jeudi 29 avril 2010

Agriculture et reconstruction nationale

Agriculture et reconstruction nationale
Jean André Victor
Le 28 avril 2010


On ne peut créer des emplois durables dans une agriculture non durable. L' agriculture haïtienne a besoin d' un nouveau souffle pour survire avant de devenir durable. L'une des conditions essentielles pour sauver cette agriculture est de changer le mode de gouvernance du secteur agricole en dépolitisant le Ministère concerné. C' est de cela qu'il s'agit dans cet entrefilet Mais, aussi paradoxal que cela puisse paraître, pour dépolitiser le MARNDR, il faut le politiser encore davantage.


Haïti: La gouvernance politique de l'agriculture est une affaire nationale qui intéresse tous les citoyens y compris le commun des mortels. Ce n' est pas une affaire technique, au sens strict, l'agriculture étant une activité bio-économique ( un buisiness ) et l'agronomie étant la science qui permet d' augmenter le volume et la qualité de la production. Donc, il n'est pas question d'agronomie dans ce texte mais plutôt de politique publique, laquelle concerne tous les citoyens de manière générale. Tout le monde peut et doit comprendre les politiques publiques de manière à pouvoir influencer la gouvernance globale du pays. Sinon, adieu à la reconstruction nationale et bonjour à l'effondrement national. A noter que les signes avant-coureurs de ce dernier sont déjà présents à travers la déforestation extrème, l' urbanisation sauvage, le déplacement massif de population, la pauvreté de masse et le chômage endémique et chronique.

La deforestation entraine, entre autres, l'érosion et la baisse de fertilité des sols dont la capacité de charge démographique se réduit progressivement. Ce qui provoque, entre autres, le déplacement des populations vers les villes avec toutes les conséquences que l' on connait. Etant donné que la population continue d'augmenter alors que la croissance économique est au point mort, la République fabrique la pauvreté avec son cortège de paysans sans terre, de réfugiés sans logis, de jeunes sans travail et de citoyens sans identité. Pour éviter la pauvreté durable, il est utile de comprendre ce qui nous arrive afin d'orienter les prises de décision dans le bon sens. Bornons-nous, pour le moment, à considérer un premier problème de fond qui est la gouvernance du secteur agricole.

Des confusions regrettables et persistantes

Une erreur regrettable qui subsiste jusqu' à aujourd'hui, est le fait de confondre le secteur agricole et le Ministère de l' Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement Rural ( MARNDR ). Evidemment, tout ce qui est agriculture relève du MARNDR mais l' inverse n' est pas vrai. Le développement rural, à lui seul, reste et demeure une affaire plurisectorielle qui dépasse les capacités d'un ministère, si grand soit-il. Il en est de même des ressources naturelles. Ces deux exemples tirés de l'appellation même de ce ministère traduisent, même imparfaitement, la réalité complexe qui est la sienne. Dit autrement, quand on parle d' agriculture, on parle, certes, du MARNDR mais quand on parle du MARNDR, on parle du développement national, tout au moins en partie. De même, quand un ministre ferme l' institution pour restructuration, à supposer qu'il réussisse à le faire, cela n'a aucune relation directe avec la producion agricole puisque l' entreprise agricole est une affaire privée, tout au moins à l'heure actuelle. Les questions qui se posent sont alors les suivantes : quelle est la meilleure structure au sein du ministère qui pourrait fournir les meilleurs services aux agriculteurs et quels services pourraient mieux aider les fermiers à augmenter leur production et leurs revenus et parmi les services offerts, lesquels sont immédiatement accessibles aux cultivateurs ? Le reste, c'est tout ce que vous voulez ( développement rural, aide alimentaire, solidarité sociale, clientélisme politique ) sauf l'encadrement agricole.

Les routes rurales, si utiles soient-elles, n'ont pas non plus de relation directe avec la production agricole. Ce sont plutôt des accélérateurs du développement agricole ou du développement rural. La route ne peut pas, par elle seule, améliorer la production ou faire récupérer le tiers des pertes post-récolte que l'on déplore actuellement. C' est à peu près la même chose pour l'organisation paysanne, la conscience politique des groupes de base, les tracteurs ou même l'irrigation. Celle-ci peut même ruiner, à terme, l'agriculteur si le drainage est absent. Est-ce à dire qu'il ne faut pas faire la route ou l'irrigation? Non. Cela veut dire qu'il y a autre chose à faire pendant qu'on aménage la route ou un système d'irrigation si on veut augmenter vraiment la production agricole et sa qualité.

Une appréhension fragmentaire du secteur primaire

Le secteur primaire regroupe l' agriculture, certes, mais aussi les mines et carrières, la pêche et la sylviculture ( quand l'agriculture est prise dans un sens restreint englobant seulement la production végétale et la production animale ). Avant la création de l' Institut National des Ressources Energétques et Minières, du Ministère des Mines et des Ressources Energétiques d' autrefois et du Bureau des Mines et de l' Energie ( BME ) d'aujourd'hui, c'est le MARNDR qui abattait la besogne dans le secteur des mines et de la bio-énergie. Evidemment, la section des mines périclitait, lors, au sein du MARNDR tout comme la pêche et la sylviculture sont totalement paralysées depuis des décennies au sein de ce ministère. Ces deux derniers sous-secteurs se meurent lentement, le premier freinant institutionnellement le développement de la pêche et le second ayant déjà laissé périr ou presque toutes les forêts de la République.

Vous m'objecterez alors que le BME est en agonie au sein des TPTC ( Travaux Publics, Transports et Communications ) auquel il est actuellement rattaché. Je vous le concède. Cela démontre que les TPTC, comme le MARNDR, ont besoin de réforme institutionnelle. Mais, pour le moment, on s' occupe exclusivement du MARNDR. Un seul patient à la fois. Depuis 1987, je mène une bataille contre le trop plein institutionnel du MARNDR avec un document d' une centaine de pages ayant pour titre << La réforme institutionnelle du secteur agricole >>. C'était, lors, ma contribution bénévole aux idées de changement qui avaient cours à l'époque. Ce document est très consulté mais on n'a pas osé toucher aux problèmes de fond qu' il soulève. J' ai lutté aussi, dans le même élan, pour la réforme agraire. On a eu l' INARA ( Institut National de la Réforme Agraire ) et l'assassinat de Jean Dominique mais, on n' a pas eu la réforme agraire.

Les fondamentaux du développement agricole et du développement rural

Comme il n' y avait personne pour s'occuper du développement rural, la tâche incombait tout naturellement au MARNDR. C'est ainsi que ce dernier s' occupait de l'enseignement à plusieurs niveaux, du régime foncier, du cadastre, de l'artisanat rural, des coopératives, des voies de desserte,ou encore de l'organisation paysanne mais surtout du développement rural intégré. Vous me direz qui trop embrasse mal étreint. Je vous répondrai que ce n'est pas aussi simple. Prenons l'exemple de l'enseignement agricole. A un moment donné, le MARNDR s'occupait de l' alphabétisation des adultes ( avant la création de l'ONEC et de l' ONAAC ), des écoles rurales, des écoles vocationnelles, des écoles moyennes d' agriculture et de l' Ecole Supérieure d' Agriculture. A l' époque où les écoles rurales devaient passer sous la tutelle du Ministère de l' Education Nationale, on argumentait, non sans raison, qu'il n'était pas normal d'avoir dans un même pays une école à double vitesse, c'est-à-dire une école rurale et une école urbaine.

Vous m'objecterez à nouveau qu'aujourd'hui, l'école haïtienne est passée, malgré tout, de la double vitesse à une transmission automatique de plusieurs vitesses. Je vous le concède volontiers mais là encore, restons au MARNDR. Un seul patient à la fois. Le MARNDR a perdu officiellement l'enseignement primaire ( les écoles rurales ) mais a laissé tomber, de lui-même, les écoles vocationneles et les écoles moyennes après un lourd investissement consenti par la République. A-t-il bien fait? Non. Il assure encore la tutelle de l'INARA qui n'a pas pu trouver des solutions appropriées au problème foncier et à celui de la taille des exploitations agricoles. Continuer >





Le cadastre s'est détaché du MARNDR et est maintenant sous la tutelle des TPTC mais il n' est pas mieux logé pour autant, institutionnellement parlant. Autrement dit, les trois facteurs essentiels à l'agriculture ( la terre, la ferme et l'agriculteur ) sont désormais en chute libre. L' absence de cadastre induit l'insécurité foncière. Le refus de fixer les limites minima et maxima de l'exploitation agricole fait pulluler les unités de production non rentables. L' agriculteur n'a toujours pas de statut et encore moins, de protection juridique appropriée. L'un des rares experts internationaux à mettre le doigt sur la plaie eut à dire gentillement à peu près ceci : vous m'avez fait venir dans votre beau pays pour vous conseiller sur les meilleures formules d'engrais à utiliser pour augmenter votre production de café, je suis désolé, je ne peux le faire. Commencez par avoir de vraies plantations de café d'une certaine taille en lieu et place de petits jardins insignifiants que vous avez maintenant et vous m'appellerez ensuite. Les engrais ne peuvent pas remplacer la ferme de production. Si vous achetez des engrais maintenant, c'est jeter l' argent par la fenêtre. Monsieur Friedmann- ainsi qu'il s'appelait - n'a pas été écouté. On a acheté les engrais mais on a moins de café aujourd'hui.

Un pragmatisme déroutant et inquiétant

Savez-vous pourquoi le MARNDR était appelé autrefois le sanctuaire de la culture? C'est parce qu'il s'y trouvait une large érudition fondée sur des équipes pluri et multidisciplinaires. En effet, il y avait le parterre des sciences de base ( Botanique, Zoologie, Chimie, Genétique ), le coin des sciences appliquées ( l'Entomologie, les Sols, la Climatologie, le Génie Rural, l'Audio-Visuel au sein de l'Animation Rurale ), l'éventail de la production végétale ( Café-cacao, Fibres et Oléagineux, Plantes Aromatiques, Cultures Vivrières ) et la brochette de la production animale ( Bovin, caprins, porcins, aviculture, apiculture, etc.). A titre d'exemple, j'étais Agronome Senior, à l'époque, en poste aux Gonaïves, quand des paysans, motivés par l'appel que j'avais lancé, m' ont emmené, à l'occasion de la fête de l'Agriculture et du Travail, un animal que je n'ai pas pu identifier. Je me suis référé au MARNDR et c'était vite fait. De même, quoique trvaillant sur le terrain, Damien me consultait pour des questions relatives aux cultures et sols tropicaux. Un jour comme aujourd'hui, diraient nos paysans, les spécialistes du MARNDR ( les Friedmann locaux ) ont fait valoir qu'il faut placer l'usine de compost au coeur de la zone de production parce que le transport du compost sur de longues distances est prohibitif, étant donné qu'il faut environ 20 sacs de compost pour avoir l'équivalent en éléments nutritifs d'un sac d'engrais. Ils n'ont pas été écoutés.

Par la suite, même livré gratuitement à Petite Place Cazeau, où était établie l' UNACOM ( Usine Nationale de Compost ), cette dernière n'a jamais pu écouler sa production. Demandez-moi alors pourquoi tous ces savants n'ont pas pu ou n'ont pas su développer l'agriculture. Ils ne sont pas aussi nombreux qu'on le pense. C'est une première réponse. On ne les écoute pas toujours, c'est une seconde réponse. Mais, la vérité dans tout cela, c'est que le déveleoppement agricole ( tout comme le développement rural ) n'est pas seulement une affaire technique. C' est une question hautement politique et aussi économique. Au lieu de faire un diagnostic aussi simple, des manipulateurs de tout poil ont argumenté plutôt que ce sont les cadres de haut niveau ( Nèg ak gwo diplòm yo ) qui ont fait le malheur de l'agriculture haïtienne. La mise en application de cette politique obscurantiste a fait perdre au pays la plupart de ses meilleurs cadres. Donc, plus de sciences de base, et peu ou pas de spécialistes en zootechnie ou en phytotechnie. Et le sanctuaire de la culture est devenu le tombeau de la science. J'exagère, vous dites. Voyons un peu.

Un coup de grâce auto-destructeur

On a vu plus haut que tout ce qui était essentiel pour l' agriculture ( la terre, la ferme et l'agriculteur ) laissait beaucoup à désirer. Voyons maintenant ce qui est indispensable pour faire augmenter la production agricole. Ce sont l'enseignement, la recherche, la vulgarisation et le crédit. L' enseignement agricole au niveau fondamental et moyen est pratiquement marginalisé comme déjà sus-mentionné. Vous m'objecterez, sans doute, que qu'est-ce qu'il en est alors de l'enseignement supérieur puisque si l'on a fermé les écoles rurales, vocationelles et moyennes, par contre, on a créé, aujourd'hui, une dizaine de facultés d'agronomie publiques et privées contre une seule autrefois, n'est-ce pas là un progrès? C'est un bon point, mais la question fondamentale est à qui profite l'accroissement du nombre de cadres de niveau supérieur. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce ne sont pas les paysans haïtiens qui en profitent.

On forme des cadres pour l'extérieur, ne pouvant pas les absorber sur place. On ne peut pas les absorber parce qu'on ne crée pas de richesses. Et on ne crée pas de richesses, tout au moins dans ce secteur, parce que le MARNDR a abandonné ou laissé mourir les sciences de base et les sciences appliquées, la recherche, la vulgarisation et le crédit agricoles. Or, il revient à la recherche de produire la connaissance nécessaire, à la vulgarisation de faire le transfert technique au paysan de la connaissance ainsi produite et au crédit de fournir les fonds pour appliquer la technique ainsi apprise. Les trois mousquetaires ( recherche, vulgarisation, crédit ) forment un tout indivisible tout comme le paquet technologique ( semences améliorées, engrais, pesticides, eau et bonnes pratiques agricoles ). Si le système d'encadrement agricole n'offre pas de services dans ces trois domaines, il n'y a donc aucune chance de faire augmenter la production agricole, à supposer que la base de l'agriculture existe. Actuellement, la recherche agricole est absente, la vulgarisation est abandonnée et se fait par intermittences et le crédit agricole est en voie de disparition. On peut, autant qu'on le veut, distribuer engrais, tracteurs et outils agricoles, cela ne peut pas et ne pourra pas faire augmenter la production agricole de manière durable. Or, le MARNDR, tel qu'il existe actuellement, et c'est le résultat de cinquante années ( 50 ) de dérive institutionnelle, ne peut pas faire fonctionner les trois mousquetaires ( recherche, vulgarisation, crédit ) - comme dans le roman de Dumas, ils sont en réalité quatre, car il faut ajouter l'enseignement agricole -. C'est pourquoi, il faut une décision politique.

Mieux vaut tard que jamais

Cela fait une cinquantaine d'années depuis que, génération après génération, des agronomes lucides y compris les Friedman locaux, attendent cette décision politique qui ne vient jamais mais qui est toujours en cours de route et à un stade plus ou moins avancé, selon les politiciens du moment. Il s'agit de mettre en place un ministère qui s'occupe essentiellement de l'agriculture, donc de la politique agricole, c'est-à-dire qui s'occuperait de planifier ( statistiques agricoles - estimation de la production- équilibre agro-sylvo-pastoral -etc ).de consolider la base de la production agricole ( foncier, exploitation agricole, agriculteur ), de fixer et faire appliquer des normes et procédures pour la promotion de la qualité et l'organisations rationelle de la production, du stockage, de l'emballage, des débouchés et de la commercialisation, d'encourager l'établissement et le développement des industries en amont et en aval de la production agricole, de faire sauter les freins qui bloquent le développement agricole ( poids et mesures, transport, droits de propriété intellectuelle, tabous, etc. ) et de faciliter la mise en place des accélérateurs du développement agricole ( législation, infrastructures, stimulants, mouvement associatif, etc. ). Ni plus ni moins. Un tel ministère est franchement politique, dans le bon sens du terme et n'a pas besoin d'être dirigé exclusivement par des agronomes ou des médecins vétérinaires. Il pourra être logé en ville, comme les autres avec une centaine d'employés ou moins, incluant non seulement des agronomes, mais aussi des économistes, des gestionnaires, des juristes, des socioloques, des anthropologues, pour ne citer que ceux-la.

Qui absorbera alors les autres fonctions préalablement occupées par le MARNDR? D'abord, il faut créer un Institut National de la Recherche Agronomique avec son siège localisé en milieu rural et controlant toutes les stations expérimentales, actuellement abandonnées et responsable aussi de la vulgarisation agricole en tout ou en partie. Les agronomes pourront alors s'occuper de fonctions techniques. Ils seront beaucoup plus valorisés et auront moins de motivation pour s'expatrier. Une véritable banque de crédit agricole sera mise en place selon les règles de l'art, en collaboration avec le ministère de l'agriculture. Un Institut des Ressources Océaniques viendra absorber, entre autres, l'ancien Service des Pêches du MARNDR avec un système d'encadrement réel pour les pêcheurs, les aquaculteurs et les mariculteurs. L'île de la Gonave pourrait héberger ce nouvel institut. Restons-en là pour le moment. Mieux vaut tard que jamais.


Jean André Victor

mardi 27 avril 2010

Avortement d’un projet de conspiration du MARNDR contre la souveraineté alimentaire

Avortement d’un projet de conspiration du MARNDR contre la souveraineté alimentaire

Mardi, 27 Avril 2010 01:45 | Écrit par Michel William

Le Ministère de l’Agriculture des Ressources Naturelles et du Développement Rural serait il en train d’ourdir un complot contre la nation haïtienne en terme de politique agricole devant assurer une certaine souveraineté alimentaire du pays pour les dix huit mois á venir. ? Si le cas du MARNDR n’apparaît pas aussi suspect comme celui du CMEP dans la liquidation des entreprises publiques nationales ,le manque de vision et d’innovation qui transpire derrière les stratégies et axes d’intervention économique et agricole de la proposition de politique agricole présentée au ranch de la Croix des Bouquets, les 22- 23 avril 2010, laisse dans l’esprit des analystes très peu d’éclaircie sur l’intention non déclarée d’une conspiration agricole nationale contre la population haïtienne. C’est du reste l’esprit de deux scoops qu’a inspiré successivement la séance de validation de deux jours de présentation de la politique agricole étudiée pour les prochains dix huit mois suivie de stratégie á moyen terme et á long terme. Le premier scoop était « une conspiration inédite du MARNDR contre l’agriculture haïtienne, reformulée après les réactions á chaud des élites urbaines et rurales du pays sous le titre «« Avortement d’un projet de conspiration du MARNDR contre la souveraineté alimentaire de la population.

C’est une tentative avortée, parce que c’est le MARNDR encore lui-même dans ce qui lui reste d’inné et d’intouchable a créé involontairement les conditions de son avortement. Qu’est ce qui motiverait l’idée d’un complot contre la population haïtienne dans ce dernier essai de politique agricole?

Le premier problème est un problème de tradition.

Le ministère de l’agriculture depuis 1986 a gratifié le pays d’ un ensemble de propositions de politique agricole toujours restées au stade de documents de consultation pour des raisons d’incohérence gouvernementale .

La raison cardinale est que ,faute par aucun des gouvernements haïtiens d’endosser ces politiques ,a amené chaque ministre de l’agriculture , de Damas Sidneus á Joanas Gué, en passant par François Severin, cinq fois ministres, á vouloir proposer au secteur, chacun, sa propre aventure de politique agricole. La pire était celle de Philippe Mathieu.

La deuxième raison est que tous ces projets de politique se ressemblent et que leurs contenus sont plutôt dictés par les grands bailleurs de fonds traditionnels d’Haïti qui ont toujours orienté les plans programmes et projets selon des stratégies de faux semblants qui discutent de la production pour arriver á la non production. A la base de leur politique sauvage d’orientation, c’est la théorie du libre échangisme que des instruments comme ceux élaborés par le FMI, La BM, l’UE (l’accord de Partenariat économique transfuge des accords de Lome), l’OMC et l’USAID qui ont toujours constitué des obstacles majeurs au développement de rapports économiques d’égal á égal entre les pays bénéficiaires et les pays donateurs ou préteurs.

Une troisième raison est la politique entretenue par les pays prêteurs de coups d’Etat devenus des exutoires classiques pour fermer ou bloquer á volonté le flux de décaissements des prêts ou des dons , á l’insu des bénéficiaires directs qui ne sont responsables de rien. Embargo septembre 1990

Une quatrième raison et la plus récente est la décision prise par certains bailleurs dont le FIDA de désaffecter au mépris de leurs propres clauses de financement des excédents de budgets ou même de partie des fonds de projets en exécution á la suite de non respect de certains engagements financiers par le gouvernement haïtien (PAIP,PICV2, PPI 1, PPI II). Le cumul de ces non décaissements a donné lieu á la formation d’excédents budgétaires que le FIDA réalloue á son frère Siamois, la FAO, en Haïti, pour les projets d’urgence créés par la fréquence des catastrophes naturelles et écologiques de 2004 á nos jours : Gonaïves , Fonds Verettes, Cabaret, séisme du 12 janvier 2010. Ne parlons pas du détournement des fonds du Fond Mondial pour l’Environnement par la FAO (voir Rapport Ronald Toussaint sur fond d’opposition entre lui et le géologue Calais).

Une cinquième raison et c’est la plus importante : tous les ministres de l’agriculture ont pratiqué une politique de dévalorisation des cadres nationaux de l’administration du MARNDR pour s’attacher les services de consultants haïtiens et étrangers recrutés d’un certain secteur privé agricole , des ONG et de l’assistance technique des organismes internationaux comme la FAO et l’IICA devenus des chasseurs de petits projets. (Groupe GTA spécial sur l’agriculture). Cette politique de dévalorisation des hauts cadres du MARNDR a semé une frustration généralisée chez ces derniers qui sont requis d’endosser des documents officiels qui ne cadrent pas avec leur croyance, leur conviction, leurs connaissances et leur professionnalisme.

A titre d’exemple, le directeur du service semencier a présenté une politique qui détruit sa riche expertise de plus de vingt cinq ans de terrain. Il a repris ipso facto toutes les stratégies désuètes qui ont consacré l’échec de la politique semencière du MARNDR durant les vingt dernières années. Dans la lutte contre les ravageurs, Mr Prophète a énuméré les fléaux pour lesquels l’assistance internationale a eu á débourser « des miettes » ces dix dernières années pour paraphraser l’ancien Premier ministre Jacques Edouard Alexis dans une de ses prises de position de premier mandat. Mr Prophète á mentionné , le scolyte du café, la mouche du fruit, la cochenille rose, oubliant contre sa conviction , l’action des vertébrés nuisibles dont le rat á lui seul est responsable de 45% des pertes dans les filières riz, mais, millet, fruits (Rapport ODVA MARNDR 1982). La vérité est que la contribution de Prophète á la constitution de ce document ne vaut que 2 a 3 %. Les 97 % proviennent du champs de pensée restreint des brasseurs d’affaires cités plus hauts qui ont circonscrit les prévisions aux champs d’action dont ils ont été les principaux bénéficiaires. Prophète semblerait être irrécupérable sans l’intervention d’un ministre héros post désastre dans la filière semencière.

Dans le crédit, il était vraiment misérable d’entendre de la bouche du gestionnaire émérite, agronome Lubin, des explications qui traduisent le peu de vision dont sont capables les grands techniciens lorsque, la misère oblige, ils acceptent de renier leurs compétences pour plaire aux magnats de la politique traditionnelle haïtienne. Il n’est pas demandé á Mr Lubin d’ignorer le passé glorieux du crédit agricole BCA dont l’observance des prescrits a fait le bonheur de tous les organismes de microcrédit qui opèrent actuellement sur le terrain. Il est demandé á Mr Lubin d’avoir une autre vision du crédit agricole, d’ignorer la politisation du crédit savamment orchestrée par notre feu Jean Claude Amédée et qui a valu au BCA son état de coma permanent . Il lui est demandé de convaincre le ministre Gué de revenir sur la proposition d’un crédit rural et de porter son enveloppe á 5 milliards de dollars au lieu de 30 millions de dollars prévus dans le plan d’investissement agricole. Mr Lubin doit se souvenir que moins de 5% des besoins en crédit de la population ( huit cent millions de gourdes ) sont couverts par des organismes de microcrédit que l’état haïtien n’a pas fermés encore pour des raisons politiciennes. Il lui est demandé de comprendre l’opportunité offerte par le séisme á la fois meurtrier (230.000 morts) et salvateur, quand Mr Clinton regrette ses erreurs dans la débâcle haïtienne et promet de faire de chaque coin reculé d’Haïti un quartier de Manhattan. Il nous faut divorcer d’avec la politique d’intervention du gouvernement haïtien dans le crédit BCA pour éviter dans le passé le renvoi de l’auguste Auguste Rodini Compte, par un vil ministre de l’agriculture haïtienne ou la mise á sac des fonds du crédit par des organisations populaires sur recommandation ministérielle..

On peut également citer en référence la piètre proposition de politique des bassins versants présentée par mon maitre á penser dans ce domaine , mr Oge Pierre Louis ,au ranch de la croix des bouquets. Personne en Haïti, ne peut douter du sérieux et de la compétence de Ogé Pierre louis , en matière d’aménagement de bassins versants. Cependant á travers l’exécution de la majorité des projets en cours, sa contribution a été presque insignifiante, vu que les points de vue politique des bailleurs ont toujours eu la préséance sur ceux des cadres du MARNDR. Le problème du reboisement , tout le monde le sait, est lié á la négative tenure foncière, á l’inorganisation du pouvoir judiciaire, á l’absence de plan d’aménagement du territoire , á la politique de centralisation du gouvernement de P-au-P et á l’inexistence de la politique de crédit en terme d’investissement á court et á moyen terme, bref á l’inexistence de tout un réseau de mesures d’accompagnement et de dispositions légales devant sauver le patrimoine terre. Ogé Pierre Louis les connaît. Peut être qu’il les avait proposées ! Ses propositions, á n’en pas douter, auraient été balayées une nouvelle fois encore, d’un revers de main par les bailleurs de fonds, et leurs jokers qui ont la vie dure en politique.

On peut citer aussi la proposition de la politique de l’élevage. Le pauvre Maurice Dejean a du mordre ses freins pour proposer des « animaleries » qui ne répondent pas ni á ses attentes personnelles ni aux attentes du pays après le 12 janvier. Il a proposé 30 millions de dollars en terme d’investissement public pour tout le budget du programme d’investissement public en production animale, quand simplement pour l’aviculture, Mr Brandt du secteur privé réel des affaires avait une proposition de 130 millions de dollars. Le clous de cette journée de débats qui a enfoncé les méninges des faiseurs de politiques a lieu lorsque un représentant de la paysannerie a fait cette remarque. »Messieurs du MARNDR, pour qui préparez vous cette politique, pour vous ou bien pour la paysannerie haïtienne, quand dans vos prévisions aucune ouverture n’est faite sur le cheval, l’âne, la mule, qui représentent dans notre système de commercialisation le transport de choix des récoltes au marché ? Cette remarque venant d’un très humble invité rural a la valeur d’une bombe atomique comparée au scoop de complot agricole ourdi par le MARNDR contre la nation haïtienne de l’agronome Michel William. Venant d’un paysan, elle n’inquiète pas les politiciens ,mais si elle était venue d’un Michel William qui est lu sur la majorité des fora , Yahoo, Google, You Tube, Face book, il sonnerait très fort aux yeux des décideurs.

Il y a eu également la proposition de réforme agraire présentée comme point de vue officiel de la politique du gouvernement et qui est systématiquement rejetée par le Directeur National de l’Institut de la Reforme Agraire , présentateur, arguant que ce point de vue n’est pas celui de l’institut. Bernard Etheart, ami personnel du président qu’il appelle Ti René , l’homme par qui le scandale est arrivé directement, ne peut pas être pris á partie et ses remarques ne peuvent pas être traitées d’ » agrairerie » qu’il n’a jamais proposées.

The least not the last, est le fleuron de résumé de la politique agricole du MARNDR, présenté, par quelqu’un qui a du recevoir ses premiers guides ,de moi, alors que j’étais agronome de District dans les Nippes. Il s’agit de l’ingénieur agronome Jean Robert Chery, devenu aujourd’hui , une pièce importante dans la machine du MARNDR. En 1979, Jean Robert Chery comparé á un Anyl Louijuste, de regrettée mémoire, montrait tous les signes d’une étoile montante. Je l’ai encadré du mieux que j’aie pu. Malheureusement les vicissitudes de la vie l’ont happé et ont fait de lui ce qu’il est devenu un intellectuel de la plume du genre des étrangers qui écrivent depuis vingt ans pour la FAO, pour l’UE ou pour l’USAID. Il a esquissé un projet de politique agricole conforme á la vision de ses anciens patrons et a repris textuellement la vision du GTA, de la FAO, de l’IICA et de leurs colistiers. C’est malheureux. Est-ce sa faute á lui ? Souhaitons qu’il est encore récupérable.



Un mois avant la publication de ce papier ,cinq ou six articles « pre clearence » , á la lumière de je ne sais quelle révélation, avaient été postés á ceux lá mêmes qui allaient écrire le projet de politique agricole. Ce sont « projet de reboisement en Haïti, la dure réalité de la reconstruction haïtienne, A bas les stratégies de faux semblants, Des chirurgiens et des diplomates avocats au secours des hommes de Damien »Dans tous ces articles , on pouvait pressentir que quelque chose d’insolite se préparait, comme si dans mon subconscient, il s’intériorisait un événement politique regrettable qui allait venir dans un intervalle pas trop lointain. Mes préoccupations étaient fondées .Une quinzaine de jours après, l’inévitable allait arriver avec l’invitation lancée par le MARNDR á plus de 200 élites des villes et des sections communales ,des Cadres ONG pour valider une politique agricole dont la vision avait été déjà définie l’an dernier au XARAGUA et qui avait été guidée longtemps par la FAO, L’IICA, sans oublier la BID, le FMI, La BM, L’UE,L’USAID, ces éternels faiseurs de la politique agricole haïtienne du MARNDR avec les ministres, François Severin (5 fois, Gerald Mathurin, Sébastien Hilaire, Philippe Mathieu, le couple Joanas Gue-Michel Chancy, tous appartenant á quelques exceptions près, au fameux Groupe de travail sur l’Agriculture GTA.

De Severin á Gué, peu de choses a changé. L’idée centrale retrouvée dans toutes ces politiques est que la mondialisation du commerce carrefour de passage obligé de toutes politiques économiques et commerciales des petits pays ,était aussi une porte de sortie pour les producteurs haïtiens parce que la mondialisation offrait á chaque pays, gros ou petit, des possibilités de tirer leur part de revenu du marché.( faux, souligné par nous) .Toutes ces politiques qui sont conditionnées par les accords standby, les accords d’ajustement structurels, les accords de partenariat économique, les conventions de l’OMC et qui ont conduit á la désétatisation d’Haïti reposaient sur des stratégies de production pour la non production, sur l’affaiblissement de l’état et du secteur privé remplacé par le gouvernement des ONG qui reçoit jusqu'à vingt fois le budget du gouvernement de la république et qui ont fait d’Haïti celle dont nous pleurons le statu quo.. Ces politiques ont généralisé les poches de vulnérabilité á travers les aires des trente et un bassins versants du pays.

Les conclusions de ce rapport ont servi malheureusement de cadre de référence pour la préparation d’une politique agricole post-séisme qui selon les déclarations publiques des grands du monde ne devraient plus au grand jamais, refléter l’orientation de toute politique conduite en Haïti avant le 12 janvier 2010. De Obama á Chavez, en passant par Sarcozy, Merkel, Harper, Lula,le Secretaire General des Nations Unies Ban Ki Moon, tous ont reconnu leur part de responsabilité, dans la situation d’état en faillite d’Haïti .Tous reconnaissent que leur approche d’avant le 12 janvier était contre productive pour Haïti. Ils ont décidé de faire autrement. Ils ont passé des instructions pour aller dans le sens du renforcement de l’état haïtien en ignorant celles de la période ante séisme .

Justement ,faire autrement implique le rejet de la politique des chasseurs de petits projets, le rejet des appels á proposition, le rejet des toutes les études foncières, conduites pour évacuer élégamment l’unique réforme de la tenure foncière qui reste ,comme l’a bien souligné, l’INARA au ranch de la Croix des Bouquets , la nationalisation de la terre d’Haïti et son exploitation par une classe paysanne devenue classe productrice á renforts des services á la production , á la commercialisation et á la justice.

Faire autrement implique prendre au mot la déclaration de ces grands princes du monde pour faire du Président Préval un pair entre ces grands en lui proposant des politiques qui tranchent d’avec le passé.

Le scoop du présent article Avortement d’un projet de conspiration du MARNDR contre la souveraineté alimentaire de la population haïtienne est simplement un titre politique humoristique pour attirer l’attention du lecteur et est conçu pour alerter les hauts placés du MARNDR qu’ils font face á un dilemme :

« Les consultants d’hier ne son pas forcément les consultants d’aujourd’hui et que en politique les vérités d’hier ne sont pas toujours les vérités d’aujourd’hui ». Les choses ont changé. Le 12 janvier est á Haïti ce que le »nine eleven » est á la politique intérieure et extérieure des Etats-Unis, ou encore ce que la récession de 2009 est á l’économie mondiale. Face á ces deux derniers événements, les grands du monde ont tranché radicalement d’avec le passé. Nous aussi en Haïti, nous devons trancher aussi d’avec les clichés du passé. Les querelles constitutionnelles sont déclarées tabous. Ne mentons plus á nous-mêmes. Nous ne pouvons rien sans la volonté des grands du monde, comme leurs promesses n’iront nulle part sans la participation effective des haïtiens.

Hier, les grands avaient décidé que Haïti restât á la trainée des nations .Ils y ont réussi. Aujourd’hui , ces mêmes grands du monde ont décidé de reprendre Haïti et d’en faire un fleuron émergeant du monde, ou un quartier de Manhattan. Faisons les confiance. Affrontons en toute sérénité la coopération étrangère locale qui par orgueil et par refoulement a peur de se confesser publiquement. Ce sont des humains. Comme nous, ils sont mus par les petits intérêts économiques. Ils ont peur de se présenter en accompagnateur de la nouvelle politique de OBAMA et d’Hilary Clinton, de Sarkozy et de Bernard Kouchner après avoir été les fossoyeurs d’Haïti d’avant le 12 janvier 2010. Comme nos cadres ils ont été les pions d’une politique erronée du monde envers Haïti. Comme ils sont aussi de passifs exécuteurs de politiques de leurs pays, ils peuvent changer moyennant qu’en face d’eux ils trouvent une nouvelle équipe haïtienne disposée á collaborer dans le sens de la politique décidée par les grands du monde pour Haïti. Dans cet esprit, le ministre Gué qui se signale comme un entrepreneur réussi dans ses activités privées devrait pouvoir trouver dans les jours á venir et á la lumière de cet article l’élément motivateur des cadres supérieurs du MARNDR pour l’élaboration d’une nouvelle politique agricole á la dimension de l’holocauste du 12 janvier et á la hauteur des ambitions nobles des grands du monde pour Haïti.



Nb-Article de l’Agronome Michel William dédié en toute solidarité á l’agronome Joseph Ronaldt Toussaint

Revisiter l’intellectuel haïtien: sa nature, son rôle et sa fonction dans le corps social

Revisiter l’intellectuel haïtien: sa nature, son rôle et sa fonction dans le corps social
Dimanche, 18 Avril 2010 17:02 | Écrit par Hugues St. Fort | | |
(Première partie)


La première fois que j’ai réfléchi systématiquement sur la question de l’intellectuel haïtien, c’était dans le cadre de ma chronique hebdomadaire « Du côté de chez Hugues » sur Haitian Times. J’ai rédigé alors un texte d’environ 850 mots, dépassant ainsi le maximum réclamé par mon « publisher » à Haitian Times qui était très strict sur la longueur des textes rédigés par les chroniqueurs. C’était, je crois, en 2003. Je venais de commencer ma chronique, l’année précédente. J’avais écrit ma réflexion après avoir lu un texte du célèbre juge américain Richard Posner, texte qui allait devenir un peu plus tard un livre intitulé « Public Intellectuals : A Study of Decline ». Dans mon texte de 850 mots, je voulais faire le point sur la nature de l’intellectuel haïtien. Qui est-il ? A quelle tradition se rattache-t-il ? Où doit-on le classer dans une typologie de l’intellectuel qui, en Haïti, tenait un héritage triple, provenant des Caraïbes, de France, et de l’Amérique. Je voulais éclairer la nature de l’intellectuel en Haïti car c’était un mot employé à toutes les sauces, en bien et en mal (mais surtout en mal car j’ai encore en tête au-delà des tas d’autres insultes cette caractérisation de l’intellectuel en Haïti auquel certains avaient accroché le qualificatif créole de « komokyèl » : « entèlektyèl komokyèl » = intellectuel de merde).



Dans le petit texte de 850 mots que j’avais retrouvé et fait circuler sur quelques forums de discussion sur Haïti quelques jours avant le 12 janvier 2010, j’avais posé 2 questions fondamentales qui devaient servir d’introduction à la problématique de l’intellectuel haïtien : « …Qu’est-ce qui distingue un intellectuel haïtien des intellectuels d’autres pays, en Occident, en Amérique latine, en Afrique, en Asie… ? Est-ce que ce sont les conditions et les traditions politiques, socio-économiques, culturelles… ou bien est-ce qu’il y a une nature particulière à l’intellectuel haïtien qui fait qu’il ne peut ressembler aux autres intellectuels des autres pays ? » Plus de sept ans après avoir lancé cette problématique, je dois reconnaître qu’elle est toujours d’actualité.



Quand on parle d’intellectuel haïtien, il n’est pas sûr que tout le monde se trouve sur la même longueur d’ondes. En Occident, si l’on vit aux États-unis, on se réfère généralement à ce qu’on appelle « public intellectuals », c’est-à-dire un commentateur public, le plus souvent un universitaire comme Alan Wolfe, Paul Krugman, James Q. Wilson, Henry Louis Gates, Cornel West, William Julius Wilson, Orlando Paterson, mais aussi des chroniqueurs de premier plan, comme Christopher Hitchens, David Brooks, Leon Wielseltier, Andrew Sullivan, etc. Si l’on vit en France, on se réfère à Bernard-Henri Lévy (BHL) même s’il est extrêmement controversé, François Cusset, Alain Finkielkraut (autre personnage très controversé), Paul Ricœur, peut-être Bernard Pivot. L’une des caractéristiques de ces personnages, c’est qu’ils sont très médiatisés, ils sont sollicités sur tous les plateaux de télévision, donnent leurs points de vue sur la majorité des questions d’actualité et sont très écoutés par le grand public. Par exemple, en France, BHL est une bête de télévision. Aux États-unis, Paul Krugman ou Henry Louis Gates ou Christopher Hitchens sont dans tous les magazines ou toutes les revues qui se respectent. Si aux États-unis, on se sert depuis les années 1980 du terme « Public intellectuals » pour désigner ces grands esprits qui se servent de leurs savoirs savants pour commenter les événements et faire évoluer les regards individuels ou collectifs vis-à-vis du monde ou de l’Histoire, ce n’est que récemment qu’on a adopté dans la terminologie francophone ou hexagonale l’adjectif « public » à côté du substantif « intellectuel ». Mais ce n’est pas une longue tradition française de parler de « intellectuel public » comme on le fait couramment maintenant aux États-unis. Les dizaines de livres qui existent sur l’histoire des intellectuels en France en témoignent aisément. Mais cette rectification confirme quelque chose de très révélateur : la médiatisation outrancière du personnage de l’intellectuel aux 20ème et 21ème siècles en Occident. Long chemin depuis la naissance du personnage moderne de l’intellectuel introduit au moins en France avec l’affaire Dreyfus, événement qui a ouvert la voie à l’engagement des intellectuels mais qui en dit long sur les évolutions des sociétés occidentales.



Qu’en est-il de l’intellectuel haïtien ? Dans quelle mesure peut-il être considéré comme un acteur social ? En fait, a-t-il jamais été un acteur social ? En fait, l’apparition de l’intellectuel en Haïti coïncide avec la naissance même de la nation haïtienne, le premier janvier 1804. Dans une certaine mesure, on peut dire que le premier intellectuel haïtien a été Louis-Félix Mathurin Boisrond, dit Boisrond Tonnerre dont le nom est passé dans l’histoire de la nation pour avoir été le rédacteur de l’Acte de l’indépendance d’Haïti. Ceux qui ont découvert ou redécouvert dernièrement sur le Net l’histoire de cet Acte avec son exhumation des Archives nationales de Londres faite par une doctorante canadienne ont lu le nom et vu la signature de Boisrond Tonnerre, qui était le secrétaire de Dessalines. Il avait conquis ce poste de haute lutte « intellectuelle ». L’historien haïtien Claude Moïse rapporte dans le livre collectif qu’il a dirigé « Dictionnaire historique de la Révolution Haïtienne (1789- 1804) », les Éditions Images et les Éditions CIDIHCA, 2003 que le général en chef Jean-Jacques Dessalines, s’était montré « insatisfait du ton généralement juridique du texte qui lui [était] soumis » par Jean-Jacques Charéron et fut emballé par le ton et les paroles de Boisrond Tonnerre qui aurait dit : « Pour dresser l’acte de l’indépendance, il nous faut la peau d’un Blanc pour parchemin, son crâne pour écritoire, son sang pour encre et une baïonnette pour plume ! » Conquis par cette fougue, Dessalines l’aurait engagé immédiatement pour être son secrétaire particulier et rédiger en moins de vingt-quatre heures l’Acte de l’indépendance. C’est d’ailleurs lui, selon le livre collectif de l’historien Claude Moïse, qui en a été le lecteur, le 1er janvier 1804 « devant les citoyens et soldats rassemblés sur la place d’armes des Gonaïves ».



Toujours selon Claude Moïse (2003 : 60), Boisrond Tonnerre est l’un des bras droits de Dessalines dans l’organisation du nouvel État. Il est mentionné dans toutes les circonstances importantes comme conseiller influent ou instigateur. Ainsi, en août 1804, il pousse à la création de l’empire sur le modèle de l’empire français proclamé peu avant. Il est encore l’un des rédacteurs de la constitution du 20 mai 1805…Il agit souvent de concert avec Juste Chanlatte et Etienne Victor Mentor, également membres du conseil privé de Dessalines. Dans le contexte de la naissance et de l’établissement de la jeune nation haïtienne, ces personnages, pour avoir tous fait de bonnes études en France et possédaient le savoir, ont travaillé avec le pouvoir et joué un rôle dans l’orientation de la politique haïtienne. Donc, dès le début de la naissance de la jeune nation haïtienne, l’intellectuel haïtien marche la main dans la main avec le pouvoir qui avait d’ailleurs besoin de ses compétences dans la mesure où c’était un pouvoir essentiellement militaire peu au courant des pratiques administratives de gestion d’un état moderne. Ce modèle va durer longtemps dans les structures politiques et sociales haïtiennes.



La tradition de l’intellectuel haïtien se place donc tout à fait à l’opposé de la tradition moderne de l’intellectuel occidental qui conteste, critique et s’engage contre le pouvoir (cf. Zola, Sartre, Foucault, en France ; Edward Saïd, Noam Chomsky, aux États-unis). Dans un article célèbre, « Les miroirs étincelants : la crise de l’intellectuel haïtien » (voir la revue « Études créoles » Vol. XVII, # 2, 1994, pages 75-86), (traduction par Léon-François Hoffmann de « Blazing Mirrors : The Crisis of the Haitian Intellectual » in Alaistair Hennesy, ed. Intellectuals in the Twentieth-Century Caribbean, vol. II, Macmillan, 1992), l’universitaire trinidadien J. Michael Dash, se basant sur la description donnée dans les romans haïtiens du 19ème siècle, présente l’intellectuel haïtien comme un opportuniste politique, un intrigant, un mystificateur linguistique. Dash écrit ceci : « Les racines de la vie intellectuelle haïtienne s’accrochent à la conviction des propriétés magiques du texte, comme à la capacité de perpétrer l’illusoire au nom du peuple haïtien et de la race noire. Ce n’est qu’avec l’occupation américaine en 1915 que l’intellectuel abandonna sa défroque de virtuose culturel, d’Ariel raffiné, pour endosser celle de déclassé et d’inadapté au monde contemporain. L’intellectuel se dressa dès lors en enfant terrible, en Caliban vindicatif. » Pour trouver une image de l’intellectuel haïtien contestaire, et fortement critique du pouvoir haïtien et de la société haïtienne, il a fallu attendre les années 1930 et l’émergence de jeunes intellectuels pour la plupart formés à la réflexion marxiste, comme Jacques Roumain, Etienne Charlier, Anthony Lespès, Georges Petit, Phito Marcellin, Saint-Juste Zamor, Saturnin François,… (voir Matthew J. Smith : Red and Black in Haïti. Radicalism, Conflict, and Political Change, 1934-1957, The University of North Carolina Press, 2009: 19).



Malheureusement, la répression sauvage qui s’abattit sur la société haïtienne avec l’élection de François Duvalier en 1957 ne donna pas de suite à l’émergence d’un nouveau type d’intellectuel haïtien, champion des droits de l’homme, engagé politiquement et surtout distant du pouvoir, défenseur des droits de l’individu et dépêtré de ses nombreuses contradictions.

Dans la première partie de cette série (voir Haitian Times du 21 au 27 avril 2010), j’ai montré que contrairement au personnage moderne de l’intellectuel occidental introduit en France avec l’affaire Dreyfus vers la fin du dix-neuvième siècle, qui a ouvert la voie à l’engagement politique des intellectuels, l’intellectuel haïtien, dès le début de la naissance de la jeune nation haïtienne, a marché la main dans la main avec les différents pouvoirs en place et les classes dominantes haïtiennes. Pour trouver une image de l’intellectuel haïtien contestataire et fortement critique du pouvoir haïtien et de la société haïtienne, il a fallu attendre les années 1930 et l’émergence de jeunes intellectuels pour la plupart formés à la réflexion marxiste, comme Jacques Roumain, Etienne Charlier, Anthony Lespès… J’ai pris pour exemple type de l’intellectuel allié du pouvoir le cas de Boisrond Tonnerre dont l’histoire a retenu le nom comme celui qui a été le rédacteur de l’Acte de l’indépendance d’Haïti le 1er janvier 1804. En fait, Boisrond Tonnerre n’a pas été le seul « intellectuel » pionnier dans la jeune nation haïtienne. On peut également citer des noms tels que Juste Chanlatte, Etienne Victor Mentor…On peut contester cette caractérisation de Boisrond Tonnerre comme intellectuel. Je le considère comme tel dans la mesure où il a fait partie d’une petite classe d’hommes instruits de l’époque ayant fait leurs études en France et disposant d’un certain savoir.



D’une manière générale, je théorise que le concept d’intellectuel en Haïti depuis l’époque de Boisrond Tonnerre et dans sa représentation la plus élémentaire, la plus primitive, s’oppose à celui de « travailleur manuel ». L’intellectuel en Haïti serait celui qui se sert de la pensée, d’un savoir acquis dans les livres pour gagner sa vie, par opposition au travailleur manuel qui, lui, se sert de ses mains, utilise la force physique pour gagner sa vie. Dans l’opinion publique haïtienne, l’intellectuel est perçu comme quelqu’un qui « ne travaille pas dur », qui n’utilise pas sa force physique pour travailler. Il ne vit pas dans le même monde que l’ouvrier.



Le grand écrivain haïtien Frankétienne dans sa célèbre pièce de théâtre, Pèlen tèt, (1978) a dressé une description saisissante de cette opposition « intellectuel vs manuel » et de leurs rapports sociaux en Haïti. L’histoire de « Pèlen tèt », c’est l’histoire de deux immigrés haïtiens, Piram et Polidor, qui vivent ensemble, pauvres et désargentés dans un sous-sol d’une maison à New York. Polidor est un intellectuel et Piram est un ouvrier. Ils ne se ménagent pas et se lancent leurs quatre vérités. Voici une réplique célèbre de Piram à Polidor :



Nou menm entèlektyèl nèg sèvo gran Konoso ! Nou konn pouse moun fè tenten ! Nou pale bwòdè, simen bèl fraz, detaye analiz lojik, vide diskou gramatikal zerofot. Men, fout tonnè boule mwen ! Sa sèlman nou pwòp. Pawòl kraponnay ! Mache zepòl kwochi lan tout lari ak yon valiz chaje dokiman kanni ; yon vès kwoke sou do nou tout la sent jounnen. Tikrik-tikrak : « Je demande la parole, je voudrais, j’estime que…et caetera. »Nou p ap leve ni lou ni lejè. Nou p ap fè anyen. Pawòl anpil. Pawòl van. Nou menm entèlektyèl ak politisyen lavil ki responsab depi tan binbo tout dezagreman lòbèy tchouboum lan peyi Dayiti. (Je signale que j’ai remplacé l’orthographe Pressoir dans laquelle est écrite la pièce par l’orthographe officielle de la langue créole d’Haïti mise en place en 1981.)



Ce passage présente une bonne partie des représentations de l’intellectuel haïtien dans l’opinion publique. L’intellectuel haïtien n’utilise pas sa force de travail physique et en fait, ne fait rien que de parler abondamment et avec pédanterie, circuler dans les rues tous les jours, une veste sur le dos, une valise remplie de documents inutiles à la main…



D’autre part, l’usage de la langue française est consubstantiel à l’identité de l’intellectuel haïtien. Personne en Haïti ne peut être considéré comme intellectuel s’il est unilingue créole. Ce qui est tout simplement ahurissant si l’on songe que tous les locuteurs nés et élevés en Haïti parlent et comprennent le créole haïtien alors qu’à peine 5% des locuteurs haïtiens nés et élevés en Haïti sont capables de parler et comprendre le français dans n’importe quelle situation. La langue française renforce le prestige de l’intellectuel haïtien et contribue à définir les contours de la variété haïtienne de la langue française. Le français parlé en Haïti fonctionne très peu en tant que langue effective de communication. Il est le plus souvent utilisé de manière symbolique, indiquant soit le niveau (perçu) des interlocuteurs sur l’échelle sociale, soit le caractère cérémonieux et pompeux d’une situation. Le français parlé en Haïti fonctionne sur un seul registre. La plupart des locuteurs haïtiens se servent du registre formel pour communiquer dans toutes les situations. La force d’information que possède toute langue disparaît généralement en ce qui concerne le français parlé et écrit en Haïti. On se trouve en présence d’une langue remplie de formules stéréotypées, creuses, solennelles dont le pouvoir d’information est limité. Il en a toujours été ainsi en Haïti mais le sommet de l’usage de formules pompeuses et fleuries qui ne véhiculent presque pas d’information a été atteint durant la dictature duvaliériste. Mais, l’intellectuel haïtien y trouve joliment son compte dans la mesure où c’est cela qui va renforcer son prestige dans le corps social haïtien. Dans un fameux débat « intellectuel » qui se déroule actuellement dans plusieurs forums de discussion sur Haïti, un intellectuel haïtien s’est glorifié que ces derniers temps, il s’est finalement abaissé à écrire pour être compris. Pourtant, cet « intellectuel » ne possède pas de spécialisation universitaire qui l’obligerait à utiliser le jargon de sa discipline qui tendrait alors à obscurcir ce qu’il a à dire, du moins pour le non-spécialiste.



Nous l’avons dit au début de ce texte. L’intellectuel haïtien s’est investi dans le pouvoir dès les premiers pas de la jeune nation haïtienne. Aujourd’hui encore, tout intellectuel haïtien (ou presque tous !) pense qu’il a un rôle à jouer dans la politique haïtienne. Comment expliquer cette obsession ? En fait, il y a plusieurs façons de comprendre cet état de fait. Une façon de comprendre ce problème tient au fait que de tout temps l’État haïtien a été le plus gros employeur de la place. Dans une société où le chômage a toujours été la plaie béante de l’espace socio-économique, l’intellectuel haïtien s’est voulu proche du pouvoir et pense qu’il peut guider parce qu’il a les connaissances requises. La plupart des romans haïtiens du dix-neuvième siècle témoignent de cette constante. Tout au long de l’histoire d’Haïti, on remarque que la majorité des intellectuels haïtiens ont gravi patiemment les échelons de l’État jusqu’à devenir de hauts fonctionnaires avec une stature d’homme d’État : Beaubrun Ardouin, Frédéric Marcellin, Anténor Firmin, … Comme dans le cas de la langue, la politique est en Haïti consubstantielle à l’intellectuel. Cependant, on verra qu’on ne peut pas réduire aux simples exigences économiques cet attachement des intellectuels haïtiens à la politique.
a suivre

La crédibilité.

La crédibilité.

Didier Franck Wache


C’est ce qui permet, à des gens honnêtes, sincères, de bonne foi, de déplacer des montagnes avec peu de moyen. De s’exprimer clairement, de diffuser des messages qui seront compris de tous parce qu’ils sont construits avec des mots simples et clairs, tirés d'actes, et d’histoires de la vie de tous les jours…

Parce que ce qui est dit, sera fait avec coeur et conscience.

C’est ce qui permet à un noir de devenir Président des USA, de faire voter une réforme sur le service de santé de son pays et d’effectuer d’énormes changements qui nous toucheront tous de près ou de loin.

C’est ce qui permet à un Indien de favoriser, de mener et de conduire son pays à l’indépendance face à la plus grande armée du monde de l’époque.

C’est ce qui a permis à un Sud- Africain de conduire ses concitoyens à réfléchir sur leur avenir et mettre fin à l’apartheid… et d’effectuer des transferts de pouvoirs sans trop de dégâts.

C’est ce qui permet à un Cubain de chasser un dictateur, d’effectuer des réformes en profondeur, de favoriser l’éducation à tous les membres de sa nation, de résister à un embargo tant bien que mal, et de sortir son pays de la crasse et de la misère.

C’est ce qui permet à un Chinois, de secouer et de conduire plus d'un milliard de ses concitoyens à ne plus crever de faim tout en développant une économie de marché.

C’est ce qui a permis à Toussaint Louverture, JJ Dessalines, …, de vous donnez une nation.

Avons-nous des personnes crédibles au sein de notre communauté? Parmi nos élus?

Voulez-vous continuer à vivre dans la peur des lendemains?

J’imagine que comme tous vos compatriotes, vous assistez tous les jours à des désastres résultant de décisions irréfléchies, incohérentes et irresponsables …

Bien souvent les réflexions des passants anonymes ont plus de bon sens que celles de nos dirigeants, ou de ceux qui prennent des décisions sur notre vie présente et future!

La grande majorité d’entre-nous peut devenir ce Noir, cet Indien, ce Sud-Africain, ce Cubain, Ce Chinois, Toussaint ou Dessalines. Ce n’est qu’une question d’attitude à adopter et de rêves à partager.

Pensez-y, c’est notre avenir à tous qui est en jeu.

Bonne journée

Didier Frank Waché
dfwache@yahoo.ca

samedi 24 avril 2010

Le Net, une toile… d’araignée ?

Le Net, une toile… d’araignée ?

par Gilles Bonafi

Mondialisation.ca, Le 22 avril 2010
Le blog de Gilles Bonafi

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Les véritables origines du réseau informatique mondial Internet, la toile sont peu connues. A la base, c’est un projet militaire US qui avait pour but de constituer un réseau d’ordinateurs afin d'améliorer les communications entre chercheurs au sein du DARPA (Defense Advanced Reseach Projects Agency).

Le Darpa est une agence du département de la défense des Etats-Unis chargée de la recherche et du développement de technologies à usage militaire. Ce projet a réellement abouti en 1966 lorsque Lawrence G. Roberts (chercheur au MIT puis au DARPA), le National Physical Laboratory et surtout la Rand Corporation ont mis au point le réseau Arpanet qui devient officiellement Internet le 1 janvier 1983. (voir Lawrence Roberts, sur wikipedia.org).
La Rand Corporation est un think tank américain spécialisé dans l’aide décisionnelle, la recherche et l’analyse dans le domaine des nouvelles technologies. C’est une institution puissante qui a eu des membres prestigieux comme Condoleezza Rice ou Donald Rumsfeld, avec un budget évalué à 230 millions de dollars en 2008.

Plus tard, en 1989, Tim Berners-Lee, informaticien au CERN (Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire) a développé un lien hypertexte qui utilise Internet. Le World Wide Web était né. Le 30 avril 1993, le CERN a annoncé que le World Wide Web sera gratuit pour tous car il entre dans le domaine public (voir aussi : (PressWeb)

Il est intéressant de noter que le World Wide Web consortium dont le sigle est W3C est noté www. La lettre w qui correspond à la sixième lettre de l’alphabet hébreu a pour valeur numérique 6 (la gematria) et donc, www = 666. Drôle de hasard, surtout lorsque l'on sait que la date choisie pour le lancement, le 30 avril, est traditionnellement associée à la nuit des sorcières, dite nuit de Walpurgis, date du suicide de Hitler et de la création de l’'Église de Satan à San Francisco par Anton LaVey. De plus, le logo se passe de commentaires.

Rapidement, cet outil est devenu le plus grand fournisseur d'informations instantanées, il s'est aussi transformé en un remarquable outil de résistance ou de militantisme... Mais la liberté d'expression sur Internet pourrait bien être mise à mal un jour.

Lockheed Martin, Microsoft et le Darpa préparent en effet un Internet militaire du futur. Leur but est de mettre au point un nouveau protocole réseau militaire. Lockheed Martin a décroché un contrat de 31 millions de dollars avec le gouvernement américain pour travailler à réinventer TCP/IP. Microsoft est associé aux travaux. D’après les déclarations de John Mengucci de chez Lockheed Martin, l’objet principal du contrat consiste à anticiper les possibles attaques: “Les nouvelles menaces et attaques réseaux requièrent des concepts de protection révolutionnaires. Avec ce projet [...] nous travaillons à renforcer la cyber-sécurité et à nous assurer que les combattants pourront combattre en dépit de cyber attaques.” Ne faut-il pas plutôt y voir la volonté de créer un nouveau réseau plus contrôlable ?

Par ailleurs, une nouvelle loi en préparation aux Etats-Unis pourrait couper le robinet aux internautes. La Cybersecurity Act of 2009 ou plutôt The Rockefeller-Snowe Cybersecurity Act , si elle est votée, permettra de limiter ou de couper l’Internet aux USA. Il s’agit de la section 18 de la loi S 773 proposée par le sénateur John (Jay) Rockefeller et la sénatrice Olympia Jean Snowe . « Le président peut déclarer un état d'urgence en cybersécurité et ordonner la limitation ou la fermeture du trafic internet en provenance ou vers tout gouvernement fédéral compromis ou tout système réseau critique ».

De plus, la création d’un poste de conseiller national à la cyber-sécurité (NCA) est prévu. Il rapporterait directement au Président des États-Unis.

John Fontana, journaliste sur Network World, s'en inquiètait dans son article du 4 avril 2009 dernier intitulé « Bill would give Obama power to shut down Internet, networks during cyber attacks. Des voix critiques demandent que cette phrase (la section 18, ndlr) soit plus clairement définie. « C'est une loi de grande envergure. Il semble que le président puisse complètement couper internet ou demander à des sociétés comme Verizon Communications d'en limiter le trafic. Il y a largement de quoi être inquiet », assure Leslie Harris, présidente du CDT (Center for Democracy and Technology (CDT), qui défend les valeurs démocratiques et les libertés constitutionnelles à l'ère du numérique ».

La sénatrice du Maine Olympia Jean Snowe a d’ailleurs affirmé que cette loi « favorisait l’utilisation des tribunaux militaires au détriment des tribunaux civils » afin de lutter contre le terrorisme.

De plus, cette proposition de loi se retrouve au cœur de l’actualité. Mercredi 24 mars 2010, le Comité du Commerce Science et Transport a approuvé la Loi de Cybersécurité S 773 qui est en discussion au sénat actuellement.

La lutte contre le terrorisme est donc encore une fois de plus mise en avant afin de restreindre les libertés. Certains parlent de la révision de la section 18 de cette loi qui, si elle passait en l’état, permettrait au président des USA de totalement contrôler le Net.

De plus, tout ceci fait étrangement penser à Ésaïe 59.5 : « Ils couvent des oeufs de basilic, Et ils tissent des toiles d'araignée. Celui qui mange de leurs oeufs meurt; Et, si l'on en brise un, il sort une vipère. » Ou bien Job 8.14 : « Ses certitudes sont fragiles, sa sécurité n'est qu'une toile d'araignée. »

Chez les Aztèques, l'araignée est le symbole du dieu des Enfers. Dans la mythologie grecque, Arachné voulut se mesurer à Athéna en tissant une toile et elle ut punie car nul ne peut être l’égal des dieux.

N’oublions pas ce que Jean-Claude Juncker Premier ministre, ministre des finances luxembourgeois, gouverneur de la Banque mondiale de 1989 à 1995 ancien gouverneur de la BERD et du FMI président actuel de l'Eurogroupe, déclarait dans l’hebdomadaire allemand Der Spiegel n°52/1999 p136 :

« D’abord nous décidons quelque chose, ensuite on le lance publiquement. Ensuite nous attendons un peu et nous regardons comment ça réagit. Si cela ne fait pas scandale ou ne provoque pas d’émeutes, parce que la plupart des gens ne se sont même pas rendus compte de ce qui a été décidé, nous continuons, pas à pas, jusqu’à ce qu’aucun retour ne soit possible... » (Spiegel)

(Jean-Claude Juncker ist ein pfiffiger Kopf."Wir beschließen etwas, stellen das dann in den Raum und warten einige Zeit ab, was passiert...).


Gilles Bonafi est professeur et analyste économique.

Gilles Bonafi est un collaborateur régulier de Mondialisation.ca. Articles de Gilles Bonafi publiés par Mondialisation.ca

vendredi 23 avril 2010

Des chirurgiens et des diplomates avocats au secours de Damien

Des chirurgiens et des diplomates avocats au secours de Damien
William Michel
22 Avril 2010

Le scoop de cet article apparaîtrait bien étrange , ridicule même aux yeux de ses lecteurs ,Il sonnerait très mal aux oreilles du producteur agricole haïtien qui depuis la fondation de cette patrie n’a cesse de réclamer des hommes de Damien, des agronomes pour les encadrer techniquement et financièrement. Il apparaitrait ironique aussi aux yeux des agronomes eux-mêmes qui demanderaient perplexes ce que des chirurgiens et des diplomates avocats viendraient faire au chevet d’une agriculture reconnue effectivement malade.

Dans ce scoop il n’y a effectivement une part d’ironie mais il y a surtout de l’objectivité qui traduit la clairvoyance et la maturité politique de l’auteur d’une part et l’expression de la déchéance des rapports entre des états souverains devenus tuteurs et un état á « souveraineté surveillée » devenu sujet qui est traité et qui se laisse traité par des étrangers, qui débarquent sur le sol haïtien avec des clichés « Ready to use made in Washington Paris, Ottawa » dont l’OEA s’apprête á appuyer la mise en exécution. La boucle politique est bouclé et étant bouclée, l’économie agricole qui en dépend, se met á dériver avec comme force motrice la solution du libre échangisme appliquée a sa maladie qui a fait sauter la production nationale.

L’agriculture hattienne souffre en effet de deux maladies qui nécessitent en amont l’intervention des diplomates avocats suivie de celle des chirurgiens qui, une fois leurs tâches terminées, resteraient aux commandes politiques du pays pour faire appel aux agronomes détenteurs de la solution technique. Elle est malade parce qu’elle ne peut plus répondre á sa mission naturelle première qui est de produire pour garantir la consommation locale. Elle est malade de la maladie de carence de spécialistes véritables stratèges politiques pour apporter des solutions qui tranchent d’avec les stratégies de faux semblants qui depuis 1990 ne donnent aucune chance de salut aux producteurs haïtiens. Le séisme du 12 janvier n’a rien apporté de nouveau en terme de maladies politico économiques. Tous les habitants qui avaient laissé Port-au-Prince y sont déjà retournés après seulement quatre a cinq jours parce que les conditions de vie qui avaient justifié leur migration pour la capitale haïtienne sont devenues plus que pires et ce sont ces mêmes migrants qui savaient envoyer de l’argent aux membres de la famille restés sur place..

Le séisme du 12 Janvier 2010 a été seulement la goute d’eau qui a fait déborder le verre .Malheureusement les dirigeants du secteur, par instinct de la conservation du pouvoir s’obstinent á proposer des stratégies de « bouillons réchauffés » qui n’ont pas résisté á l’épreuve du temps.

Pourquoi la présence de diplomates avocats ?

L’agriculture haïtienne a besoin des diplomates avocats pour retirer Haïti sous l’obédience du chapitre neuf du conseil de sécurité de la charte des Nations Unies et pour revoir les articles et les closes qui régissent les accords de prêts ou de dons signés entre le gouvernement haïtien et la coopération internationale datée de 1972. Ils ont été revus avant la fin du vingtième siècle .Les dispositions de traités , conventions et protocoles internationaux qui soutiennent ces accords font partie d’un arsenal d’articles qu’on pourrait denommer de code pénal de la coopération internationale. Elles sont á prendre ou á laisser. Elles sont toutes étudiées et construites unilatéralement en faveur des intérêts des pays bailleurs de fond. Le non respect ou la non observance par le gouvernement haïtien d’un seul article de ce réseau de règlements, tous cohérents entr’eux , entraine la suspension des décaissements au mépris des bénéficiaires directs qui ne connaissent même pas l’ABC de ces derniers. Des complications économiques qui n’ont rien a voir avec les objectifs des projets sont exploitées par les bailleurs de fonds pour arrêter les décaissements , mettant en cause les objectifs de développement des projet mêmes. On peut citer les nombreuses fois ou l’aide internationale a été coupée, soit pour le non paiement des redevances du gouvernement á ses créanciers ,soit a cause d’une complication politique coup d’état

Un autre impair jamais vu, a pris naissance a la suite des cyclones qui ont frappé Gonaïves en 2004 et en 2008. Il se prolonge á la suite du tremblement de terre du 12 janvier 2010. Les pays donateurs ont tout simplement et unilatéralement décidé de la désaffectation des fonds d’’un prêt de l’état haïtien, ratifié en assemblée nationale, pour être réalloués á des « projets plus urgents « . Récemment, les décaissements des projets FIDA : PICV2, PPI II ,PAIP n’ont pas été arrêtés , mais ils ont été tout simplement désaffectés pour être réalloués aux projets d’urgence post cyclones ou aux projets post désastres , pour être gérés directement par l’internationale au mépris des votes de ratification par le parlement haïtien réuni en assemblée nationale. .Ceci n’a jamais ete prevu dans les conditions de financement de ces projets. La gestion de la majorité des fonds des projets qui sont des prets contractes par l’etat Haïtien, par conséquent remboursables, sont remis aux ONGs pour être dépensés sans contrôle du gouvernement. L’ambition du pouvoir aidant, les hommes de Lavalas ,exécutif et législatif, ont préféré abdiquer leur droit á la gestion directe aux étrangers exerçant leur pouvoir d’occupant comme les gouvernements de Vichy et de Pétain 1942)
De nouveau la gestion des fonds désaffectés est remise a la FAO, le frère Siamois du FIDA. La FAO, conformément á l’orientation donne au MARNDR depuis l’embargo destructeur de l’économie haïtienne en général, devient le gestionnaire direct de ces fonds .Il en est de même des fonds de la BID, de l’USAID, de la Banque mondiale ou de l’UE donnés en dons et mis a la disposition d’Haïti .Ces fonds sont parfois remis aux ONGs internationales FAO, IICA, ou á des contractants étrangers PADF,CARE Internationale, Winner, pour être gérés selon bon leur semble..Ces détournements, il faut bien les appeler par leurs vrais noms, sont arrivés á la suite d’appels pressants du gouvernement de besoins de fonds pour gérer l’urgence créée par les catastrophes humanitaires et naturelles qui s’abattent sur le pays.

Dans les conditions unilatérales de désaffectation et de gestion directe des fonds d’aide par l’étranger , toute coopération internationale confondue , lesquelles conditions modifient totalement les objectifs de développement de ces projets , il n’est pas juste d’appeler au chevet de l’agriculture haïtienne des agronomes munis de compétences technologiques limités pour résoudre des problèmes institutionnels et politiques hors de leur portée. Il faut faire appel a des diplomates avocats haïtiens chevronnés pour défendre le cas de l’agriculture haïtienne avec l’aide technique des agronomes du terroir rompus aux techniques d’encadrement des agriculteurs haïtiens.

Pourquoi des chirurgiens pour l’agriculture haïtienne ?

Les maladies chroniques dont est frappée l’agriculture haïtienne depuis la fondation de la patrie n’ayant pas reçu les traitements agronomiques de choix depuis leur apparition se sont aggravées et ont donnés lieu á la formation de cancer qui dans les limites actuelles de la technologie médicale sont considérées comme des maladies terminales dégénératives. Sauf que, les ressources naturelles qui conditionnent l’agriculture sont renouvelables, il est possible avec une gestion d’un autre genre redonner sante a cette agriculture. Pour retrouver la sante ,l’agriculture haïtienne n’a pas besoin d’agronomes expérimentés encore moins des agronomes d’ONG, spécialistes des stratégies de faux semblants. Elle a besoin de stratèges , de visionnaires réalistes , véritables chirurgiens de politique agricole, capables de faire des diagnostics différentiels éprouvés et de proposer des traitements á court a moyen et á long terme. II est retenu des stratèges parce que les interventions doivent trancher d’avec la stratégie de gestion de l’urgence qui ont amplifié le malheur d’Haïti pendant les vingt dernières années. Parmi ces interventions stratèges il faut mentionner

1-La déclaration de patrimoine national de l’humanité de toutes les terres d’Haïti et comme telles elles sont devenues propriété directe de l’état Haïtien et sujettes a des exploitations strictement dictées par les spécialistes assermentés du MARNDR.

2-La reconstitution de la propriété moyenne des terres de l’exploitation agricole sur des bases économiquement rentables liés á la vocation naturelle des terres

3-Abrogation de la loi successorale sous sa forme actuelle et la promulgation d’une nouvelle loi empêchant l’émiettement de la propriété agricole et sa redistribution á tous ls fils et filles de la descendance.

4-La promulgation d’une nouvelle loi de la reforme judiciaire consacrant l’indépendance du pouvoir judiciaire et la cohérence des trois pouvoirs de l’etat et d’un nouveau code rural régissant le foncier.

5 La promulgation d’une loi sur le crédit rural mettant ce dernier a la portée du producteur haïtien ou qu’il se trouve sur le territoire haïtien , tout ceci en adéquation avec les services de recherche et d e vulgarisation du MARNDR.

6-la promulgation d’une nouvelle loi organique sur les ONG reconnaissant leur apport dans la gestion comptable des fonds dépensés strictement dans le cadre du plan de développement local légal des collectivités territoriales préparé par le pouvoirs déconcentrés et décentralisés de la collectivité territoriale.

En dehors de ces pré-requis, tout projet de politique agricole préparé unilatéralement par le MARNDR constitue un pis aller et n’augure rien de nouveau pour les producteurs haïtiens qui seront victimes des mêmes contraintes.

lundi 19 avril 2010

LETTRE OUVERTE AU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

LETTRE OUVERTE AU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
SON EXCELLENCE RENE GARCIA PREVAL
Himmler Rébu

Port-au Prince le 15 avril 2010

Son Excellence René Garcia Préval
Président de la République
DCPJ

Monsieur le Président,

Voilà que je cède, encore, à la curieuse mais irrépressible sensation de devoir écrire des lettres ouvertes à ceux qui dirigent mon pays. La dernière fois que je vous ai écris une lettre ouverte, c’était pour vous exprimer mes inquiétudes face à la paresseuse et incompétente gestion que vous, votre premier ministre, vos ministres et vos conseillers avaient faite de la crise née du tremblement de terre du 12 janvier 2010. Aujourd’hui, je vous écris pour vous exprimer mon indignation face à la manière cynique, que vous avez de nous imposer vos vues à la fois perverses et malveillantes, en vous associant à la plus machiavélique et répugnante branche de l’international. Celle qui a mis vingt quatre ans pour construire, avec des haïtiens soigneusement sélectionnés, le désastre que nous sommes devenus !

L’Ambassadeur du Brésil, intervenant sur radio métropole au cours de cette semaine, dans le cadre de la campagne d’intimidation orchestrée pour obtenir, du Sénat de la République le vote de la loi inique que vous avez virilement soumise au Parlement, vous a décrit comme le plus intelligent président haïtien. En un certain sens, il ne s’est pas trompé. Vous êtes, en effet, après le docteur Président François DUVALIER, le plus fin, le plus malicieux dans le cynisme, l’art de la manipulation des bas instincts de ceux-là qui désirent des miettes de toute nature pouvant venir de votre pouvoir. En effet, si vous arrivez à faire croire et accepter à un ancien Président des Etats-Unis, déjà désigné représentant spécial du secrétaire général de l’ONU, qu’il lui faille entrer dans une commission sous la bannière d’une loi haïtienne, on ne peut que vous dire chapeau! Reste à savoir pour quelles opérations ! Si le Président Clinton a reconnu avoir fait du mal à Haïti sur la question du riz, j’ai regretté qu’il n’ait avoué une fois pour toutes la longue liste de ses méfaits : l’embargo, la démobilisation des Forces armées d’Haïti, la Téléco, etc. Peut-être veut-il venir pour réparer tout ce gâchis ! Mais, sous la protection d’une loi haïtienne ! Les intentions doivent fortement être malveillantes ! Trêve de supputations, tout n’est que d’attendre…du camp de concentration de Corail au méga bidonville en perspective, vous laisserez donc votre nom en lettres de diamants dans l’histoire d’Haïti. C’est votre choix !

Révoltant et inacceptable

J’ai suivi, avec indignation, votre conférence de presse du lundi 12 avril, donnée la veille de la réunion du Sénat de la République sur le projet de loi sur la prolongation de l'urgence. Vous avez carrément sorti le grand jeu pour menacer la population haïtienne de nouveaux tremblements de terre, jetant la peur et l’effroi à cent mille volts dans les cœurs encore endoloris des femmes et des hommes de ce pays alors qu'ils se remettaient, peu à peu et avec peine, des tribulations du 12 janvier. L’effroi était si grand que peu de gens ont vu le vrai sens de votre manœuvre qui ne visait qu’à intimider les Sénateurs récalcitrants. Tout simplement! Vous avez voulu les désigner à la vindicte populaire comme étant ceux qui vous auraient refusé les moyens de votre politique. Et quelle politique ! Tentative subtile pour acheter les consciences à peu de frais. Etonnant ! puisque vous connaissez bien les tarifs du marché ! Quelques sous et une promesse de réélection ; alors pourquoi nous faire peur à nous tous ? Pourquoi ?

Monsieur le Président,

Les risques de nouveaux tremblements de terre existent; tous les experts l’ont déjà dit. Il ne vous appartenait pas, cependant, de le dire à la population dans les termes que vous avez utilisés. Quelles mesures préventives avez-vous prises? Avez-vous déjà appelé les jeunes dans les centres de formation en secourisme? Où, dans vos plans, est-il prévu le renforcement en hommes, en formation, en matériels et équipements des corps des pompiers de toutes les grandes villes de la République? Où donc est votre armée, puisque les 38 armées étrangères à votre service personnel ont démontré, au cœur du désastre, qu’elles n’étaient pas concernées par cette question? Il est évident, monsieur le Président que les chimères ne servent qu’à intimider et… à tuer quand il le faut ! Essayer d’intimider, menacer même le citoyen vertical et rectiligne que je suis parce que les circonstances ont fait que vous habitiez sur ma route et que se serait, pour eux, un souci. Depuis quand suis-je un vil criminel ? Personnellement, je crois que c’est à la justice divine que vous aurez affaire. Les hommes sont trop petits pour vous punir de vos négligences coupables.

Monsieur le Président,

Vous venez d’ouvrir, officiellement, votre premier camp de concentration, à Corail, sur le mensonge et dans la plus pure méthode de l’Allemagne d’Hitler. En effet pour commencer à déloger les refugiés du terrain de golf du Pétion-ville club, vous vous êtes prêté au jeu en soutenant la thèse qu’il faille éviter les risques d’inondation. Depuis quand le Pétion-ville club était-il dans une zone exposée aux inondations? Ces gens ont été déplacés sous la menace, militairement accompagnés à Corail et aussi, militairement gardés depuis et ne mangeant systématiquement que des kits militaires.

Le Plan du 31 mars

Les haïtiennes et les haïtiens ne connaissent, dans leur grande majorité, ni le contenu ni l’histoire de ce plan. En effet, après le 12 janvier, la reconstruction s’imposait d’elle-même ; au cours de mes diverses rencontres avec de jeunesexperts de la communauté internationale, alors que je leur reprochais un certain puérilisme du texte, à côté d’évidentes erreurs optionnelles, ils m’ont avoué, avec candeur, mais que vouliez-vous que nous fissions ; quand on a demandé un plan à vos dirigeants, ils nous ont allongé deux feuilles de papier avec une liste de projets. On a donc du faire nous-mêmes. Le résultat est un très indigeste melting-pot qui s'avèrera même très dangereux, s’il est vraiment appliqué. Le premier ministre Joseph Jean Max Bellerive nous avait confié et avec raison, tous les plans de ces vingt dernières années ont échoués. Le seul qui ne l’ait pas encore est celui qui n’a jamais été essayé : celui qui aurait été fait par des haïtiens. Pourtant, il a été contraint de présenter cette affaire à New-York comme étant leplan de la reconstruction

Les petites bizarreries du plan de New-York

On dit que vous n’aimez pas lire ; moi, j’ai pris le temps de le faire pour vous. Je vous annoncerai peut-être que cette fameuse saga planique nous a imposé 4 versions à côté de HAITI DEMAIN préparé par la CIAT (Comité Inter ministériel d’Aménagement du Territoire) ; à mon sens un travail qui aurait dû être plus sérieusement utilisé. Oui, 4 versions : le PDNA (Post Disaster Needs Assessment) présenté à Saint Domingue le 17 mars comme étant le PLAN; le PRDNA première version 32 pages, deuxième version 39 pages et le monument final 54 pages.

A la lecture de tous ces documents, j’ai relevé certaines bizarreries que je voudrais vous signaler :
a) A la page 2 de l’addendum de la deuxième version à errata, on peut lire : Section 7.1.2 is revised as follows
b) A la page 2 de la deuxième version, on lit : combler le gap dans les recettes fiscales. Vous ne comprenez pas ? Eh bien, monsieur le Président, c’est tout simplement un trou ; un creux.
c) A la page 20 du même document on lit, en avant dernier paragraphe : le recours à la formule B.O.T : cela veut dire Build Operate Transfer contre Construire, Exploiter et Transférer (C.E.T)
d) Lisez, monsieur le Président à la page 7 du document final, paragraphe 2 : plus de 300.000 personnes, selon les autorités Nationales, ont perdu la vie. Qui donc parle ? Un expert international ?
e) Vous serez peut-être choqué par cette affirmation lue au paragraphe 4 à la page 3 du document final : Cette proposition est haïtienne.
f) A la page 8 du document final (qui a été présenté à New-York) à la fin du paragraphe 4 j’ai lu et je cite : Ces estimations n’ont pas encore bénéficié d’un arbitrage, ni d’une priorisation et d’une validation du gouvernement. Cela ne constitue que la première étape d’un travail plus approfondi pour la conférence des bailleurs de fonds prévue à New York pour le 31 mars 2010
g) Il y a longtemps que j’ai pris le parti de ne pas m’arrêter aux fautes de style, voire d’orthographe dans les documents officiels haïtiens depuis que vous êtes au pouvoir ; cependant écrire à la page 5, paragraphe 8 d’un tel document : Ce plan se décline en deux temps est une liberté à la fois extravagante et choquante. Il y a, dans le domaine, une spécialité, et ses artisans s’appellent : Correcteurs. Ce sont des spécialistes en stylistique. C’est important monsieur le Président.
h) Saviez-vous, monsieur le Président qu’Afin de préparer les estimations des dommages, pertes et besoins, environ deux cent cinquante experts Nationaux et internationaux ont travaillé, durant près d’un mois dans huit équipes thématiques pour préparer ce plan ? (page 7 paragraphe2.2 du document final). Je m’y perds un peu car, ailleurs, (in the PDNA) j’ai lu : About 300 experts from Haïti and abroad have been working daily in the hotel Karibe in Por-au-Prince on the report, giving legitimacy to the expressions of damages, losses, and needs. Dans cette tour de Babel qu’est devenu Haïti, on ne sait plus qui croire, Enfin !


Entre mensonges et crimes prémédités

a) En page 3, paragraphe 4 du document final, il est écrit : Malgré le calendrier très court, les principaux secteurs de la société haïtienne ont été consultés. Je suis sûr que toutes les erreurs stratégiques du plan auraient été évitées si cela avait été vraiment le cas. Monsieur le Président, vous n’avez jamais contacté les partis politiques, les secteurs jeunesse, paysan, féminins, religieux, ni même non plus, formellement, le secteur des affaires. Quant à la diaspora, elle s’est mise toute seule à la tâche et, allez voir à la page 29 du document final le seul rôle que vous lui attribuez.
b) Lisez avec moi, monsieur le Président à la page 6 du document final : Haïti a entrepris depuis le retour à la constitutionnalité en 2006, un cheminement pour reconquérir sa pleine souveraineté Nationale. Si cette phrase a été écrite par un expert national, c’est un mensonge ; si, au contraire, elle a été inspirée par un expert étranger, c’est une ironie inutile. Dans un cas comme dans l’autre, vous n’avez pas lu cette phrase.
c) Comment comprendre, monsieur le Président que, dans la hiérarchie des priorités, le relogement des populations sinistrées et déplacées ne soit que le douzième sujet de préoccupation ? Encore que ce qui est prévu au terme du relogement est tout simplement un crime car, la stratégie vise uniquement à garder les gens dans un état de crasse et de misère comme à Cité soleil afin d'utiliser ensuite ces tableaux pour émouvoir les bonnes âmes de l’étranger et nous enfoncer plus dans la mendicité comme seule alternative.
d) Pensez-vous que nous serons pris au sérieux quand, dans notre brusque crise refondatrice, nous inventons des énormités comme refondations territoriale, sociale, économique, institutionnelle. Si la refondation institutionnelle que vous préconisez va faire rentrer la CNE sous l’autorité du ministère des travaux publics, bravo ! Jamais, dans l’histoire d’Haïti les institutions nationales n’ont été autant, délibérément, affaiblies que sous votre gouvernement. On est habitué à vous voir affaiblir vos premiers ministres et vos ministres, même à les faire trainer comme des animaux à l’abattoir devant vos parlementaires personnels; cependant, on ne vous aurait jamais cru capable de proposer ou d’accepter qu’il soit proposé au parlement haïtien de voter une loi pour permettre à des étrangers :
Ø D’élaborer ou solliciter des projets
Ø De donner leur approbation à des projets
Ø De mettre en œuvre le plan de développement d’Haïti
Ø D’évaluer les résultats

A quelles tâches, dans ces conditions, seront appelés les ministres haïtiens ? En matière de renforcement institutionnel, n’êtes-vous pas le Président qui critique les forces armées de votre pays devant des généraux chiliens, tout heureux de savoir que l’inexistence de l’institution militaire vous a permis de boucler avec succès vos deux mandats ? Je crois qu’ils pourront, aussi, décider de saisir des terres, contre des miettes, où ils voudront, surtout si celles-ci sont bourrées d’or, d’iridium, de pétrole. On ne sait jamais Haïti est un pays surprenant !

e) Après avoir menti dans le premier PRDNA en affirmant : un peu plus de la moitié des quelques 1,2 millions de personnes déplacées auraient aujourd’hui trouvées (c’est ainsi écrit dans le texte) à se reloger de manière convenable (réf. 4.11 page 18), cette assertion est évitée dans le PRDNA No2, celui de 39 pages (réf 4.3.1 page 21) ainsi que dans le document final (4.3.1 page 32). J’apprécie que les critiques que j’avais formulées à ce sujet en tant que Président du GREH d’abord et comme secrétaire exécutif du PLAPH ensuite aient été prises en compte face à un si grossier mensonge.
f) Etes-vous conscient, monsieur le Président, que la première action que le plan préconise est la reconstruction des zones dévastées (Page 10 point 4 paragraphe 3 document final) sur un horizon de 18 mois (page 10 point 4 paragraphe 1) ? Nous n’oublions pas cependant que vous aviez bien dit que, suivant une évaluation de l’Armée américaine qu’il faudrait mille camions de très fort tonnage pendant mille jours donc, près de trois ans pour enlever les débris. Alors de quelle reconstruction de quelles zones dévastées parle t-on ? Encore que cela supposerait de reconstruire les mêmes corps physiques dans les mêmes endroits qu’avant le 12 janvier !
g) Quand, à la page 32 du document final, on voit les concepteurs ultra lucides développer la théorie du temporaire permanent, ont pourrait croire à une simple erreur. Non, il s’agit bien d’une décision d’Etat. Quand j’ai entendu l’ancien ministre de l’intérieur Mr Jocelerme Privert (brillant auteur de Décentralisation et collectivités territoriales) parler de villages d’abris de 20 et de 30 m2 à l’entrée Nord de la capitale, j’ai cru à une blague de mauvais goût d’autant qu’il évoquait aussi la perspective d’y adjoindre des structures industrielles pour que les habitants des villages y trouvent du travail. L’intervention de monsieur Charles Clermont, invité de Valérie Numa, confirma pour les haïtiens cette option surtout quand il précisa le coût des unités d’habitation : US $1,400.00. En effet, à la page 32 point 4.3.1 paragraphe 2, on peut lire le gouvernement va aménager 5 sites capables d’accommoder 100.000 personnes ou plus si nécessaire. Dans un premier temps des abris provisoires devront y être installés. Il est cependant prévu que ces sites deviennent de nouveaux quartiers permanents où les abris seront graduellement remplacés par des habitations permanentes. Et, dans l’encadré justifiant les données budgétaires pour 18 mois (page 32 document final), 140 millions de dollars sont prévus pour l’opération. Une petite erreur dans le raisonnement si ce n’est pas moi qui me trompe : les 1,400 dollars pour 100,000 personnes donnent effectivement 140 millions avec la différence que 100,000 unités d’habitation permettront d’abriter près de 500,000 personnes avec une moyenne de 5 personnes par famille. Toujours est-il que c’est un méga bidonville que le plan nous propose à l’entrée nord de la capitale. Les terrains retenus dans l’arrêté Présidentiel sont déjà en début de squattérisation. Allez y jeter un œil si vous avez, Excellence, un peu de temps.
h) Une constante dans les trois documents : Le gouvernement affirme qu’il y a environ 1, 200,000 sans abris ; il a toujours dit envisager des solutions pour 100.000. Il n’a jamais dit ce qu’il fera des 1, 100,000 autres personnes. Leur sort serait-il déjà réglé par le lapidaire : Restent (écrit comme ça dans le texte) donc quelque 350,000 personnes pour lesquelles aucune solution n’est identifiée (document No2 page 19 paragraphe 2)
i) Dix-huit lignes du plan on été consacrées à la diaspora et, le seul paragraphe parlant clairement de l’intention des concepteurs est le suivant : Il faut également trouver des formules pour que les transferts d’argent de la diaspora vers Haïti deviennent des sources d’investissements pour le développement économique et social. C’est, à mon sens une erreur très grave. Comment limiter, en effet, le rôle de la diaspora à une simple affaire d’argent à prendre alors que pour la moindre action technique, nous faisons appel à l’étranger au mépris de nos professionnels et techniciens vivant dans le pays et à l’étranger. Cette négligence du plan conforte allègrement la thèse qu’il n’y a pas de techniciens en Haïti. C’est sur la base de cette erreur d’appréciation de l’ambassadeur Brian Dean Curran que nous fut bombardé Gro Gera comme premier ministre avec les résultats que nous connaissons.
j) Les travaux à haute intensité de main d’œuvres concept généreux, peut-être, n’est dans son application en Haïti, depuis qu’il s’est établi le royaume des ONG, qu’une stratégie pour désapprendre à travailler aux haïtiens. Food for work, cash for work faites un coup d’œil par vous même et, imaginez ce que sera la relation de l’haïtien avec le travail dans 10 ans ! Ce qui est préconisé dans le plan pour l’agriculture et les travaux publics est à donner des frissons dans le dos si ces secteurs vitaux pour Haïti devaient effectivement être livrés aux ravages moraux de ce concept qui a déjà fait ses preuves dans le bas Nord-Ouest.
k) Monsieur le Président, A près de 10 ans au pouvoir, après avoir été ministre de l’intérieur et premier ministre, le 12 Janvier a placé dans votre bouche deux mots magiques : décentralisation et éducation. Une découverte ! Des mots ! Rien que des mots, comme pour nous passer en dérision. Le plan de New York a laissé sur le pavé 1, 100,000 êtres humains, au cœur de la capitale détruite, sans l’espoir d’un abri avant trois ans. Et, les 100,000 bienheureux ne vivront, en fait, que dans un vaste bidonville à l’entrée nord de la capitale, la ceinturant comme pour finalement l’étrangler. La priorité sera accordée à la mise en place de 8 sites de décharge (US $43 millions) et de 5 sites additionnels (US $51 millions) pour la desserte effective de la zone métropolitaine et des 10 agglomérations urbaines regroupant une population de 5 millions d’habitants (point 4.7 document No2 page 14). Si cette option lugubre a disparu des documents 3 et 4, le refus de vous approprier de l’approche décentralisatrice du GREH et du PLAPH en re concentrant la population autour de Port-au-Prince est tout simplement un crime au regard de ce qui s’est passé à la capitale le 12 janvier.
l) L’éducation. Après trois mois, la réouverture des classes, finalement décidée pour le 5 avril, a mis à nu les faiblesses des agents responsables de ce dossier aux prises, bien sûr, avec la réalité globale de votre paresseux et incompétent système. Encore une fois les étrangers trouveront dix mille excuses : coup d’Etat ; pardon ! L’ampleur du désastre. Aucun gouvernement n’aurait pu mieux faire ! Mes vraies craintes, monsieur le Président sont de préférence pour la prochaine rentrée des classes.

Une Nation, monsieur le Président, a ses héros et, forcément, ses traîtres, ses collabos. Une Nation a ses opprimés broyant du noir en silence et aussi ses braillards, suants inlassablement pour dire leurs vérités, leurs peurs et leurs craintes d’avoir eu raison. En 1994, comme en 1915, on avait chacun choisi nos camps et, on se connaît tous. Aujourd’hui 15 avril 2010, aussi. Comme l’a dit avec candeur, cynisme ou réalisme le Président du Sénat l’honorable Kély C. Bastien (reçu par Wendell Théodore sur radio métropole comme invité) maintenant que la ville est livrée par le trio Judnel, Rudy, Sémefise, les acheteurs internationaux peuvent bien retirer leurs tickets ! Il est à souhaiter qu’ils évitent les erreurs commises pendant les 24 dernières années comme l’a reconnu, cette semaine, au micro de Wendell Théodore, le représentant de l’OEA en Haïti.

Monsieur le Président, c’est la grande masse de ceux-là qui ne s’engagent pas qui donne leurs victoires aux oppresseurs orientés par les collabos et les traîtres.

Il n’en sera pas éternellement ainsi. Plaise au Seigneur !



Himmler Rébu
Citoyen Engagé
Président du GREH
--

Préval ira-t-il en Afrique du Sud?

Préval ira-t-il en Afrique du Sud?
Jean Erich René

erich@mondenet .com

Ottawa-Canada

18 avril 2010

Un sentiment de frustration et de colère se manifeste de plus en plus en
Haïti. Le fossé entre les citoyens et le Pouvoir Politique s’agrandit au fil
des jours. Les raisons sont multiples et diverses mais la mauvaise qualité
de cette relation a atteint un point de non retour avec le vote de La Loi d’
urgence et le blackout. Le 55e Président d’Haïti en versant 100.000 dollars
respectivement aux sénateurs dissidents voudraient suppléer aux votes des
deux sénateurs de Lespwa morts le 12 janvier 2010 sous les décombres du
Palais Législatif. En effet il a pu obtenir une victoire à la Pyrrhus c’est
à dire pour son malheur. Ce coup d’audace, pense-t-il, lui aurait permis de
bénéficier des pleins pouvoirs.

Comme en 1999, Préval compte mettre la Constitution en veilleuse afin de
continuer à diriger par décret. La caducité du Parlement serait également
déclarée. En une telle occurrence il aurait le champs libre. L’article du
Chicago Tribune: First string in Haiti, vient de le secouer de ses rêves d’
enfant gâté. Il est définitivement confirmé que le Président de la
République sera au courant des différentes opérations de la reconstruction d
’Haiti, mais en aucun cas son Gouvernement n’aura à gérer un centime des
Fonds de la reconstruction .

Pour comprendre le mélodrame qui se déroule actuellement sur la scène
politique haïtienne, il faut bien se mettre en tête qu’il y a deux camps qui
s’affrontent: les altermondialistes et le Département d’Etat américain.
Préval nage entre deux blocs. Mais son jeu secret et personnel c’est la
continuité du pouvoir à la manière de Chavez et de Morales. L’influence
sud-américaine est très prononcée à travers l’OEA et l’ONU qui sont prêtes à
garder le camarade René Préval comme locataire du Palais National. Il n’est
pas superflu de rappeler que s’il a pu obtenir cette baille en 2006, c’était
grâce à la diligence de Kofi Anann et de Juan Galbriel Valdez, deux
altermondialistes qui étaient engagés dans un bras de fer avec Georges Bush
dans le conflit de l’Irak. Ils lui ont remis la monnaie de sa pièce.


Une course à la montre vient d’être engagée entre les altermondialistes et
Washington. Préval en obtenant le vote de la Loi d’urgence voudrait faire d’
une pierre deux coups mais en tirant le drap un peu plus de son côté.Le
dilemme de Préval c’est qu’il n’est pas bien vu par le Brésil pour avoir
relégué aux calendes grecques le projet de l’usine hydro-électrique au
profit de la Compagnie électrique de sa femme.L’analyse des discours
prononcés par les différents intervenants à la rencontre du 31 mars 2010 à l
’ONU laisse entrevoir l’imminence d’un conflit larvé prochainement en Haïti
dans 6 mois. Dans ses propos, le président de la BID a déclaré de manière
péremptoire: ”Nous allons faire le point dans 6 mois” . La Loi d’Urgence
votée aveuglément par les deux chambres comporte des non-dits chargés de
suspens. S’il a été clairement établi que l’Autorité de Développement d’
Haiti ou ADH sera coiffée par Clinton et Bellerive, le Président de la CIRH
demeure jusqu’à présent inconnu. Serait-ce Lewis Lucke qui avait dirigé les
travaux de reconstruction de l’Irak et qui était en Haiti la semaine
dernière. En tout cas, les invitations sont lancées pour l’exposé du Plan de
Reconstruction d’Haiti cette semaine

Au cours de ce semestre, les milliards de dollars en provenance d’Europe, d’
Asie, d’Amérique du Nord et du Sud, vont pleuvoir mais le voile n’a jamais
été soulevé sur l’architecture de la reconstruction. Les Américains qui
tiennent les cordons de la bourse, par l’entremise de la BID, veulent à tout
prix éclipser les altermondialistes. Michèle Obama n’a pas fait une visite
de courtoisie en Haiti. Elle vient de réaliser une opération de marketing
politique en affichant sa sensibilité ethnique afin de prouver l’intérêt
particulier du Gouvernement américain que dirige son mari Barack Obama. Le
message est non verbal mais très expressif et persuasif pour la Première
République noire indépendante du Monde très sensible aux nuances
épidermiques.


Selon un article intitulé “Purse strings in Haiti”, publié par le Chicago
Tribune dans sa livraison du 12 Avril 2010: le Chef d’Etat d’Haïti est
présenté sous le profil d’un cancre et d’un corrompu. Au dire du secrétaire
d’Etat Hilary Clinton : « Cela peut paraitre évident de s'attendre à ce que
le gouvernement d'Haïti ait le contrôle du réaménagement d'Haïti. Mais le
gouvernement d'Haïti a été corrompu et dysfonctionnel pendant un très, très
longtemps. En conséquence, il a souvent été contraint de rester à l'écart et
d’observer le déroulement des projets d'aide internationale soutenue aller
de l’avant. »

Néanmoins, Clinton signale avec sa ferme conviction. "Il sera tentant de se
rabattre sur les vieilles habitudes - pour contourner le gouvernement plutôt
que de travailler avec eux en tant que partenaires ... Nous ne pouvons pas
revenir avec des stratégies qui ont échoué.

Désolé, mais l'échec de la «stratégie» en Haïti a été le gouvernement ».

Cliquez sur
http://articles.chicagotribune.com/2010-04-12/news/ct-edit-haiti-20100412_1_
haiti-s-government-haiti-s-ambassador-haitian

Pour l’édification de tous la version française et le texte original suivent
en fin de page

Préval, comme maitre d’armes, voudrait profiter de la consécration
parlementaire de la CIRH pour obtenir une prolongation de son mandat afin de
faire sauter le verrou du 7 février 2010 imposé par la Constitution qu’il
compte d’ailleurs mettre en veilleuse afin d’entreprendre ses opérations
souterrainnes dans l’impunité.En octobre prochain aura lieu le choc
idéologique Nord/Sud en Haïti. Préval est pris entre l’oncle Sam et les
Barbus.D’une part, supporté par les altermondialistes Préval voudrait
décréter les élections générales. D’autre part , l’échéance des 6 mois
annoncés par la BID pour entamer la reconstruction arrivera à terme.
Washington n’entend nullement entreprendre quoi que ce soit en Haïti avec
les propres artisans de la destruction. Sans aucun ambage, le 7 février 2011
René Préval doit faire ses valises. Un Gouvernement Provisoire chargé des
pleins pouvoirs sera appelé à assurer la continuité. Il aura une mission
différente que le Gouvernement Intérimaire de Gérard Latortue qui se
targuait d’avoir conservé 99% de la structure lavalassienne en place. Ainsi
fut assuré le retour de l’ascenseur avec René Préval son frère jumeau.

Il est aussi admis que le CEP de Préval ne peut pas assurer non plus les
prochaines élections. Démocratie oblige! Une autre structure électorale
incluant tous les Partis Politiques sera mise sur pied. Par son côté
frondeur et anarchiste Préval va essayer de jouer des mains et des pieds
pour briser ce cercle. Qu’il se souvienne du calvaire de Jean Bertrand
Aristide en 2004. Pourtant le milieu international voudrait que Aristide
termine bien son mandat. Mais entretemps on tentait des approches sur place
pour l’établissement ultérieurement d’un régime démocratique. L’Ambassade
américaine avait entrepris des pourparlers avec le Secteur Industriel dont
le leader était Apaid. Jean Bertrand Aristide a pris la malencontreuse
initiative de mettre sur pied en novembre 2003 l’Opération Etau Bouclier..
La noblesse de la politique échappe au commun des mortels.

Chaque bouteille a son bouchon. L’ambassadeur américain a cliqué du doigt et
le Groupe de Guy Philippe, financé par une aile de la bourgeoisie haitienne,
a traversé la frontière. Les manifestations des rues ont changé de camp et d
’emplacement. Le signe était évident que le pouvoir allait changer d’
orientation. Le Champs de Mars et la Rue des Casernes n’étaient plus les
lieux des rassemblements populaires. La Place St Pierre à Pétionville
devient le nouveau foyer de tension qui va exploser le pouvoir Lavalas. Les
chimères d’Aristide avaient comme pendants les GNB qui seront
malheureusement abandonnés par la suite comme les 300 Suisses par cette
ingrate bourgeoisie. Le dernier mot revenait à Gerard P.Charles qu’un avion
de la AA en partance pour les USA a attendu pendant 2 heures d’horloge sur
le tarmac, pour se retrouver le lendemain à Washington.Le weekend suivant
Aristide fut embarqué pour Bangui. En dépit de ses fanfaronnades, il n’a pas
résisté une minute. Sous la pression de sa femme affolée, il a rédigé sa
démission en créole. Pour enfoncer le clou, Andy Apaid et les 184
malfaiteurs deviennent les nouveaux maitres d’Haïti. Ils guidaient la
Primature et obtenaient le scandaleux congé fiscal, privant l’Etat haïtien
de ses maigres ressources.

Comme en 2004, le branlebas est déjà donné pour la concertation des Groupes
Politiques en vue d’un débât démocratique.D’ores et déjà, pour la Première
fois en Haiti, 6 anciens Premiers ministres sont en train de serrer les
rangs pour un projet commun. En octobre 2010 ‘ soit dans le déai de 6 mois
fixé par la BID, Préval sera dans une zone de turbulence. L’organisation des
élections sera en conflit avec le démarrage des travaux de reconstruction
sous la Gouverne de la BID dont l’itinéraire est:

- l’harmonisation du flux des Fonds reçus des donateurs avec les projets à
entreprendre pour la reconstruction

- le lancement des appels d’offres internationales pour la mise en chantier
grâce aux technologies de pointe.

Il demeure entendu que le Top Management sera au rendez-vous. Les compagnies
haitiennes productrices de blackout , distributrices de Mazout souillé et
responsables de chantiers de construction d’écoles et de routes jamais
achevés, seront d’emblée écartées. Le péché originel de René Préval c’est d’
avoir annoncé tant de réformes sans jamais les réaliser. A cause de son
manque de vision politique et de sa sécheresse intellectuelle, il a sombré
dans le démiurgique et le thaumaturgique à travers des déclarations puériles
. Il n’a fait preuve d’aucune finesse dans ses décisions et a abandonné les
victimes du séisme du 12 janvier 2010 dans la plus grande détresse. Devant l
’impossibilité manifeste de retourner le 7 février 2011 à Marmelade avec
Elisabeth qui n’est pas familière au milieu rural, Préval ira-t-il en
Afrique du Sud pour rejoindre son frère siamois, Rhesus Macaca ?

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