Morales, Correa et Chavez avec de surcroit Barack Obama comme président des Etats-Unis. Aujourd’hui le ton est à la Démocratie et à la participation démocratique. S’opposer à la mise en place des institutions de la Constitution de 1987 est d’une absurdité infinie mais c’est pourtant ce que fait le pouvoir en place. Ils ne travaillent que pour le maintien du statuquo avec ce que cela coute au peuple haïtien chaque jour de souffrances. Ils sont profondément anti-démocratiques.

Il semblerait que les actuels tenants du Pouvoir Exécutif pensent qu’ils vont ainsi arriver à se pérenniser au Pouvoir et à se protéger des conséquences que leurs actions peuvent avoir demain. C’est un point de vue mais ce n’est pas le mien. Tout d’abord je pense que des institutions fortes protègent les citoyens et que lorsqu’on n’est pas au pouvoir, on redevient simple citoyen. La meilleure protection que l’on pourrait s’offrir aurait été de mettre en place des institutions fortes durant son passage au Pouvoir. Apparemment toutefois ce n’est pas l’option qu’on aurait choisi d’adopter. Je ne dirais qu’une seule chose : Il faut faire très attention de ne pas être la première victime du monstre qu’on va engendrer.

Alors quelles sont les perspectives? Un ami tout récemment disait qu’il ne pouvait imaginer que nous puissions descendre plus bas et que d’après lui, nous avions atteint le fond de l’abime. Je suis désolé pour lui, nous pouvons descendre encore plus bas et nous allons probablement le faire. Montesquieu dans l’Esprit des Lois avait expliqué que tout système de gouvernement est basé sur un principe qui le sous-tend, qui l’anime. Celui de la République, c’est l’implication du Citoyen à la chose publique. Or aujourd’hui le citoyen haïtien n’existe pas. C’est un individu éthéré dont l’imaginaire est ailleurs. Il n’y a aujourd’hui aucune structure capable de l’encadrer pour qu’il puisse imaginer une autre Haïti. Il ne rêve que de partir et l’essentiel de son énergie quand ce n’est pas pour sa survie immédiate est utilisé pour atteindre cet objectif et peut-on réellement lui en tenir grief puisque ceux qui sont chargés de l’aider ne lui propose aucune autre alternative. Plus encore que la corruption, le désespoir est probablement ce qui est le plus enraciné dans la société haïtienne et le plus endémique.

Et pourtant il n’y a là rien d’irréversible, la société haïtienne possède encore un dynamisme à nul autre pareil qui ne demande qu’à exploser. Alors que faire? Le 28 Novembre, il faut aller voter, il faut aller voter en masse. Nous savons tous qu’on nous prépare une élection bidon à nul autre pareil. On sait ça. On sait que tout est mis en place pour que les intérêts d’un petit nombre aient la prééminence sur ceux du plus grand nombre. On sait ça. On sait qu’on va nous voler notre vote mais on ne peut pas nous voler notre âme. Parce qu’en n’allant pas voter le 28 Novembre, voici le message que nous délivrons : « Nous ne voulons pas de la République. » Or ce n’est pas de la République que nous ne voulons pas, c’est d’eux. Voter pour le candidat de votre choix. Si vous n’en avez pas ce que je peux parfaitement comprendre, voter blanc. Ce qui revient à déposer votre bulletin de vote dans l’urne sans pourtant ne cocher aucune case. Il faut aller voter massivement pour leur dire que nous voulons toujours d’une République qui croit en l’égalité des chances de tous ces citoyens même si nous ne l’avons jamais eu, que nous croyons que nous méritons la Démocratie que l’on nous a jamais donné, qu’être haïtien c’est toujours une identité qui veut dire qu’on est un homme debout, un homme vertical, que si les Duvalier ne nous ont pas fait perdre notre âme, c’est pas eux qui réussiront. Voila c’est tout ce que j’avais à dire. Je crois que je me suis trompé, j’ai fait de la politique. J’ai posé un acte citoyen.



Dimitri Norris, citoyen haïtien

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