dimanche 6 novembre 2011

La marche en avant du législatif vers une dictature parlementaire


La marche en avant du législatif vers une dictature parlementaire
MICHEL WILLIAM
6/11/2011

D’agronome engagé et militant pendant vingt ans dans l’agriculture je suis devenu malgré moi journaliste engagé dans la politique pour trouver la voie royale au changement de l’économie agricole du pays. Je suis devenu par la force de mon combat un analyste politique dont les hypothèses  se vérifient  á 80 -90% avec l’évolution de la situation politique. Avec l’affaire Josué Pierre Louis, ministre de la justice, je perçois  une  marche en avant et précipitée du parlement haïtien vers les cimes dangereuses  d’une dictature parlementaire . Il s’engagerait dans une course contre le temps dans la manipulation des opinions pour diaboliser l’exécutif et dans le refus au judiciaire  d’exercer  son pouvoir pour arrêter un autre pouvoir devenu obsédé et  aveugle.

Tout a commencé  dans l’instrumentalisation de l’amendement de la constitution de 1987 pour constituer un pouvoir mono parti qui investirait toutes les artères  du pouvoir haïtien avec l’élection d’un ingénieur , de vingt cinq contremaitres et de 97  boss maçons qui se réserveraient  le droit sans partage de choisir ses  partisans  pour occuper les postes clefs de l’administration publique haïtienne. Le peuple ayant fait avorter ce projet, le législatif a tenté le coup de profanation de la version amendée de la constitution de 1987 pour récupérer le pouvoir échappé momentanément. Celui-ci ayant été  foiré, il est revenu á la charge  avec le coup du blocage du gouvernement pendant cinq mois avant d’être forcé d’accoucher dans la douleur le gouvernement de Gary Cornille. Celui-ci  n’a pas huit jours d’âge qu’il est sous le coup d’une convocation du CSPN privé de son vice Président,  en l’occurrence du ministre de la justice,   en violation de la loi organique de la police nationale  d’Haïti qui en ses articles  14,15,16 et 17 prescrit les conditions  de sa formation et de son organisation.
  
Le grain de cerise  sur le gâteau  est arrivé avec  l’interpellation du ministre de la justice  une demie heure seulement  après le questionnement insolite du CSPN par le sénat. Celui-ci  se réserve le droit de violer le principe du respect mutuel des membres  de chacun des trois pouvoir en fixant sa date d’interpellation  au mépris de la  disponibilité   et de l’agenda du Ministre de la justice.

Le parlement est entré dans les attributions de  l’exécutif comme un porc sans ( qwok) défense dans un jardin de patate .Imaginez les dégâts sans nom pour ceux d’entre vous qui connaissez la campagne.!Le parlement a interpellé le ministre sans constituer aucun dossier sorti des enquêtes formelles de commissions parlementaires  légales  qui collecteraient des données officielles  viables  pour vérifier les explications á  soutirer du ministre interpellé. Tous ces impairs ont été relevés d’une interview  du ministre Pierre Louis  donnée á  Mme Marie Lucie Bonhomme dans une de ces émissions á  grande écoute   au micro de radio vision 2000 et relayée  par Haïti-Nation. Où est la voix de notre presse dans tout ce désordre ?

Nous venons d’apprécier le non respect du parlement pour l’exécutif haïtien .Voyons maintenant ses efforts répétés de boycotter le judiciaire haïtien  dans son droit constitutionnel d’arrêter un autre pouvoir qui en abuserait l’exercice .
Dans l’affaire Bélisaire, le parlement a qualifié d’arbitraire et illégal l’arrestation du député Bélisaire .La thèse du ministre de la justice est que l’exécutif  ne serait  pas concerné ni de près ni de loin  dans l’arrestation á  l’aéroport du député contrevenant. Il soutient que l’acte d’arrestation du député  émanant du commissaire du gouvernement  est une compétence du pouvoir judiciaire souverain qui est un pouvoir indépendant de l’exécutif et du parlement haïtien et que ce dernier n’a besoin de l’autorisation d’aucun autre pouvoir  pour arrêter le député. Dans l’ordre  d’arrestation  il est dit que les autorités de la police devront prendre toutes les dispositions pour intensifier rechercher et déposer á  la prison civile de Port-au-Prince une liste de prisonniers évadés dont le nom du député  en fait partie.

Apres avoir écouté religieusement pendant cinq heures d’horloge les questions posées par les sénateurs au CSPN amputé d’un membre , après avoir analysé les réponses négatives de chacun des membres du CSPN concernant l’affaire Bélisaire  et après avoir siroté  l’interview du ministre Josué  Pierre Louis donnée á  Mme Bonhomme, ma conviction était totalement formée. J’en arrive á  la conclusion que  ni le parlement ni l’exécutif n’ont qualité pour se prononcer sur l’arrestation  jugée arbitraire et illégale du député. Je partage l’opinion du ministre de la justice selon laquelle ces deux pouvoirs doivent laisser le judiciaire exercer ses attributions, lesquelles  donnent au judiciaire, á  lui et á lui seul la compétence  pour décider de l’arbitraire et de l’illégalité de cette arrestation. Au cas où le pouvoir législatif ne serait  pas satisfait de la décision du judiciaire, la loi prévoit les voies  de recours par devant une autre juridiction plus élevée.

Mr Pierre-Louis pour défendre sa position a avancé deux jugements qui ont été initiés antérieurement par le sénat de la république lui-même et qui ont déjà fait jurisprudence dans l’histoire juridique haïtienne sur la question brulante de levée de droit d’immunité. Il cite les  cas du Sénateur Dany Toussaint et du député Jocelyn St Louis dont les jugements ont été prononcés á  l’avantage  du parlement. On comprend l’étonnement du ministre Josué  de constater que le sénat, dans une volonté politique délibérée  de faire obstacle á l’application de la justice  dans le présent dossier et dans l’idée de mentir á  la presse et á  la population,  refuse au pouvoir judiciaire de prononcer le mot du droit. L’opinion publique avertie  se demande pourquoi cette volonté  manifeste  et cette précipitation du parlement de faire obstruction  á la justice pour l’empêcher d’établir les faits, de faire luire la vérité et de fixer les responsabilités si responsabilités il y en a.

Dans une position antérieure, j’avais voulu utiliser la voie du dialogue politique pour arriver  á  un dénouement heureux de la crise et je soutenais qu’il n’y avait rien á responsabiliser dans un contexte de réparation d’un cas perdu irréparable.

 Ma position de journaliste engagé est toujours restée la même mais elle pourrait avoir évolué un peu  dans la recherche du mot du  droit et de la sérénité politique dans la lutte pour  l’observance stricte du respect de chacun des quatre pouvoirs dont celui de la presse. » Je soumets á  l’appréciation des lecteurs les articles suivants de la constitution  traitant de ce  cas d’espèce. Ils peuvent être utilises  pour faire ressortir l’intervention du judiciaire dans son droit constitutionnel de se saisir de l’affaire  pour recueillir les informations légales et pour protéger le fourvoiement des deux autres pouvoirs parus trop intéressés.

Article 26.1:
En cas de contravention, l'inculpé est déféré par devant le juge de paix qui statue définitivement.
En cas de délit ou de crime, le prévenu peut, sans permission préalable et sur simple mémoire, se pourvoir devant le doyen du tribunal de première instance du ressort qui, sur les conclusions du Ministère Public, statue à l'extraordinaire, audience tenante, sans remise ni tour de rôle, toutes affaires cessantes sur la légalité de l'arrestation et de la détention.

Article 27:
Toutes violations des dispositions relatives à la liberté individuelle sont des actes arbitraires. Les personnes lésées peuvent, sans autorisation préalable, se référer aux tribunaux compétents pour poursuivre les auteurs et les exécuteurs de ces actes arbitraires quelles que soient leurs qualités et à quelque Corps qu'ils appartiennent.

Article 28:
Tout Haïtien ou toute haïtienne a le droit d'exprimer librement ses opinions, en toute matière par la voie qu'il choisit.

Article 107:
Dans le cas de convocation à l'extraordinaire du corps législatif, il ne peut décider sur aucun objet étranger au motif de la convocation.

Article 115:
Nul membre du Corps législatif ne peut, durant son mandat, être arrêté en matière criminelle, correctionnelle ou de police pour délit de droit commun, si ce n'est avec l'autorisation de la Chambre à laquelle il appartient, sauf le cas de flagrant délit, pour faits emportant une peine afflictive et infamante. Il en est alors référé à la Chambre des députés ou au Sénat sans délai si le Corps législatif est en session, dans le cas contraire, à l'ouverture de la prochaine session ordinaire ou extraordinaire.

Article 173.1:
Les contestations qui ont pour objet les droits civils sont exclusivement du ressort des tribunaux.

Organisation et fonction du Conseil supérieur de la Police nationale (CSPN)
Article 14.- Le CSPN est composé comme suit :
1. Le Premier Ministre, chef du gouvernement, président;
2. Le Ministre de la Justice, premier vice-président;
3. Le Ministre de l’Intérieur, deuxième vice-président;
4. Le Commandant en chef des forces de police (le directeur général de la Police nationale), secrétaire exécutif;
5. L’Inspecteur général en chef de la Police nationale, secrétaire exécutif-adjoint.

Article 15.- Le CSPN se réunit à l’ordinaire chaque trimestre et à l’extraordinaire sur la convocation de son président à la demande de deux de ses membres ou sur requête motivée de son secrétaire exécutif.

Article 16.- Les décisions du CSPN sont prises à la majorité absolue des voix et sont consignées dans le registre de son secrétariat affecté à cette fin.(souligné en gras par moi)

Article 17.- En des circonstances exceptionnelles appelant le renforcement des mesures de police, l’avis préalable du CSPN est obligatoire.

Voici maintenant quelques réponses données á  Marie Lucie  Bonhomme par le ministre Josué ,  reprises et adaptées par Michel William
D’aucuns disent que le commissaire AI du parquet de Port-au-Prince aurait fait montre d’excès de zèle et d’empressement dans l’arrestation du député, que pense le Ministre ?.
R  du ministre -Ce sont là des racontars car le comportement des autorités du pays est déterminé par la loi . Il faut permette aux institutions de l’état de monter des commissions pour établir les faits, questionner les acteurs et  fixer les responsabilités  s’il y en a , au regard de la loi.

Le commissaire a –il violé l’article 115 ?
R du ministre. Je ne peux pas interpréter la loi. Cette réponse est du ressort des tribunaux après investigation. Le sénat ne veut pas , n’attend pas des investigations pour établir la vérité sur les faits  et éclairer l’antenne de la Justice et de l’opinion.

Le commissaire est-il fautif ?
R du ministre : Il ne peut pas en savoir sans  attendre  les résultats d’enquêtes et sans recueillir les opinions de magistrats placés légalement pour interpréter les résultats  et établir les culpabilités

Le ministre Pierre-Louis dans sa sagesse a dit qu’il  faudrait éviter de victimiser le député Bélisaire, la police  dans l’exercice de son mandat á  exécuter  un ordre judiciaire qu’elle doit respecter et le directeur de la PNH.

Le directeur de la PNH aurait il été pressuré comme il est dit dans la presse pour  procéder a l’arrestation du député de  peur d’être révoqué ?
 R du ministre  C’est du zen. le comportement des autorités du pays est déterminé par la loi.

Le député Sorel Jacynthe aurait dit que le président de la république serait encouragé dans  cette arrestation par le ministre de la Justice.
R du ministre  Faux . Je n’ai rencontré que deux fois le député  Jacinthe en de rares occasions où je n’ai pas eu d’échanges d’état avec lui. Dans cette réunion, il n’en était pas question .Comme il y avait la présence d’autres députés dans la salle , le meilleur moyen de découvrir qui a menti ou  qui n’a pas menti est d’interroger les participants présents á a cette réunion.

Il est dit que des parlementaires avaient demandé au président de laisser tomber  l’affaire Bélisaire, qu’en était-il ?.
R du ministre  Oui dit  le ministre. On semblerait avoir  l’accord de tous, mais lui en tant que ministre il n’avait  pas le  droit d’instrumentaliser le pouvoir judiciaire.

Aviez vous encouragé  le président de la république , comme le soutient le député Sorel Jacynthe d’abandonner cette affaire pour se sauver la face. ?
R du ministre  Absolument faux. Ceci  n’était pas dit. Les députés présents peuvent en témoigner.

Quid de la convocation du CSPN.
R du ministre   Convocation nulle et non avenue au regard de la loi parce que contraire aux procédures de sa formation et de son organisation. Sa convocation par le sénat a violé la loi organique  de la PNH. Le parlement ne peut pas  prendre une décision légale sans les informations  fournies par la totalité  de ses membres. L’absence même d’un seul membre invalide les réponses.

Les sénateurs ont dit qu’ils ont le droit d’interpréter politiquement le dossier , que pensez vous ?
R du ministre  C’est leur opinion, il ne m’appartient pas de commenter les opinions des sénateurs.

Avez-vous le soutien de vos collègues qui craindraient  aussi sur leurs têtes l’épée de Damoclès du sénat ?
R du ministre  Il n’y a aucune crainte. Le sénat est entré émotionnellement  dans le dossier sans avoir recueilli les informations des acteurs présents sur les lieux d’opération. Il n’a aucune preuve pour établir aucune décision d’état. Il n’a encore rien en main pour établir les responsabilités de personne dans cette affaire. Sous le coup de l’émotion, il  peut prendre les décisions que bonnes  lui semblent. Cependant je crois dans la responsabilité politique  des sénateurs qui sont  des sages. Ils  doivent veiller dans leurs décisions de :
-Respecter  l’institution parlementaire
-Etre certain de n’avoir pas violé la constitution
-De ne pas livrer dans la rue les secrets d’Etat
-De respecter les canaux tracés par la loi pour établir les responsabilités.
Quels impacts pourrait avoir l’interpellation des sénateurs ?
Cette interpellation aboutira á  ma révocation du cabinet ministériel. Elle mettra une fin á   toute action de poursuite des députés á  la rentrée de Janvier. Loin de trouver une solution qui satisfait l’opinion elle pourra servir de ferments pour la violation en cascade et infinie  d’autres articles de la constitution.

Réflexions
Comme annoncé au début de cet article, le parlement vient de franchir l’infranchissable. Il va tout droit vers une dictature parlementaire aux frontières politiques inconnues. L’amendement de la constitution amendée pour nous donner un autre contrat social á  la lumière des changements désirés par la population  est  l’unique solution politique définitive. En essayant de torpiller la justice pour barrer la route á  la vérité et empêcher que la lumière luise pour faire le jour sur des faits qui ressortent de la compétence des tribunaux, le  parlement a opté pour une solution politique gwo ponyet. Il vient de montrer très clairement sa propension et son désir effréné de faire main  mise  sur le pouvoir judiciaire pour faire obstruction á  la justice du pays après le sabotage du pouvoir exécutif. Après avoir vu s’évanouir son rêve hégémonique de rafler tout le pouvoir aux  élections de 2010-2011, il ne s’avoue pas vaincu. Il n’aura reculé devant rien pour assouvir ses ambitions dictatoriales. En la personne du député Sorel Jacinthe, la chambre des députés vient de commettre les pires erreurs d’un homme d’état. Pire que le  président de la république, il n’a pas peur d’utiliser les mots comme il veut , où il veut et quand il veut. Il oublie qu’il est le troisième personnage politique du pays. Il oublie tout simplement que les messages qu’il envoie dan la population et dans l’international ne lui appartiennent plus et que nous autres nous pouvons leur donner l’interprétation  voulue. Il aurait été plus indiqué qu’il fasse attention  á ses discours comme un  personnage  politique important après le président de la république et le  président de l’assemblée nationale. En dehors de toutes investigations scientifiques on peut dire qu’il  a menti plusieurs  fois dans  ce dossier, dans l’accès refusé  á l’aéroport, dans l’attribution de paroles au ministre de la justice pour mieux  manipuler l’opinion publique  de façon á  l’induire en erreur avec les conséquences imprévisibles non souhaitables, dans la perte de  sa sagesse de troisième personnage politique en ratant l’occasion en tant que leader du groupe majoritaire de faire jouer ses éminences grises pour sauver l’institution parlementaire menacée. Le député Jacinthe venait de perdre sa crédibilité politique aux yeux de l’International. Il a publiquement traité le président de la république de dictateur. A l’exemple de leur chef  la majorité des députés se sont alignés pour chanter en chœur les mêmes refrains qui ternissent l’honneur et le prestige de la chambre des députés.

Il faut regretter au passage la prostitution de la définition acceptée par ses membres  que le parlement est une assemblée  politique et comme telle  elle peut prendre n’importe quelle décision qu’elle soit contraire á  la morale, á  la pudeur , á  la justice, á  la constitution (, article 26-1,27, 157 de la constitution , article 16 de la loi sur le CSPN) , ou qu’elle fasse de cette assemblée une organisation de  bandits , pourvu que la décision prise satisfasse leurs ambitions égoïstes. Votre feu auguste assemblée  ne gagnera  pas ainsi le respect des diplomates accrédités en Haïti, encore moins celui de ses pairs d’outre mer. Elle ne gagnera pas le crédit de la population  Il faudrait tout de même  excepté quelques lumières comme  maitre Danton Leger, maitre Tolberg Alexis, pourquoi pas le sénateur William Jeanty, quelques fois les sénateurs Bastien et Andris Riché,  maitre Youri Latortue  et bien  d’autres  qui peuvent encore utiliser leurs réserves pour refaire le visage ternis du parlement  haïtien.

Il faut toujours prendre en référence l’exemple du sénateur  Joseph Lambert qui  a  montré depuis le commencement de la crise électorale jusqu'à date qu’il est l’un des derniers espoirs  du politique  haïtien sur lequel la génération des jeunes comme des vieux peut compter pour nous épargner des surprises sinistrement surprenantes de demain. Sénateur Lambert , la nation vous en donne acte et promet de ne pas vous oublier dans les grands rendez vous de son histoire á  venir. Je souhaite de tous mes vœux que de cette quarante neuvième  qui compte  une floraison d’avocats se détachent de nouvelles lumières pour ramener le gros du troupeau au bercail de la raison et du droit afin de  replacer Haïti , notre pays , dans le concert des démocraties jalouses du continent américain.

NY 6 novembre 2011, Phone  646-420-1852

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