Le riz comme pour l’Engrais !
Michel William
21/09/2012
A la grande surprise de la classe politique traditionnelle le gouvernement Martelly Lamothe expérimente une composante sociale qui fait trembler de peur tous ceux la qui étaient au pouvoir durant les vingt cinq dernières années. Qui eut cru, comme l’a si bien fait remarquer le chef de l’Etat, que c’est la présidence d’un ancien chanteur de bande qui viendrait voler au secours d’une population á soixante quinze pour cent pauvre..Les faits politiques ont parlé d’eux-mêmes et la vérité a jailli de la réalité. L’école universelle gratuite, la carte d’assurance sociale, la carte d’assurance maladie, le crédit PAM, le kay PAM, la cantine populaire , le « Ti manman cheri », la politique de subvention de l’engrais au profit des cultivateurs qui se défoncent pour nourrir les 50% de la population , sont autant de mesures de politiques publiques d’accompagnement qui témoignent de la volonté inébranlable du président Martelly de trancher d’avec les vieux clichés du faire semblant de venir en aide á la population..
La création d'une commission interministérielle chargée de stabiliser les prix des produits de première nécessité est le tout dernier acte posé par le président Martelly.Son but participe de la volonté du gouvernement Lamothe de soustraire á l’appétit naturel du secteur des affaires d’anticiper sur la montée du dollar et sur les conséquences climatiques négatives (32.000 has de fruitiers et de bananeraies détruits)) pour faire monter les prix .C’est le cas actuel du riz dont le prix sur le marché international ‘se stabilise aux abords de cinq cents dollars américains la tonne pendant qu’en Haïti, les prix flambent sans explication acceptable.
Pour Marie-Carmelle Jean-Marie, ministre de l’Economie et des Finances , l’Etat jouit d’un accord spécial sur le pétrole avec le Venezuela. Cet accord autorise l’état dans les cas d’urgence á utiliser une partie de ces fonds pour subventionner les produits stratégiques dont l’augmentation des prix á la consommation peut nuire á la stabilité politique du pays.
En vertu de ce contrat l’Etat aurait négocié avec les entrepreneurs une structure des prix qui tiennent compte des frais, des taxes et d’une marge de bénéfice acceptable dans le commerce du riz dont l’importation atteint 480 mille tonnes l’an. Celle-ci représenterait quatre fois la production nationale du riz qui , même bien encadrée, ne dépassera jamais les 200.000 tonnes avec un rendement moyen extraordinaire de quatre tonnes /has. Ce calcul est pour ramener sur terre les rêves féeriques d’un Jean Robert Estime qui utilise le mirage du SRI impossible (Système de riziculture intensive 12-16 tonnes /has) pour faire dormir le ministère de l’agriculture en voulant défendre la thèse que la micro exploitation ne constitue pas un obstacle á la productivité des cultures et á l’augmentation de la production agricole.
D’après radio Magik Stéréo qui cite la ministre des Finances « Nous pensons que le modèle de contrat pétrolier peut être appliqué sur tous les produits sensibles pour les consommateurs. Mais nous n’allons pas nous substituer aux importateurs parce que l’Etat haïtien n’a ni les moyens logistiques ni les moyens financiers pour ce genre de transaction ». Période.
Le ministre du commerce et de l’industrie ,Mr Wilson Laleau, aurait reçu le feu vert de la commission interministérielle pour régulariser le prix de cinq produits stratégiques qui entrent quotidiennement dans le panier de la ménagère. Il s’agit du riz importe á 75% de la consommation , de la farine du mais consommée massivement par la population sous toutes les formes ,du haricot dont la production locale déficitaire est commercialisée par « Ti malice » á grand renfort de publicité contre productive, de l’huile et du sucre dont les prix ont pratiquement doublé sur une période de trois ans.
Cette mesure qualifiée de révolutionnaire par la gauche politique non obscurantiste n’est pas sans susciter des commentaires les plus variés, dans la presse et dans le commun des mortels. Le quotidien de la rue du centre , reprend l’esprit de l’interview de Mme Marie Carmelle Jean Marie et titre « Du riz comme pour le pétrole « .Il cite une source non identifiée mais proche de la commission qui ferait croire que l’état par cette mesure deviendrait le premier importateur de riz. Dans la même foulée précipitée, le journaliste renchérit involontairement que selon le ministre, les importateurs vont devenir des distributeurs de riz.
L’opposition INITE, par la voix du député Saurel Jacynthe, un transfuge de la fusion socialiste ,se lamente du fait que le gouvernement de Martelli, par cette décision, a raté l’occasion de relancer l’agriculture, car en deux trois mois, le gouvernement avec le même montant investi dans la culture du pois du mais, du riz , de l’igname de la banane » mettrait á peine deux á quatre mois pour boucler le cycle de production de ces cultures »Le député de Moron Chambelan a dévoilé dans une intervention télévisée sa nullité dans les affaires agricoles en clamant á la radio que rien dans la Grand Anse, le gouvernement pourrait faire la différence en mettant en valeur le terroir de cette région apte á produire et á nourrir la majorité de la population haïtienne. Les analystes avertis se demandent perplexes, pourquoi le député Saurel Jacinthe ,aux affaires depuis 1990 n’a pas voté des lois budgétaires et organiques sectorielles qui auraient mis en place les conditions de valorisation de l’écologie agricole de cette région effectivement taillée pour le fruitier et les tubercules.
D’autres politiciens mieux imbus des problèmes de l‘arrière pays mais tous aussi ignares de la réalité économique de l’agriculture haïtienne dans leur propres patelins arguent que le peuple en sortirait mieux soulagé si cet argent était investi dans l’agriculture qui offrirait des solutions de production plus rapides. Ces faiseurs d’opinions se trompent d’adresse dans l’agriculture, car ils oublient que vouloir produire et produire sont effectivement deux vœux de l’esprit qui, pour se concrétiser , doivent rejeter les gouvernances économiques des derniers présidents de l’ère lavalassienne suivies en partie pendant le gouvernement intérimaire de Boniface Alexandre jusqu'à la fin du mandat prolongé du président Préval. Ces politiciens ont recommandé une politique de désétatisation á outrance qui livre les cultivateurs mains et poings liés au secteur privé et aux ONG. Ces politiciens décorés par la Minustha feignent d’ignorer que la relance de ce secteur demande une planification intégrée et une mise en place transversale de décisions concertées pour produire des effets durables á moyen et á long terme.
Mais l’enjeu du présent article est de démontrer plutôt la possibilité d’exploiter une trouvaille du ministère de l’agriculture dans la privatisation de l’engrais subventionné tout en soutenant une certaine étatisation pour empêcher la flambée des prix aux consommateurs et pour encourager partiellement l’augmentation de la production agricole.. Le nouvel essai de cohabitation du secteur privé des affaires et de l’état Haïtien á travers le ministère de l’agriculture et le bureau de monétisation dans la commercialisation de l’engrais mérite d’être signale á l’attention du grand public .Il est évoqué pour montrer ce dont est capable un gouvernement Martelly Lamothe lorsqu’il fait appel aux branches encore saines de l’administration publique haïtienne qui jure de ne pas vivre de la manne des ONG contraire aux intérêts de l’agriculteur haïtien au moment de leur passage aux affaires de l’Etat.
Pour mémoire il convient de rappeler que la consommation de l’engrais s’était stabilisée dans les années 97 aux abords des 15 mille tonnes. Le ministère de l’agriculture á travers des efforts consentis par le trésor public haïtien et le gouvernement japonais avait essayé au cours des quinze dernières années plusieurs scenarios de partenariat avec le privé qui ont connu tantôt des hausses tantôt des baisses dans la consommation de l’engrais jusqu'à concurrence d’un million de tonne . Cette expérience a évolué en dent de scie á cause de l’irruption parfois violente dans le processus de certains ministres de trahison nationale qui croient dans une désétatisation sauvage sans regarder ses conséquences sur les cultivateurs déjà décapitalisés. Ces ministres , sous le fallacieux prétexte que la subvention tue l’effort du secteur des affaires arrivent á ourdir des complots d’enterrement des cultivateurs haïtiens en remettant aveuglément au secteur privé le monopole intégral du commerce de l’engrais. Tout se passe comme si ces ministres de l’agriculture avaient signé avec le diable un pacte de continuité de la liquidation du capital rural au profit des intérêts égotistes du secteur des affaires et de l’international..L’engrais et la question des assurances agricoles participeraient de la conclusion de ce pacte diabolique et ténébreux. .’Il a fallu attendre l’arrivée historique du président Martelly pour faire un don de 100.000 mille sacs d’engrais dont la distribution allait déclencher les réactions les plus noires et les plus violentes dans la vente illégale de cette commodité. Ces réactions malheureuses ont permis en revanche au MARNDR de faire une trouvaille salutaire qui fait le bonheur des cultivateurs en particulier , celui du secteur privé et celui du gouvernement en général . Cette trouvaille semblerait faire des heureux au niveau du gouvernement de Mr Lamothe qui aurait décidé de l’expérimenter au niveau des produits stratégiques entrant dans le panier quotidien de la ménagère haïtienne.
Quel a été le secret trouvé par Damien ?
Il serait injuste au prime abord d’attribuer á Damien tout seul le bénéfice de l’heureuse trouvaille. Ce miracle a été l’œuvre combinée des techniciens chevronnés du MARNDR, des importateurs d‘engrais, des distributeurs de l’engrais , de la participation indirecte de la population qui dénonçait la main mise des politiciens et celle du secteur des affaires dans la vente d’un produit stratégique. Cette trouvaille pourrait avoir été aussi facilitée par l’expertise et la Sagesse de la vision stratégique des cadres du bureau de Abagrangou qui , dans leurs discussions transversales au sein du COLFAM pourraient avoir peaufiné la démarche en suggérant certaines stratégies vitales dans la lutte contre la faim et la malnutrition.
Les trois partenaires directement impliqués, le MARNDR, les importateurs et le réseau de distributeurs qu’il ne faut pas confondre avec les importateurs, ont trouvé la formule magique qui fait du secteur privé et non de l’état le seul importateur et distributeur d’engrais. Le secteur privé dont le seul métier est la vente de produits para agricoles a été maintenu dans son rôle d’acheteur et de vendeur pendant que la subvention donnée aux cultivateurs par l’état confère á ce dernier le droit de réguler les prix de vente du produit devenu stratégique dans certaines cultures.
Dans cette saga , l’état haïtien subventionne l’engrais á hauteur de 50%. Le secteur privé se charge de l’achat de l’engrais avec son propre argent, touche la subvention dans les quinze jours qui suivent le débarquement de la commande .Un autre réseau du secteur privé, celui des distributeurs patentés et chefs d’associations reconnues légalement , prend en charge la distribution de l’engrais dans toutes les zones de consommation á certaines conditions :
L’importateur ne sera pas le distributeur.
Le prix au dernier consommateur ne dépassera pas le prix arrêté par les trois partenaires á la signature des protocoles d’accord.
Le MARNDR , les importateurs et le réseau des distributeurs signent respectivement deux contrats bi et tripartites qui fixent les droits, les devoirs et les pénalités encourues par le privé en cas de violation des conditions.
Un corps de superviseurs a été mis en place pour superviser la vente de l’engrais .
Un communiqué de presse de la direction générale du MARNDR a été publié qui rappelle aux uns et aux autres les engagements pris pour le bonheur des cultivateurs haïtiens.
Une campagne d’information agricole , en retard de paiement, parce que jamais prévue pour ce genre d’opération , a permis la compréhension et la collaboration de tous pour la réussite de l’opération
Pour ce qu’il s’agit de l’engrais provenant du don japonais , la commande est entrée en Haïti sur appel d’offre au niveau des importateurs haïtiens .Elle est remise au bureau de monétisation pour être commercialisée .Ce sont les importateurs qui achètent l’engrais au prix de gros, qui le revendent suivant le principe des accords bi et tripartites aux distributeurs qui eux-mêmes se chargent du transport et de la vente au détail du produit stratégique.
Quand le journal de la rue du centre titre « Du rix comme pour le petrole » et non du riz comme pour l’engrais, les observateurs notent une méconnaissance de la nature du contrat de l’engrais subventionné ou une communication intéressée d’un ministère pour avoir le crédit de la trouvaille, quand le succès d’un ministère est celui de tout le gouvernement.
Ou encore serait-ce une erreur journalistique ou une faute intentionnelle de reportage.
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Le reportage a laissé comprendre que l’état est devenu le seul importateur de riz.
Le texte insinue que l’état manifesterait son intention de déclarer la guerre au secteur privé. Il ne s’agit pas de cela.
La lecture e l’article semble créer tout aussi bien la perception que l’état de Martelly avancerait á grand pas vers un état communiste bourgeois qui monopoliserait la vente du riz au profit de grands commis et alliés du gouvernement, Il n’en est rien.
Le journaliste pourrait sans le vouloir travestir la bonne intention de son article en omettant de faire ressortir l’importance de la composante sociale d’un gouvernement Micky qui étonne par ses innovations en matière de politique publique en faveur des plus demunis, quand toute la classe politique a tendance á accuser le gouvernement de spoliateur de budgetivore, de prédateur et de détourneur de fonds .
Tout en donnant le crédit de la part du lion au MARNDR dans la mise en place de cette composante sociale révolutionnaire du gouvernement Lamothe, il est á se demander si , au niveau de la clientele du riz, du mais , des haricots du sucre et de la farine qui regroupe de puissants hommes d’affaires qui généralement tiennent la dragée haute au gouvernement , l’opération sera menée avec la même aisance observée dans le secteur agricole . Pour le moment toute l’information permettant de voir où l’on veut en arriver n’est pas disponible. On sait seulement comme l’a dit le la ministre des finances, que le gouvernement n’a pas les reins économiques assez forts pour pratiquer la subvention á la seule commodité du riz, voir, pour l’étendre au mais, á l’ haricot, á la farine, au sucre et á l’huile. A quelle hauteur de participation de l’état se pratiquera cette subvention et á combien sera fixé le prix au consommateur pour chacun de ces produits ?.On ne connaît pas encore la réponse á toutes ces interrogations.
Dans un contexte lourd de revendications sociales et fait de manipulation du discours politique, il serait plutôt sage d’aller aux informations á la source même pour savoir les tenants et les aboutissants de la démarche , le nouveau rôle de pionnier social que le secteur de l’agroalimentaire voudrait jouer dans le gouvernement Martelly Lamothe et se garder de faire toute spéculation grossière de l’information politique qui ne desservirait pas les ’intérêts de personne en ces moments difficiles de la vie nationale. Le moment est au calme et á la vigilance. Toute idée positive en vue d’améliorer la démarche au niveau de la commercialisation de ces produits stratégiques devrait avoir le pas sur les critiques stériles non productives. « Du Riz comme pour l’engrais ».pourrait être une motivation additionnelle pour le MARNDR d’aller plus loin avec le ministre Thomas Jacques.
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