Me Serge H. Moïse av.
Barreau de P-au-P.
Des belles phrases, encore des phrases
bien tournées, tant de nos dirigeants politiques que des envoyés spéciaux, mais
toujours rien de concret pour les milliers de sinistrés et encore moins pour
les millions de chômeurs qui, en dépit de leur résilience, sont sur le point de
perdre toute lueur d’espoir.
A quand le véritable plan de
relocalisation de nos infortunés sans-abris?
A quand une commission pour le renouvellement de notre constitution
et la réforme judiciaire?
A quand une institution pour la
création d’emplois sur toute l’étendue du territoire national?
A quand une commission pour l’épuration
de l’administration publique et de la police nationale?
A quand un système éducatif qui tienne
compte d’un substrat idéologique en adéquation avec notre culture?
A quand le respect intégral des droits
de la femme?
A quand la fin du népotisme, de la
corruption et de la médiocrité?
Autant de questions fondamentales et
beaucoup d’autres, pour lesquelles, s’il n’y a pas de réponses sérieuses et
dans les plus brefs délais, le faire semblant se poursuivra au détriment de nos
éternels sinistrés, toutes catégories confondues.
A ce carrefour, plus qu’inquiétant de
notre histoire nationale jalonnée d’accidents et d’échecs, la preuve est déjà
faite que les beaux discours, les phrases ronflantes, creuses et vides de sens
n’ont jamais servi qu’à endormir les naïfs au profit des prédateurs locaux et
étrangers. L’heure est venue de se poser les vraies questions et d’y apporter
les réponses appropriées, en évitant, cette fois, d’évoluer dans les sentiers
battus, qui consiste à singer les autres dont la réalité n’a rien en commun
avec la nôtre.
Parler d’éducation dans un pays analphabète
à soixante pour cent, c’est certainement louable et personne n’oserait s’y opposer, mais prétendre que la création
d’emplois ne constitue pas la priorité des priorités et continuer à exporter
nos diplômés, c’est simplement diabolique.
Nos intellos doivent se remettre en
question, se réveiller, renoncer à ce comportement de « petit nègre de
service » et cesser de répéter l’autre à l’instar de perroquets savants.
Il faut certes éduquer nos jeunes et
nos moins jeunes mais ne plus en faire des acculturés, car tant et aussi
longtemps que le développement
passera par les créneaux culturels, notre système éducatif dans l’état actuel
des choses fera de nous des sous-traitants pour les pays nantis et nous
continuerons à nous glorifier de la performance de nos éléments d’élite en
terre étrangère tandis que l’alma mater s’enfonce chaque jour davantage dans la
fange de la corruption, de la pauvreté
et de la misère sous toutes ses formes.
Est-il besoin de souligner à l’eau forte que mise à part l’urgence de la
reconstruction des zones dévastées, la priorité des priorités demeure la
création d’emplois à travers le pays tout entier? La mise à contribution de ces
millions de bras désœuvrés qui n’aspirent qu’à travailler jour et nuit s’il le
faut en lieu et place des machines, doit retenir l’attention de nos
planificateurs car le développement, ne l’oublions pas, est d’abord humain.
Le fondement d’une société, c’est d’abord son cadre normatif,
c'est-à-dire l’ensemble des règles de droit ayant pour objectif d’harmoniser
les rapports entre gouvernants et gouvernés d’une part, et ceux des citoyens
entre eux d’autre part. Tout le monde le sait, pourtant, paradoxalement,
personne n’en parle et quand cela se fait, ce n’est que du bout des lèvres,
donc sans conviction, exprimant cette culture de non droit qu’il faut
absolument extirper de notre mentalité et au plus vite.
La refondation de notre Haïti se fera quand tous les enfants du pays
comprendront qu’ils doivent tous s’y impliquer d’une manière ou d’une autre
avec à l’esprit les intérêts supérieurs de la nation et pour ce faire, il faut
le leadership approprié, un partenariat public-privé « ppp », à
partir de projets qui collent à la réalité haïtienne et porteurs de progrès et de développement, une vision rassembleuse, inclusive de toutes
les forces saines de la famille et la volonté inébranlable de relever ce noble
défi en l’honneur des pères fondateurs de la patrie et pour notre mieux être
collectif.
Ainsi, dans un avenir prévisible, on ne parlera plus de nous comme étant
le pays le plus corrompu et le plus pauvre de l’hémisphère, mais plutôt du
sursaut de ce peuple résilient, courageux et fier qui aura su encore une fois
défier le sort et à travers la convivialité et l’harmonie entre ses fils et
filles reconquérir son titre enviable de Perle des Antilles.
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